OM : « Pas sûr qu’une tentative de rachat aussi sulfureuse soit bonne pour la réputation du club », juge l’économiste Lionel Maltese
INTERVIEW•L'économiste Lionel Maltese juge « surprenante » la stratégie de médiatisation à outrance adoptée par Mohamed Ayachi Ajroudi et Mourad Boudjellal. Les deux hommes tentent de racheter l’OM depuis plus d’un moisPropos recueillis par Jean Saint-Marc
L'essentiel
- Le feuilleton autour de la tentative de rachat de l’OM par Mohamed Ayachi Ajroudi doit prendre fin cette semaine.
- L’économiste du sport marseillais Lionel Maltese analyse cet essai qui va sans doute se révéler infructueux.
- Pour lui, Mohamed Ayachi Ajroudi et Mourad Boudjellal ont « tenté le tout pour le tout. »
La messe est-elle dite ? Ces derniers jours, l’entourage de Mohamed Ayachi Ajroudi se disait plutôt « pessimiste. » La tentative de rachat de l’OM risque d’échouer. L’homme d’affaires franco-tunisien, qui est accompagné par Mourad Boudjellal dans cette aventure, a lancé un ultimatum la semaine dernière : Frank McCourt a jusqu’à mercredi soir pour répondre à la « dernière offre ferme » présentée par les conseillers de Mohamed Ayachi Ajroudi.
Pour l’économiste du sport Lionel Maltese, ce projet de rachat a peu de chance d’aboutir… Mais avec l’OM, « tout est possible », sourit le maître de conférences à l’université Aix-Marseille et professeur associé à Kedge.
Quel regard portez-vous sur la polémique autour du rachat de l’OM ?
J’ai trouvé cela surprenant. Mourad Boudjellal a beaucoup parlé dans la presse de ce qui aurait dû être une négociation privée. C’est maladroit de sa part. Il s’est mis en danger par rapport aux supporteurs.
Il n’y a pas de projet clair et précis, cela manque de sens. D’ailleurs, si ça avait été le cas, les avocats se seraient directement parlé entre eux. Je ne suis pas sûr qu’une tentative de rachat aussi sulfureuse soit bonne pour la réputation de l’OM. Marseille a besoin de projets concrets et de résultats !
Leur tentative était-elle désespérée ?
Ils ont tenté le tout pour le tout. Il y a un précédent dans l’histoire de l’OM : Jack Kachkar qui a même fait un tour d’honneur au stade Vélodrome (en 2007). Je suis assez surpris que Mourad Boudjellal, qui a été un excellent dirigeant au RC Toulon et un excellent entrepreneur dans la BD, soit dans un projet pareil.
Quand on voit qu’ils ont donné des noms comme Bernard Tapie, José Anigo, Zinédine Zidane… C’était un peu de l’affabulation. L’irrationalité autour de l’OM a tourné au désavantage de Mourad Boudjellal et de Mohamed Ayachi Ajroudi.
Traditionnellement, les rachats de club se font dans la discrétion…
Au moment du rachat du PSG, Jean-Claude Blanc n’a pas parlé. Frank McCourt et Jacques-Henri Eyraud étaient très discrets au moment de la reprise de l’OM. A Nice, tout s’est passé en coulisses aussi. Même chose quand des actionnaires chinois sont entrés au capital de l’OL. Le rachat de Bordeaux par King Street et GACP a été un peu plus mouvementé, mais c’est le seul exemple que je vois.
L’OM a crié à la tentative de déstabilisation. Les potentiels repreneurs voulaient-ils faire baisser la valeur du club en s’exprimant autant dans les médias ?
C’est possible. On sait par le fair-play financier qu’il y a un déséquilibre entre les produits et les charges de l’OM. Clairement, la masse salariale est une faiblesse pour le club qui arrive en Ligue des champions. Ils ont pris cet angle d’attaque : dire que l’on arrive avec de l’argent pour remettre le club à flot, c’est crédible. Mais parler de Zidane ou d’Anigo, ce n’est pas cohérent par rapport au marché et à la période.
Vous n’avez jamais cru à cette tentative de rachat ?
Quand on me parle de Zidane, j’ai du mal à y croire (sourire). Mais tout est possible avec l’OM. Quand Robert-Louis Dreyfus a racheté en 1996, le groupe IMG McCormack, soutenu par Nike, était favori. Et Jean-Claude Gaudin a finalement choisi Robert Louis-Dreyfus qui venait de racheter Adidas. C’est la preuve que tout est possible.