Alain Bernard: «Je suis tellement puissant que je m'étonne»
INTERVIEW•Le champion olympique en titre du 100m attaque sa saison olympique avec entrain...Propos recueillis par Romain Scotto
Officiellement, Alain Bernard a lancé sa saison olympique il y a dix jours à Tokyo où il a plongé en compétition pour la première fois. L’Antibois s’est rassuré et sent déjà l’effervescence d’une saison qui le conduira lentement jusqu’à Londres, où il était cette semaine en repérage avec les membres du Team EDF. Avant les championnats de France en petit bassin d’Angers, du 2 au 4 décembre, le champion olympique du 100m dévoile ses ambitions de médaille aux JO et son envie d’être porte-drapeau…
Vos entraînements vous rassurent-ils en ce début de saison olympique? Etes-vous dans les clous?
Oui, carrément. Sur ma première compétition, sans trop de repères, je ne nage pas trop mal à Tokyo et je ne m’en satisfais pas. Je sais que je suis capable de faire mieux par rapport à ce que je fais à l’entraînement. Je sais que j’ai fait des choses en ce début d’année que je n’ai jamais fait de toute ma carrière. En terme de chrono ou de propulsion, je me surprends. Je suis tellement puissant que je m’étonne, c’est bon signe.
Comment gère-t-on les sollicitations pendant une saison olympique?
Je ne vais pas dire que c’est différent, mais on est dans une stratégie où on essaie de se préserver. Je m’affiche devant les médias le moins souvent possible. Quand j’en ai besoin ou que c’est nécessaire. Depuis le début de la saison, je suis plus prudent avec les partenaires ou la presse. Je suis discret c’est ce qui me correspond. Je n’ai rien à cacher, mais c’est juste une question de plénitude et de sérénité à l’entraînement.
Parce que dans votre tête, vous êtes déjà braqué sur les JO?
Oui, j’ai envie de mettre toutes les chances de mon côté. Ça veut dire s’entraîner dur, être rigoureux, impliqué au jour le jour. Ça fait partie d’un cercle vertueux dans lequel il ne doit pas se greffer des choses parasites pour contrarier l’entraînement, la récup, l’envie. J’ai basculé dans une grande préparation. On se protège. Là, c’est quasiment la dernière année où je m’entraîne et je veux faire des compétitions. Donc je veux sortir de là en étant satisfait. Pas par le résultat, on verra en temps voulu. Mais de l’investissement et l’engagement. Je ne voudrais pas avoir de regret.
Cela fait trois ans que vous attendez cette préparation. Etiez-vous impatient?
Je ne me rends pas compte… On est encore assez loin des Jeux, niveau timing. Je vis bien cette année parce qu’il y a plus d’excitation. L’envie a toujours été là, mais on entre dans des choses subtiles. Ça devient minutieux. J’adore ça. Mais pour moi, c’est encore loin. Londres arrivera après de bons championnats de France. Il faudra être performant, même s’il y a beaucoup de chances pour que je sois qualifié, il n’y a rien de fait.
En quoi une préparation olympique est-elle différente?
On sent qu’il y a un engouement de la part de tout le monde. Il y a une part d’excitation qui fait que c’est plus agréable, plus convivial d’aller à l’entraînement et d’en prendre plein la gueule au jour le jour, parce qu’on sait pourquoi. On veut être champion olympique. J’ai eu la chance de faire un stage en Australie, on a pu s’entraîner avec un groupe et ce que je retiens de ce déplacement, c’est leur convivialité. Le matin, le soir, ils ont le sourire, ils sont contents d’être là et d’être ensemble. En France, on a tendance à râler pour la moindre chose qui ne va pas. Ça se retrouve dans le sport ou la société de tous les jours. Si on pouvait avoir le truc du voisin, on le prendrait. C’est dommage.
A côté de cela, avez-vous en tête l’idée d’être porte-drapeau à Londres?
Oui, ce serait un honneur immense. Mais ce n’est pas à moi de me mettre en avant. Certains se mettent peut-être en avant pour porter le drapeau. Je ne veux pas dire que s’il est par terre, je ne le ramasserai pas, mais ce serait dommage de ne pas le prendre. C’est une reconnaissance immense pour la France. Maintenant, la configuration de notre compétition fait que c’est délicat. Si la programmation est la même qu’à Pékin, les séries sont le lendemain de la cérémonie. Donc je ne sais pas si je vais y aller, même si on en prend plein les yeux, j’en suis sûr. A Pékin j’avais eu l’amertume de ne pas vivre ça.
Vous êtes donc candidat?
Si on me propose, je réfléchirai. Là, je n’ai pas besoin de réfléchir puisqu’on ne me l’a pas proposé.