FOOTCoupe du monde: Une deuxième vie pour les stades?

Coupe du monde: Une deuxième vie pour les stades?

FOOTQue faire des enceintes après la compétition?
Romain Scotto, à Johannesbourg

Romain Scotto, à Johannesbourg

De notre envoyé spécial à Johannesbourg (Afrique du sud),

Venant de Sepp Blatter, les compliments ne se refusent pas. Vendredi, le boss de la Fifa a encore vanté la qualité des stades sud-africains. Mais si le pays dispose de dix «joyaux architecturaux», selon les mots du président, la question de l’après-mondial se pose sérieusement pour ce parc d'enceintes ultramodernes. Quelle vie leur donner après la compétition, pour que leur histoire ne se résume pas à un «one shot» sans lendemain? Les projets sont parfois clairement définis dans certaines villes à l’image de Johannesbourg, Le Cap ou Durban. Ils sont en revanche beaucoup plus incertains dans tout le reste du pays.

Avec cinq stades neufs et trois rénovés, l’Afrique du sud dispose aujourd’hui d’une capacité d’accueil et d’organisation incomparable en Afrique. Même en Europe, peu de pays disposent d’infrastructures semblables. A l’avenir, le pays est clairement armé pour accueillir des compétitions de jeunes, sûrement l’une des prochaines Coupe d’Afrique des nations, et pourquoi pas les JO, comme le souhaite déjà Jacob Zuma. Pour l’instant, seule la CAN féminine, qui débute en octobre, figure au programme...

Polokwane, un stade pour quatre matchs?

Autant dire qu’il sera très difficile de remplir tous ces stades pour en faire des produits rentables. Bien avant le début de la Coupe du monde, plusieurs voix ont dénoncé un gaspillage d'1,2 milliards d'euros. Malgré l’engouement qui entoure les Bafana, l’Afrique du sud n’est pas devenu en un mois un grand pays de football. Rien n’indique que les matchs du championnat local attireront le public en masse, même si le prix des places est revu à la baisse. Par ailleurs, la plupart des équipes de rugby ou cricket possèdent déjà leurs stades.

En matière de gestion et d’utilisation, le cas le plus préoccupant est celui de Polokwane. Dans une ville qui ne compte aucun club de haut niveau, il faut croire que le stade Peter Mokaba n’a été construit que pour quatre matchs du Mondial. Dans les semaines à venir, un appel d’offres devrait être lancé pour désigner les futurs exploitants du stade de 46.000 places. A l’année, son entretien devrait coûter près de 200.000 euros, ce qui explique en partie pourquoi la ville du Limpopo, province la plus pauvre du pays, a déjà dû se tourner vers le Trésor public pour payer les factures.

Déménagements

La situation est tout aussi inquiétante à Port-Elizabeth, où le Nelson Mandela Bay pourrait bien rester une coquille vide. La question anime d’ailleurs depuis plusieurs mois les conseils municipaux, selon Christophe Freschi, le directeur de l’Alliance française locale. La ville a trouvé un club résident avec les Mighty Elephants, une équipe de rugby de deuxième division. Mais cela ne suffira sûrement pas à couvrir des frais de fonctionnement abyssaux de ce stade posé sur la ville comme un gros nuage. Du coup, «il devrait plutôt accueillir des concerts et des congrès scientifiques», indique Christophe Freschi.

Dans les grandes villes, le défi semble moins important. L’immense Soccer City de Johannesbourg devrait accueillir les matchs d’envergure des Bafana Bafana, ainsi que ceux des Springboks, qui y affronteront en août la Nouvelle-Zélande. A Durban et au Cap, où existaient déjà de grands stades, l’enjeu sera de convaincre certaines équipes de déménager. Le premier tente de négocier avec le club de rugby des Sharks. Le second est en passe d’attirer l’Ajax Cape Town, l’équipe de foot locale, pour ses grands matchs. «On devrait juste y jouer de temps en temps, confirme Derek Decamps, le défenseur français de l’équipe. Ce serait idiot de jouer dans un stade vide les trois quarts du temps. Mais sur les matchs importants, on peut attirer beaucoup de monde.» Histoire de prolonger de quelques mois l’effet Coupe du monde.