Jean-Paul Loth: «On n'impose pas un capitaine que les joueurs ne veulent pas»
TENNIS•Il décrypte les rapports de force entre le capitaine et ses joueurs...Propos recueillis par A.P.
Capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis de 1980 à 1987, Jean Paul Loth connaît les contingences imposées par la fonction. Pour l’ancien consultant télé, les rapports entre le capitaine et ses joueurs dépendent beaucoup du statut de ces derniers.
Êtes-vous d’accord quand on dit qu’un capitaine de Coupe Davis doit être d’abord coopté par les joueurs?
En France, les joueurs ne désignent pas leur capitaine, c’est le DTN qui propose un nom au bureau fédéral, qui l’accepte ou pas. Mais dans les faits, on ne va pas imposer un capitaine que les joueurs ne veulent pas.
A l’étranger, le capitaine est parfois l’homme de confiance du numéro un de l’équipe…
C’est vrai que certaines équipes fonctionnent différemment. Prenez la Suisse. Quand un garçon du calibre de Federer s’entend bien avec quelqu’un (NDLR: Federer n’est pas étranger à la nomination de son confident Séverin Lüthi comme capitaine), vous êtes obligé de nommer cette personne. Comme voulez-vous lutter contre un joueur qui inscrit les points nécessaires à lui tout seul? En France, le rapport de force est différent. Un seul joueur n’a pas le pouvoir de changer un capitaine si ses camarades lui maintiennent sa confiance.
D’ailleurs, Guy Forget a connu des tensions avec Gaël Monfils et Richard Gasquet par le passé et il est toujours en place…
Ce n’est pas Forget qui a eu des problèmes avec les joueurs, ce sont les joueurs qui ont eu des problèmes avec lui. Les garçons doivent se tenir aux règles de fonctionnement de l’équipe de France fixées par le capitaine. Quand Agassi et Sampras ne veulent pas partir en stage en 1991 avant la finale contre la France, le choix du capitaine est vite fait: il ne va pas se passer d’eux pour cinq jours de stage. J’avais instauré ces stages d’avant-match il y a plus de 30 ans et c’est devenu la règle depuis. Mais si demain Tsonga et Monfils sont numéros 1 et 2 mondiaux et qu’ils ne veulent pas venir en stage pendant 15 jours, je vois mal qui va leur dire: «Si c’est comme ça, on va se passer de vous.»