Lens-FC Nantes : « Il y avait un esprit lensois et nantais », Stéphane Ziani compare les titres de 1998 et 2001
INTERVIEW•Entretien vintage avec Stéphane Ziani, ancien milieu de terrain du RC Lens et du FC Nantes, actuellement coach des U19 nantaisDavid Phelippeau
L'essentiel
- Ce mercredi soir (19 heures), le FC Nantes se déplace à Lens en match en retard de Ligue 1.
- L’occasion de se rappeler aux bons souvenirs des deux derniers titres de champion de France des deux clubs avec Stéphane Ziani.
- L’ancien milieu de terrain s’est pris au jeu des comparaisons des titres de 1998 et 2001.
Il voit beaucoup de « similitudes » entre les deux expériences. L’entraîneur des U19 du FCN Stéphane Ziani a évolué, brièvement, à Lens (1997-1998) et, très longtemps à Nantes (1991-1994 et 2000-2004), deux clubs qui s’affrontent ce mercredi soir (19 heures) à Bollaert. L’ancien milieu de terrain de poche a ainsi participé au dernier titre de champion de France des deux clubs historiques du foot français.
Pour 20 Minutes, Stéphane Ziani ouvre la boîte à souvenirs.
Titre de Lens de 1998 ou titre du FCN de 2001 ?
Les deux car c’est tellement rare d’avoir des titres. J’ai joué dans deux équipes estampillées « club ». Il y avait un esprit lensois et un, nantais. Une culture du travail avec un effectif de bosseurs, de coureurs. Deux entraîneurs formateurs. On a vécu un peu les mêmes saisons. On était outsider à chaque fois. On a construit notre saison avec les planètes qui s’alignent, les joueurs qui se révèlent, le brin de réussite. Deux groupes qui avaient vécu l’année d’avant une saison compliquée [le FCN maintenu au Havre lors de la dernière journée et Lens 13e de L1 un an avant], qui ont appris de ça et qui ne voulaient pas le revivre.
Jeu à la lensoise de 1998 ou jeu à la nantaise de 2001 ?
Les deux. Deux styles différents. En 2001, des petits gabarits, un manque de vitesse et de puissance donc un football de passes. En 1998, de la puissance, plus de courses sur des attaques rapides. A Lens, je jouais plus haut avec beaucoup de libertés car derrière moi, j’avais deux monstres : Dehu et Foé. A Nantes, je jouais plus sur le côté ou dans le cœur du jeu.
Daniel Leclercq ou Raynald Denoueix ?
Les deux. Deux styles différents avec la même philosophie de formateur. Daniel Leclercq, ça a été une belle rencontre avec une seule année de vécu, ça a matché tout de suite. Daniel pouvait partir dans des colères noires. Il avait une stature, un regard glacial. Il pouvait péter les plombs. On s’adorait, mais il y en a eu des étincelles. Il aimait quand ça fritait. Et à côté de ça, il pouvait te prendre dans ses bras et te faire une déclaration d’amour. Raynald Denoueix, c’est la personne qui m’a formé et m’a accompagné tout au long de mon adolescence. Je ne l’ai jamais vu en colère. En tête à tête, avec lui, tu comprenais le sens des mots. Raynald, tu n’avais tellement pas envie de le décevoir. C’était plus posé, moins passionnel.
Bollaert ou la Beaujoire ?
Les deux. Je suis Nantais, la Beaujoire, c’est notre temple. Mais, Bollaert, un stade plus à l’anglaise, c’est fantastique aussi avec des gens formidables. Quand tu es joueur à Bollaert et que tu gagnes un titre, c’est exceptionnel.
Public Sang et Or ou public Jaune et Vert ?
Petit avantage au public lensois à l’époque. Le public à Nantes a évolué. A l’époque du titre de 2001, il y avait moins de monde, moins de ferveur peut-être, mais un public plus exigeant en termes de jeu. Aujourd’hui, la nouvelle génération de fans a su développer une ambiance magnifique. A Lens, en 1998, il y avait plus de monde au stade, je pense. L’enceinte était tout le temps pleine. On avait toute une région derrière nous dans le Nord. On est champion à Auxerre, on arrive à Lille, l’aéroport est plein à craquer. Les supporteurs nous suivent sur la route jusqu’au stade. Et à Bollaert, il y a 30.000 personnes à 3 heures du matin qui t’attendent. C’était aussi un premier titre à Lens… alors que Nantes en avait déjà eu.
Gervais Martel ou Kleber Bobin ?
C’est difficile. Kleber Bobin est le plus titré des présidents, humainement extraordinaire, mais un peu là par hasard. Gervais Martel est indissociable du RC Lens. Je pense qu’aujourd’hui, les gens pensent qu’il est toujours président. C’était son club. Martel faisait tout. Martel, c’est le RC Lens et le RC Lens c’est Martel. Il vivait avec l’équipe, il était sur le banc. On était ses enfants. Il pouvait être con, c’était la famille. Quand je suis arrivé, il m’a reçu dans une pièce et m’a dit : «Je te laisse une feuille blanche et tu mets le montant du salaire que tu veux !» Et il s’est barré… Je m’étais dit qu’il était sacrément culotté ! J’avais d’autres propositions, il voulait me montrer qu’il me voulait à tout prix.
Anto Drobnjak ou Viorel Moldovan ?
Les deux. Le Roumain et le Monténégrin étaient des tueurs devant. Très sensibles tous les deux, mais les défenseurs passaient un sale quart d’heure avec eux. Ils ne pensaient qu’au but. Il ne fallait pas leur parler de passements de jambes, eux, ils voulaient marquer. De la pointe du pied, du genou… ils s’en foutaient. Ils avaient une forte personnalité.
Jean-Guy Wallemme ou Mickaël Landreau ?
Les deux étaient capitaines. D’une courte tête, plutôt Wallemme car il était le garant de l’état d’esprit. Micka était plus important en tant que joueur car c’était un très bon gardien de but. Il avait beaucoup d’ambition, mais exemplaire dans son comportement. On sentait que Micka allait partir et que le club allait devenir trop petit pour lui. Jean-Guy, c’était le grand frère qui était en fin de carrière, le patron incontesté.
Les Corons ou l’hymne à la Beaujoire ?
Alors, moi, je suis un nostalgique de : «Allez, allez, Les Canaris, ce sont les rois de la prairie…» (Il chante) Les Corons, quand ils se mettent à chanter, c’est quelque chose. Cela va au-delà du foot et c’est puissant…
Frites ou fruits de mer ?
Les deux. Moules frites alors. Ce sont deux endroits où il fait bon vivre en tout cas. Nous, on a quand même une belle région avec un climat plutôt sympa et la mer à proximité. Les gens dans le Nord sont extraordinaires. C’est Bienvenue chez les Ch'tis ! Ce film dit tout. Quand je quitte Lens au bout d’un an pour aller à La Corogne, ça a été dur. On était sur un nuage car on aurait même pu faire le triplé [avec une demi-finale perdue de Coupe de la Ligue et une finale perdue de Coupe de France].
Bière ou muscadet ?
Je ne bois pas d’alcool. (Rires)