Non, Macron n’a pas souhaité la participation de la Russie aux Jeux olympiques de Paris 2024
FAKE OFF•Lors d'une conférence de presse, ce mercredi, le président du Comité olympique Thomas Bach a cité des propos antérieurs d'Emmanuel Macron, ce qui ne constitue pas une annonce officielleLina Fourneau
L'essentiel
- D’après le ministre ukrainien des affaires étrangères, Dmytro Kuleba, Emmanuel Macron a annoncé que les athlètes d’Ukraine, de Russie et de Biélorussie devraient être traités de la même manière lors des prochains Jeux olympiques organisés à Paris, en 2024.
- D’après des médias russes, ce serait même lui qui influencerait le changement de direction du Comité olympique qui mercredi a annoncé « explorer les moyens » afin de réintégrer les sportifs russes et biélorusses bannis des compétitions internationales depuis le début de la guerre en Ukraine.
- Cependant, Emmanuel Macron n’a jamais publiquement annoncé une quelconque réintégration de ces sportifs.
Le sport est-il politique ? Une question récurrente à l’approche des compétitions internationales, dont Emmanuel Macron s’est refusé tout débat. « Il ne faut pas politiser le sport », répétait le chef de l’Etat au mois de novembre. Pourtant, selon le ministre des affaires étrangères en Ukraine Dmytro Kuleba ce jeudi sur Twitter, Emmanuel Macron aurait annoncé « que les athlètes d’Ukraine, de Russie et de Biélorussie devraient être traités de la même manière ». « Utiliser le sport pour blanchir les crimes de guerre est écœurant », a accusé le ministre ukrainien.
Le ministre cite dans son tweet Thomas Bach, président du Comité international olympique (CIO) ce qui laisserait penser qu’Emmanuel Macron a déclaré ces propos dans le contexte des Jeux olympiques de Paris en 2024. Si l’indignation de Dmytro Kuleba est compréhensible, les mots ont été sortis de leur contexte initial. 20 Minutes est remonté dans le temps pour vous expliquer pourquoi.
FAKE OFF
Le tweet de Dmytro Kuleba a été publié ce jeudi, soit le lendemain d’une commission exécutive du Comité international olympique (CIO). A l’issue de cette rencontre, son président Thomas Bach a annoncé vouloir « explorer les moyens » afin de réintégrer les sportifs russes et biélorusses bannis des compétitions internationales depuis le début de la guerre en Ukraine. Toutefois, aucune échéance ni moyen précis n’a été donné sur cette possible réintégration.
« Il n’y a pas de changement dans notre position. Les sanctions doivent demeurer en place », a-t-il toutefois tempéré. Parmi les sanctions, nous retrouvons par exemple l’interdiction des drapeaux des deux pays et des compétitions sur leur sol en raison de la « violation de la Charte olympique ».
L’intégrité des compétitions en jeu
Depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, le CIO reste prudent sur cette question. Le retrait des sportifs russes et biélorusses avait été décidé afin de ne pas entraver l’intégrité des compétitions, mais aussi pour la sécurité des athlètes.
En juillet dernier, Craig Reedie, membre senior du CIO avait également émis plusieurs directives auprès des organisations dirigeantes demandant de bannir les Russes et Biélorusses des compétitions sportives. « Une décision va devoir être prise sur ce qu’il advient de chacun de ces deux pays, et je suppose que le sentiment général est qu’ils ne devraient pas être qualifiés », avait-il alors déclaré.
Le « caractère fédérateur et conciliateur »
Mais depuis quelques semaines, les organisations semblent légèrement revoir leurs copies. Début décembre, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une nouvelle résolution qui déclarait que les grands événements sportifs internationaux devaient « être organisés dans un esprit de paix », en rappelant le respect nécessaire du « caractère fédérateur et conciliateur » de ces événements.
Lors de cette assemblée, le président de l’Assemblée générale de l’ONU, Csaba Kőrösi a ajouté : « Si nous voulons apporter des changements, transformer le monde, nous devons inclure les sports et les athlètes dans notre travail. Là où la politique et l’idéologie peuvent diviser, forçant l’animosité et la séparation, le sport rassemble les gens dans une compétition pacifique », qualifiant le sport de véritable « socle commun ».
Emmanuel Macron souffle aux oreilles du CIO ?
Mais qu’est-ce que fait Emmanuel Macron dans tout ce baratin ? Il se pourrait bien que l’information ait légèrement été déformée. Nous retrouvons par exemple une information similaire publiée par le média Visegrád 24 sur Twitter, ce jeudi. « Le Comité international olympique a annoncé que le président Macron souhaitait que les Russes et les Biélorusses participent aux Jeux olympiques d’été de 2024 à Paris », tweetait le média est européen… sans plus d’explication. Du côté du média russe Rsport ria, ce serait le président Macron qui aurait influencé le CIO lors d’un sommet du G20 en Indonésie - mentionné d’ailleurs par les Nations unis dans leur compte rendu.
Cependant, Emmanuel Macron n’a jamais véritablement dit qu’il voulait la réintégration des sportifs russes et biélorusses lors des Jeux olympiques 2024. Le chef de l’Etat s’était exprimé sur la question au moment de novembre lors de sa sortie très commentée sur la politisation du sport. Mais à ce moment-là, Emmanuel Macron est interrogé sur la Coupe du Monde qui se déroule actuellement au Qatar et qui provoque de nombreuses controverses quant à son coût humain et climatique. « Je pense qu’il ne faut pas politiser le sport. Ces questions-là, il faut se les poser quand on attribue l’événement », avait-il alors répondu quand des journalistes l’avaient interrogé sur sa potentielle venue au Qatar pour encourager les Bleus.
UNE FAKE NEWS A VERIFIER ? PASSEZ PAR WHATSAPP
Aucune annonce officielle
Et le chef de l’Etat d’enchaîner ensuite sur la compétition organisée en France cette fois : « Je ne sais pas dans quel contexte les Jeux olympiques que nous organiserons en France en 2024 se dérouleront sur le plan géopolitique. Mais ces grands rendez-vous ont vocation à permettre aux athlètes de tous les pays, y compris parfois des pays en guerre, de vivre leur sport. Trouver aussi, à travers le sport, des façons de discuter là où les gens ne peuvent plus se parler, je pense que ça doit être préservé ». Or, les propos du président ont seulement été cités par Thomas Bach lors de son discours et cela ne veut en aucun cas dire que c’est une annonce officielle de sa part.
Les discussions s’ouvriront donc peut-être d'ici là, mais pour le moment impossible d’affirmer une réponse claire du chef de l’Etat sur la future réintégration des sportifs russes et biélorusses.