Philippe Saint-André est-il un sélectionneur «normal»?
RUGBY•Après Laporte le colérique et Lièvremont le tourmenté, les joueurs du XV de France découvrent Philippe Saint-André le pragmatique...Alexandre Pedro
Philippe Saint-André n’est pas François Hollande. A deux jours de ses débuts dans le Tournoi des VI Nations contre l’Italie, le nouveau sélectionneur de l’équipe de France de rugby ne brandit pas sa normalité comme argument de campagne. Son arrivée marque pourtant une petite révolution de palais à Marcoussis où les murs ont pas mal tremblé ces douze dernières années.
«Marc (Lièvremont) avait envie d’être plus proche de nous»
Après Bernard Laporte, mitraillette à paroles capable de vous faire fondre en larmes des gaillards d’un quintal et Marc Lièvremont le tourmenté à la franchise déconcertante, les Bleus découvrent un patron moins enclin aux débordements émotionnels. «On est plus dans une relation d’employeur-employés», confirme l’expérimenté Julien Bonnaire qui a connu ses deux prédécesseurs.
Ces derniers mois, le troisième-ligne et les autres «sales gosses» ne savaient plus sur quel pied danser avec un sélectionneur mi père fouettard, mi bon copain. Pour avoir goûté les deux facettes de la personnalité du Catalan, François Trinh-Duc n’est pas contre ce vent de pragmatisme. «Je préfère que ça soit carré, rigoureux, qu’on en prenne plein la gueule mais qu’on avance au niveau rugby», glisse l’ouvreur. «Marc avaient envie d’être plus proche de nous, c’est dans sa nature», défend quand-même Bonnaire.
Un pragmatisme tout britannique
Avec PSA, la rupture ne tient pas seulement à une communication plus politique quand Laporte aimait les effets de manches et Lièvremont l’introspection en place publique, elle vaut aussi par sa gestion des hommes. Moins d’affectif, plus de pragmatisme pour faire vite. «Je suis à cheval sur certaines règles comme le respect, le travail, le don de soi. Celui qui ne respectera pas les règles s'exclura de lui-même», prévient Saint-André, qui a convoqué ses 23 joueurs pour des entretiens individuels.
Ce mode de fonctionnement à l’anglo-saxonne est un héritage de son septennat à la tête de Gloucester puis de Sale. «Il a bien appris son métier en Angleterre où le titre de manager prend tout son sens, souligne le centre Aurélien Rougerie. Les Anglais sont moins dans l’affectif que nous. Soit tu es bon, soit c’est banquette.» Le Goret serait-il alors plus british que drômois? William Servat rassure. «Vous savez, il n’a pas l’accent anglais quand il nous parle.» Plus que sur son accent ou sa façon de communier avec ses ouailles, le nouveau patron des Bleus va d’abord être jugé sur ses résultats. Et là, ça ne change pas.