Irlande - France : Les Bleus cèdent leur titre après une formidable publicité pour le rugby
SOMMET•La France a chuté en Irlande ce samedi, lors de la 2e journée du Tournoi des VI Nations (32-19) après 14 victoires d’affiléeNicolas Stival
De notre envoyé spécial à Dublin,
On vous avait vendu un peu pompeusement dans notre article du matin l’affiche la plus excitante de l’histoire du Tournoi des VI Nations. Et bien, au final, notre modestie dût-elle en souffrir, on n’a pas eu complètement tort. Cet Irlande - France a fait vibrer les 52.000 spectateurs de l’Aviva Stadium et des millions de fans de rugby à travers le monde (oui, même ceux qui se sont levés en pleine nuit, en Australie ou en Nouvelle-Zélande). Les Bleus ont perdu (32-19) après trois succès de rang sur les joueurs au trèfle. Ils n’ont même pas ramené un point, alors que les hommes d’Andy Farrell ont pris le bonus offensif. Mais tout n’est pas à jeter dans ce choc qui préfigure peut-être le prochain quart de finale de la Coupe du monde.
Les Bleus ne sont plus invincibles
S’il y avait un endroit où l’on voyait les hommes de Fabien Galthié, 2es mondiaux, mordre la poussière, c’était bien Dublin, antre du roi irlandais de la planète ovale, monté sur le trône à l’issue de sa tournée victorieuse en Nouvelle-Zélande l’été dernier. Et effectivement, les hommes de Fabien Galthié ont chu à l’Aviva Stadium, et connu le goût âcre de la défaite pour la première fois depuis le 17 juillet 2021 en Australie, avec une équipe alors bis, voire ter (33-30).
La série s’arrête à 14 victoires (meilleure performance nationale de l’histoire) et le record absolu de 18 succès, codétenu par la Nouvelle-Zélande et l’Angleterre et que les Bleus ne pouvaient égaler qu’en cas de deuxième Grand Chelem d’affilée, restera une chimère. Peu importe après tout, au risque de choquer… Car ce n’est pas ce samedi 11 février, mais le 28 octobre prochain, jour de finale de Coupe du monde, que Galthié et sa bande ont visé au moment de décocher leur « flèche du temps », début 2020. Et cette fois, la compétition se jouera entièrement à la maison.
Une orgie de jeu
Désolé pour les fans de ping-pong rugby, mais le jeu de « repossession » est de retour, comme annoncé par Fabien Galthié avant le début du Tournoi, et on ne va vraiment pas s’en plaindre. Ce qui n’était pas forcément visible lors du brouillon italien à Rome (24-29) a sauté aux yeux à Dublin, surtout lors d’une première mi-temps d’un niveau rarement vu. Alors oui, il y a eu du jeu au pied, c’était quand même un Irlande - France (et c’est du rugby), mais on a vu quelques actions d’anthologie, à l’image de l’essai de 80 m de Damian Penaud (18e), pourtant mal né avec une passe de Romain Ntamack pour personne dans ses propres 22, ou celui, juste après le renvoi, irlandais de son vis-à-vis, l’ailier irlandais James Lowe (20e).
Ce sont surtout les Bleus qui ont pris un maximum de risques, quitte à parfois se surprendre entre eux (en-avant de Jelonch devant sa ligne, 38e), en ressuscitant un French Flair que l’on croyait mort et enterré, sans fleur ni couronne. Longtemps assagis après avoir été sanctionnés 18 fois à Rome (trois pénalités concédées en première mi-temps avec aussi un carton jaune pour Atonio), ils ont été davantage poussés à la faute ensuite (sept au total, comme leurs adversaires) mais on reste dans le haut standard international.
Impressionnants Irlandais
Il leur manquait un nombre colossal de titulaires en puissance (le centre Henshaw, le demi de mêlée Gibson-Park, le pilier droit Furlong, et le talonneur Sheehan), même si on peut objecter que Villière et Danty, essentiels au succès français l’an dernier à Saint-Denis, faisaient aussi défaut. Leur totem, Johnny Sexton est sorti (encore) blessé en début de deuxième mi-temps, remplacé au pied levé par Ross Byrne, son suppléant également au Leinster.
Mais les coéquipiers du formidable numéro 8 Caelan Doris, élu homme du match, ont malgré tout terrassé leurs rivaux, en dominant globalement la rencontre. Alors certes, ils affichent un pourcentage au plaquage inférieur (80 % contre 92 %), mais ils ont « seulement » plaqué 186 fois, contre 271 fois pour des Bleus souvent acculés devant leur ligne.
Plus réalistes, plus résistants aussi, ils ont plié la partie avec l’essai de Garry Ringrose à 8 minutes de la fin. C’est alors seulement que les chants de leurs supporteurs, pourtant largement supérieurs en nombre, ont submergé les « Allez les Bleus » et les Marseillaises à répétition. Les Irlandais, qui se rendront en Italie le 25 février, veille de France - Ecosse, ont vaincu leur principal obstacle sur la piste d’un quatrième Grand Chelem, après 1948, 2009 et 2018.