Rugby: Marc Lièvremont un sélectionneur sensible et complexe jusqu'au bout
COUPE DU MONDE•Le désormais ex-patron de l'équipe de France évoque dans une dernière conférence de presse son avenir et sa relations avec les Bleus...Alexandre Pedro à Auckland
De notre envoyé spécial en Nouvelle-Zélande,
Il n’était «pas obligé de venir», il est venu quand-même. La moustache attend toujours son bourreau à trois lames et l’humeur est mélancolique comme souvent lors de ce séjour néo-zélandais. Parfois, une larme menace même de tomber le long de son visage. Marc Lièvremont n’a pas été un sélectionneur comme les autres, sa dernière conférence de presse lui ressemble. «Un titre de champion du monde on en fait toute une histoire mais ce n’est jamais que gagner trois matchs de suite», lâche-t-il ainsi comme pour faire oublier la parade en l’honneur des Néo-Zélandais quelques mètres plus bas dans les rues d’Auckland.
«Nous en avons a pris plein la figure pendant quatre ans»
A bientôt 43 ans, Mac Lièvremont est depuis lundi un jeune ex-sélectionneur. Avec un titre de vice-champion du monde sur son CV, les propositions ne vont pas manquer à venir pour celui qui est sous contrat jusqu’à la fin 2011 avec la FFR. Mais avant de décider de la suite de sa carrière, Lièvremont ne rêve que d’une diète médiatique. «Je peux vous assurer que vous n’allez pas m’entendre dans les semaines à venir», annonce-t-il. L’ancien troisième-ligne garde un dernier placage appuyé pour ces médias dont il comprenait de moins en moins les griefs: «Avec mon staff, nous en avons a pris plein la figure pendant quatre ans, à l'image de ces quatre derniers mois ensemble.»
A l’heure du pot de départ, les pros Lièvremont regrettent déjà sa sincérité teintée avec le temps d’un humour désabusé, les antis soulignent les contradictions de ce sélectionneur passé à une pénalité près de devenir champion du monde avec un rugby «Top 14» imposé à lui par ses «sales gosses». Au sujet de cette saillie médiatique il amène la précision suivante: «Il faut que vous sachiez que c’est comme ça que j’appelle mes propres enfants». Sauf que les grands gosses du XV de France lui en ont tenu rigueur toute la semaine précédant la finale avoue-t-il.
«Simplement quinze hommes en colère»
Divorce, autogestion ou rupture, les mots ne manquent pas pour décrire le fossé qui se serait creusé entre l’entraîneur et ses joueurs ces trois dernières semaines. Marc Lièvremont donne sa version de l’histoire. «A chaque fois, on a parlé d'autogestion il y a simplement eu quinze hommes en colère, qui s'étaient pris en mains et responsabilisés, accompagnés par leur staff. Ça a encore été le cas cette fois-ci et j'en suis très heureux pour eux», explique ce partisan de la responsabilisation des joueurs et censé trancher avec le dirigisme des années Laporte. Avec ou contre lui, cette responsabilisation a enfin eu lieu. Elle a même failli mener la France à son premier titre mondial.
Malgré les critiques, les défaites historiques et les incompréhensions, le Catalan n’a jamais regretté d’avoir dit oui à ce poste. «Je ne crois pas être un autre homme aujourd'hui, je pense être resté le même. Etre sélectionneur en équipe de France pendant quatre ans, ce n'est pas un aboutissement. C'était une jolie parenthèse.» Une parenthèse humaine passionnante et complexe à observer. Comme l’est le personnage.