Enduropale : Comment Milko Potisek s’est « transformé en champion » sur le sable du Touquet
HORS-TERRAIN•Double vainqueur de l’Enduropale en 2018 et 2020, le pilote nordiste de 32 ans visera un troisième sacre, dimanche 27 février (13h30) sur le sable du Touquet, où la famille Potisek a marqué l’histoire de cette course mythiqueFrançois Launay
L'essentiel
- Chaque jeudi, dans sa rubrique « hors-terrain », 20 Minutes explore de nouveaux espaces d’expression du sport, inattendus, insolites, astucieux ou en plein essor.
- Cette semaine nous nous consacrons au pilote nordiste Milko Potisek. Le motard visera un troisième titre dimanche 27 février (13h30) lors de l’Enduropale du Touquet, plus grande course sur sable au monde.
- Tout comme son cousin Timoteï, tragiquement décédé à 25 ans après un accident lors d’un entraînement à moto, Milko Potisek l’a en effet remporté à deux reprises sur l’Enduro, en 2018 et 2020.
Le Lion des Flandres va enfin ressortir de sa tanière, dimanche sur la plage du Touquet (Pas-de-Calais). Double vainqueur de l’Enduropale (2018, 2020) et tenant du titre, Milko Potisek a eu du mal à digérer l’annulation de la célèbre course sur sable l’an passé pour cause de Covid-19. Malgré un nouveau report d’un mois en début d’année, l’Enduro va bien faire son grand retour ce week-end, avec son parcours de 13 km à parcourir le plus de fois possible en trois heures.
Un vrai bonheur pour le pilote nordiste de 32 ans. Originaire de Cassel, Potisek « kiffe le Nord et les Flandres » au point d’avoir dessiné sur son casque un lion, l’emblème des Flandres. « C’est un peu mon identité », résume le champion. Alors forcément, être le seul Nordiste à pouvoir jouer la gagne dans une course aussi mythique représente beaucoup pour le régional de l’étape.
« L’Enduro, c’est la plus grande course sur sable au monde »
« L’Enduro, c’est la plus grande course sur sable au monde. C’est à part, parce que c’est une course qui ramène tout le monde, que ce soit le pur amateur de cross comme le mec qui n’y connaît rien. Ça ouvre aussi beaucoup de portes », reconnaît le tenant du titre.
« On est médiatisés, on passe en direct pendant trois heures à la télé. Ça amène une grosse visibilité à nous mais aussi à nos partenaires. Et puis l’ambiance est énorme, avec 300.000 spectateurs pendant tout le week-end. Les rues du Touquet sont blindées, je me fais encourager du début à la fin sur tout le parcours. L’atmosphère qui règne là-bas est assez hallucinante », s’enthousiasme-t-il.
Une famille marquée par l’Enduropale
Alors dimanche 27 février, quand il s’agira de s’élancer à 13h30 au milieu de 1.000 pilotes pour aller chercher un troisième sacre à 150 km/h de moyenne en ligne droite, Milko Potisek, grand favori à sa propre succession, sera forcément excité. Pourtant, son idylle avec Le Touquet n’a pas été un long fleuve tranquille. Avant de triompher sur le sable, le Nordiste a longtemps cherché sa place au sein d’une famille prestigieuse. Car Milko est un Potisek, un nom qui résonne particulièrement à l’Enduropale.
Entre l’oncle Rudy, trois fois deuxième de la course, le père (également nommé) Milko, les cousins Sergeï, Matteï et Timoteï, ce dernier ayant même été sacré à deux reprises en 2006 et 2009, l’Enduro du Touquet est vraiment une affaire de famille. « On est une très grande famille. Mon grand-père a eu dix enfants. Milko est un de nos nombreux cousins et cousines. On a été élevés comme des chevaux de course. Tout était réglé », raconte son cousin Sergeï Potisek.
« C’est un garçon très sensible qui a longtemps cherché son chemin »
Dès l’âge de 3 ans, Milko monte sur sa première moto. « J’ai toujours voulu en faire mon métier et mes parents m’ont aidé à réaliser ce rêve », raconte le pilote Yamaha. Pourtant le succès ne va pas venir tout de suite. Davantage passionné par le motocross que par la course sur sable, le pilote va longtemps n’en faire qu’à sa tête et ne pas ériger Le Touquet en priorité malgré trois podiums de 2011 à 2013 (deux troisièmes places et une deuxième place).
« C’est un garçon très sensible qui a longtemps cherché son chemin, indique son cousin Sergeï. Par exemple, il voulait se démarquer au lieu de faire les courses sur sable. Je me souviens qu’il était allé participer au Supercross de Lille en 2014 alors qu’il n’était pas prêt. Mais il y était allé parce qu’il était sensible au fait que ça se déroule dans le Nord. Il n’a pas réfléchi et il est allé prendre des risques sur cette course-là, où il s’est blessé sérieusement [fracture tibia-péroné]. »
La mort de son cousin à l’entraînement l’a traumatisé
Un drame va aussi traumatiser Milko. Le 10 novembre 2009, son cousin Timoteï, double vainqueur de l’Enduro et star montante de la discipline décède à 25 ans, après une violente chute quatre jours plus tôt lors d’un entraînement à moto. Tout le clan Potisek est sous le choc et chacun va réagir à sa façon, dans un contexte familial tendu.
« Je l’ai très mal vécu, confie Milko. C’était la première fois que je perdais quelqu’un dans ma famille mais aussi dans le cross, donc ça a été un peu compliqué. Son accident m’a bloqué pendant deux ou trois ans. J’ai eu du mal à gérer la pression autour de moi. Les gens me disaient souvent " Fais-le pour ton cousin ". J’étais encore assez jeune mais maintenant, j’ai réussi à passer au-dessus de ça. »
« Milko avait le muscle de la confiance qui ne fonctionnait pas »
Le déclic remonte à 2017. En rencontrant sa compagne, Milko Potisek quitte à 27 ans le cocon de Cassel pour aller s’installer dans le Valenciennois. Pas trop loin mais un peu à distance de cette pression familiale. « Avant il était influençable, trop sensible et pas forcément bien entouré, estime Sergeï. Il s’est mis avec une nouvelle copine et s’est un peu coupé du monde dans lequel il vivait. Il a réussi à tracer lui-même son chemin tout en aimant les gens qui l’entourent. Avant, Milko avait le muscle de la confiance qui ne fonctionnait pas. Puis il s’est transformé, il a pris confiance en lui. Il a réussi à transformer le petit garçon sensible en champion. » Plus apaisé et moins dispersé, Milko Potisek va progressivement se transformer et se recentrer sur les courses sur sable.
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Et ses deux succès à l’Enduro, en 2018 puis en 2020, vont définitivement le faire entrer dans une autre catégorie. « De tout ce que j’ai fait à moto, mes deux plus belles victoires sont celles remportées à l’Enduropale. C’est la plus grosse consécration que je puisse avoir », savoure un pilote qui rêve désormais de la passe de trois. « Le premier succès, on se demande si c’est de la chance. Le deuxième, on bétonne le dossier. Une troisième victoire, ce serait tout simplement grandiose ». Le nom Potisek pourrait bien rester encore gravé sur le sable du Touquet une année supplémentaire.