ELECTIONSTrois candidats et une campagne hachée pour prendre la Fédé de handball

Handball : « L’image véhiculée par notre Fédération est dérangeante », des élections à fleurets mouchetés pour oublier une sale année 2020

ELECTIONSBana, Girault, Feuillan, ils sont trois candidats à pouvoir succéder au président actuel Joël Desplanques
Julien Laloye

Julien Laloye

L'essentiel

  • La Fédération française de handball va élire un nouveau président ce week-end.
  • La campagne a été heurtée entre les trois candidats.

La démocratie ne s’apprend pas en cinq minutes quand on a l’habitude des règnes sans partage, alors il faut féliciter la fédération française de hand de s’y essayer quand même. Pour la première fois depuis toujours, enfin depuis 2004, année de la seule exception, l’élection du président de la Fédération ne se décide pas en petit comité, après que tout le monde a accordé ses violons, selon la volonté des deux ou trois types qui comptent au comité directeur.

Non pas que cette volonté de transparence se soit manifestée comme une éruption incontrôlable. Joël Delplanque, qui ne souhaitait pas briguer de troisième mandat, entendait passer le témoin à Jacky Buttenfeld pour une succession dans la continuité, comme on dit. Mais ce dernier a dû décliner pour raison médicale, et son retrait a révélé des vocations. Pas n’importe lesquelles, en passant, et c’est autant la personnalité des candidats que la situation de crise inédite que traverse la fédé de hand qui rendent ce scrutin palpitant.

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La gestion des Bleus au cœur des divergences

On parle évidemment de la carambouille qui a suivi cet Euro 2020 raté dans les grandes largeurs par la vitrine de la Fédé, à savoir l’équipe de France masculine. Un entraîneur au palmarès XXL du temps des Experts, Didier Dinart, viré comme un malpropre après un débriefing aux allures de cour martiale. En première ligne à l’époque ? Le DTN Philippe Bana, aujourd’hui candidat, qui concentre les coups de ses deux adversaires, Jean-Pierre Feuillan, l’actuel vice président chargé du marketing, et Olivier Girault, capitaine des champions olympiques à Pékin, en 2008. Le premier lui reproche « son fonctionnement clanique dans sa manière de manager, basée sur l’approximation et sur le mensonge ». Il met d’ailleurs en partie sur le dos de Bana l’embrouillamini de la gestion du cas Dinart. « La crise de l’équipe de France a été gérée par trois hommes, le président, le vice-président et le DTN. Jamais je n’ai été consulté là-dessus ».

Si l’équipe Feuillan promet de laisser Guillaume Gilles faire ses preuves, malgré la présence sur sa liste de l'entraîneur de Montpellier Philippe Canayer, qui n’a jamais caché sa volonté de prendre un jour les Bleus, celle d’Olivier Girault entend mettre les pieds dans le plat avant même les championnats du monde de janvier (s’ils se tiennent), et surtout le TQO de Montpellier, qui décidera du destin olympique des Bleus, toujours finalistes depuis 2008. Certains soupçonnent même Girault d’avoir téléguidé la fameuse affaire de la dédicace de Claude Onesta à Didier Dinart dans le but d’embarrasser un peu plus la Fédération. Les deux hommes sont proches, mais Dinart ne l’a jamais soutenu publiquement.

« C’est la compétence qui doit guider n’importe quelle structure quelle qu’elle soit, avance Arnaud Gandais, ancien entraîneur du Issy Paris Hand et proche de Girault. Ce côté patronage un peu à l’ancienne, avec un mode de décision très fermé, a fait son temps ».

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Rapprochement avorté entre Feuillan et Girault

L’ancien consultant radio a débarqué dans l’arène comme un chien dans un jeu de quille, mais personne ne sous-estime sa capacité à rassembler, deux ans après sa prise de la Ligue nationale de handball à la hussarde. « Olivier a pour lui d’être un vrai capitaine, quelqu’un qui vous fait grimper au rideau et qui sait mettre en valeur chaque individu, poursuit Gandais. Or ce sont souvent les capitaines qui font gagner les équipes ». L’équipe de Feuillan a d’ailleurs tenté un rapprochement public, sur l’air de « Viens apprendre le métier avec nous, et on te laisse la place la fois d’après », mais l’ancien Expert a vu l’ouverture, et le procès du manque d’expérience l’a même renforcé dans sa conviction.

Girault n’a pourtant pas été le plus agressif lors du débat qui a opposé les trois hommes à la maison du handball vendredi 20 novembre, à une semaine du scrutin. S’il a sorti la meilleure punchline de la soirée sur la faiblesse des droits TV de la discipline (« Du Dom Pérignon dans une bouteille en plastique »), il a tenté, posture classique, de renvoyer ses deux adversaires dos à dos, puisque eux ont un passé à la Fédé, ou un passif, c’est selon. C’est Jean-Marc Feuillan, qui nous expliquait récemment « être pratiquement certain de gagner les élections », qui s’est chargé « d’allumer » Bana, la plupart du temps. Trop éloigné de la base, plus intéressé par ce qui brille que par les petits clubs, pyromane dans la gestion du dossier Dinart, le DTN tout puissant du handball français, qui a quitté son poste pour pouvoir se présenter, pensait sans doute vivre une campagne plus tranquille, à défaut d’être triomphale.

Bana attaqué sur tous les fronts

Voilà 20 ans qu’il est le visage médiatique des succès des équipes nationales, en marge des sélectionneurs, mais aussi l’interlocuteur préféré des ministères, et la voix française qui porte à la fédération internationale. Sans doute Bana a t-il-dû estimer que cela suffirait à emporter l’adhésion des présidents de Ligue et de comité, invités à se prononcer par vote électronique. Cela sera peut-être le cas, d’ailleurs, tant les pronostics sont impossibles à établir dans ce type de triangulaire, mais les critiques d’une concurrence liguée contre lui ont surpris certains de ses soutiens, dont Jérôme Fernandez.

« Ce qui transpire, c’est une tactique élaborée contre Philippe Bana, alors que chaque candidat défend des idées tout à fait louables qui peuvent représenter de bonnes solutions. C’est facile de reprocher des choses à Philippe en tant que DTN, mais lui aurait pu aussi reprocher le bilan marketing de Jean-Pierre Feuillan, ou le bilan d’Olivier Girault à la LNH ».

Olivier Girault (au premier plan) avec Jackson Richardson.
Olivier Girault (au premier plan) avec Jackson Richardson. - Coudert/Sportsvision/SIPA

Ce dernier est accusé, en substance, de n’avoir pas réussi à valoriser le championnat de France comme il l’avait promis à son arrivée à la tête de la Ligue, alors que Jean-Pierre Feuillan peut se voir reproché de ne pas avoir assez développé les revenus de la Fédération quand les médailles d’or rentraient par camion. Sur le fond, pourtant, les trois hommes sont un peu près raccord sur tout. Le retour aux sources du handball amateur, « ces clubs abandonnés au profit de la vitrine équipe de France », un plan de soutien financier pour aider à la reprise, la recherche d’une solution durable à la rentabilité de la toute nouvelle maison du handball, qui fait perdre à la Fédé 1 million d’euros par an, et la modernisation des principes de gouvernance qui sentent parfois la naphtaline.

Une issue incertaine

Le gagnant saura-t-il apaiser les petites rancœurs qui se sont accumulées ces derniers mois ? Si chaque candidat promet plus ou moins « qu’il ne privera pas le handball français des hommes ou des femmes compétents qui ont envie de les servir (Jean-Marc Feuillan), Jérôme Fernandez craint que cette campagne ne laisse des traces : « Entre les élections et l’épisode de la dédicace entre Claude et Didier, l’image véhiculée par le handball français me dérange un peu. Ça fait longtemps que je n’avais pas senti autant d’animosité entre handballeurs. Peut-être que c’est le fait que les équipes de France réussissaient qui camouflait les états d’âme des uns et des autres, mai j’espère que tout le monde saura faire la part des choses et se rassembler après les résultats ». Réponse samedi en début d’après-midi.