WATER-POLOThomas Vernoux, la star qui change le destin du water-polo français

Water-Polo : « Je veux marquer l’histoire de mon sport », clame Thomas Vernoux, le Mbappé des Bleus

WATER-POLOLe poloïste français Thomas Vernoux a permis à la France de battre les champions du monde en titre, la Hongrie, pour rejoindre les demi-finales du championnat du Monde
Adrien Max

Propos recueillis par Adrien Max

L'essentiel

  • L’Equipe de France de water-polo s’est qualifiée pour les demi-finales en battant les champions du Monde hongrois (11-10) mardi.
  • Thomas Vernoux, considéré comme l’un des meilleurs joueurs de France et peut-être du Monde, se confie sur ce magnifique parcours pour 20 Minutes.

Un ultime but à 2.2 secondes de la fin pour signer un exploit historique. Le poloïste français Thomas Vernoux a été l’un des artisans de la victoire de l’équipe de France de water-polo contre les champions du Monde Hongrois (11-10), mardi en quart de finale. C’est la première fois que la France atteint les demi-finales des championnats du Monde, à quelques mois des JO de Paris 2024. Le Marseillais Thomas Vernoux se confie à 20 Minutes sur cet exploit et ses ambitions, avant d’affronter la Croatie ce jeudi (15h30).

J’imagine qu’il y a beaucoup de joie d’avoir battu la Hongrie, championne du Monde, et de rejoindre pour la première fois les demi-finales ?

Oui, bien sûr. Après c’est un peu spécial parce que la demi-finale est déjà demain [jeudi] et notre objectif est clairement d’aller chercher une médaille. Si ça devait s’arrêter demain on serait forcément déçu, avec un sentiment un peu amer. Donc on doit tout de suite replonger dans le bain, et surtout se servir de cette victoire contre la Hongrie pour gagner et ne surtout pas abandonner. Parce qu’on doit continuer à s’améliorer, et il y a encore beaucoup à faire.

Que représente cette victoire contre les champions du monde ?

C’est une petite page de l’histoire de notre sport qui s’écrit. Battre la Hongrie, ça n’arrive que très rarement, on l’avait déjà fait mais c’était contre une équipe B. C’est surtout la concrétisation d’un ou deux ans durant lesquels énormément de moyens ont été mis en place, et cette victoire est très importante pour notre confiance, la création d’un groupe. Et montrer qu’on est présent.

Justement, qu’est ce qui a été mis en place depuis deux ans ?

L’équipe de France s’est entourée d’un staff énorme et très compétent. On a des personnes pour le côté mental, au moins une personne pour les soins, qui continuent de nous suivre pendant les tournois, sans oublier les coordinateurs. Ça fait un nombre important de personne pour nous épauler, et ces résultats nous font autant plaisir à nous qu’à eux. Ça permet de montrer que ce qu’ils font ce n’est pas du blabla, mais du concret. Ils ont mis énormément de choses en place et ces résultats, c’est grâce à eux. Il y a presque autant de personnes dans le staff, que de joueurs.

Même nous, on ne s’en rend pas forcément compte mais le staff autour de l’équipe de France est l’un des meilleurs du monde. C’est surtout grâce à notre coach, Florian Bruzzo, qui a poussé pour avoir un maximum de choses. Faire des résultats permet de montrer à la fédération que ce n’est pas juste un fou, mais que c’est à lui qu’on doit tout ça. La première chose qu’il a ramenée c’est notre coach adjoint, le croate Vjekoslav Kobescak, un des plus grands noms du water-polo. Même si tout cette réussite, ce n'est pas juste grâce à lui.

C'est aussi grâce à vous et vos buts, au moins un peu ?

Bien sur, au final les acteurs de ce projet ce sont les joueurs et tout ce qui se passe dans l’eau. Il y a beaucoup de lumière sur moi, parce que je marque beaucoup de buts. Mais il ne faut pas oublier l’équipe, si un joueur est mis en lumière c’est grâce à l’équipe. Je n’aurais pas pu faire d’aussi bons matchs si l’équipe avait lâché et qu’elle n’était pas aussi soudée.

Comment en êtes-vous venu au water-polo ?

Quand j’étais petit, vers 6-7 ans, je faisais beaucoup de sports : du judo, du rugby, du tennis. Mais ce n’était que des entraînements légers. Mon oncle faisait du Water-polo, j’ai testé et j’ai assez vite accroché. J’étais à l’aise dans l’eau et les entraînements étaient plus réguliers, quatre ou cinq fois par semaine. J’ai rapidement été assez bon, j’ai fait mes premiers entraînements avec les pros à 13 ans et l’année d’après je jouais en pro en club et en équipe de France. Je pense que ça vient de mes facilités, et j’ai toujours réussi à facilement m’amuser, que ce soit pendant les entraînements ou les matchs. Avec mes capacités physiques, j’arrive à faire des choses spéciales. C’est aussi la raison pour laquelle mes entraîneurs m’ont fait changer de postes, j’ai une capacité à m’adapter aux situations, et un peu à tout faire.

Comment vivez vous le fait qu’on vous compare à Kylian Mbappé ou à Victor Wembanyama ?

Ça me fait énormément plaisir, ce sont de très beaux éloges. Mais je n’y pense pas vraiment, ce n’est pas ce que je cherche, j’essaye d’être moi-même. A leur âge, ce sont quasiment les meilleurs du monde, mais ce n’est pas quelque chose auquel je pense. La comparaison fait parler sur les réseaux, mais ça me passe un peu au-dessus. Ce ne sont pas forcément les personnes que j’admire, pas ce à quoi je tends. J’admire des légendes de leur sport, aussi pour leur attitude. Comme Karabatic qui a tout gagné avec une grande humilité. Quelqu’un de très fort dans son sport, et humble. Ou Teddy Riner, même si c’est un sport individuel, qui gagne depuis tant d’années en restant proche de sa famille et des personnes qu’il aime. Mbappé est quelqu’un de très fort, mais il y a aussi beaucoup de critique sur son comportement. Et je suis de toute façon supporteur de l’OM.

Vous êtes d’ailleurs un gros contingent de Marseillais en équipe de France, qu’est-ce que ça fait ?

Oui on est sept ou huit joueurs à venir de Marseille, dont quatre purement marseillais. Marseille a toujours été un gros club de water-polo en France et en Europe. On est bien représenté, et c’est une fierté d’être plusieurs Marseillais ici. Mais ce qui fait notre force, c’est qu’il n’y a pas de distinction entre ceux qui viennent du nord et du sud, on n’est pas sur cette question-là. Etre avec des personnes du même club, ça facilite les choses en équipe de France, mais le plus important est d’avoir une équipe soudée, une unité dans laquelle on se supporte tous.

A vous entendre citer Karabatic ou Riner, vous semblez avoir beaucoup d’ambitions personnelles. Devenir le meilleur joueur du monde, par exemple ?

Oui. Je ne veux pas être le meilleur joueur du monde sur une compétition, même si celle-ci se passe bien. Parce que ça reste sur un temps T, un sportif qui marque son sport ou change son sport, c’est sur plusieurs années. Ce n’est pas juste sur une question de deux semaines qu’on est le meilleur. Mbappé ou Wembanyama prouvent que ce sont les meilleurs joueurs du monde à leur poste sur les dernières années, mais ils ont encore beaucoup à gagner. C’est encore plus le cas pour moi, qui n’a rien gagné à part le championnat de France et une petite coupe d’Europe, donc je compte aller chercher le titre d’ici quatre jours. Je veux réussir à marquer l’histoire de mon sport et laisser une trace. Pas qu’on m’oublie d’ici un ou deux ans.

Ce beau parcours doit vous donner des idées pour les prochains JO de Paris. Vous serez en capacité de monter sur le podium ?

Tout le monde en rêve, tout le monde veut faire une médaille. Tous les jours, on fait ça pour ça. Les championnats d’Europe et du monde tombent la même année et on veut déjà marquer le coup sur ces compétitions et offrir une médaille à l’équipe de France. Aller chercher une médaille sur chaque compétition, ça permet de montrer avant les Jeux olympiques que le France compte. C’est important pour nous, d’augmenter nos chances, se donner confiance. On verra, mais on y va avec la même mentalité et en plus avec le public pour nous soutenir.