D’un point de vue calendrier, est-ce jouable une Ligue 1 à 22 ?

Ligue 1 : D’un point de vue calendrier, est-ce jouable un championnat à 22 ?

FOOTBALLSpoiler : c’est compliqué de faire rentrer autant de matchs en une saison
Bertrand Volpilhac

B.V.

Et bon courage à la personne en charge des « pdf » à la LFP. Alors que la Ligue semblait avoir à peu près calé dans les grandes lignes sa saison post-coronavirus, le Conseil d’Etat vient de tout foutre en l’air en lui demandant de voir la faisabilité d’une L1 à 22 clubs, dans un scénario où Amiens et Toulouse échappent pour l’instant à la relégation. « On nous demande de réexaminer cette décision, on va la réexaminer, mais cela ne veut pas dire forcément qu’on va jouer à 22, a expliqué le DG de la Ligue Didier Quillot mardi soir sur RMC. On va essayer de tout faire en bon ordre. D’abord, le format, les participants aux compétitions puis le calendrier définitif de la saison 2020-21. » Pour l’aider un peu, ainsi que le commis aux pdf – auquel, vraiment, on apporte tout notre soutien – 20 Minutes a tenté de voir si on pouvait jouer à 22.

Le préambule

Début de saison : Si, dans le calendrier originel de la saison 2020-21, la première journée de Ligue 1 avait lieu le samedi 8 août, la crise sanitaire a poussé la LFP à fixer une reprise pour le 23 du même mois. Ce que Didier Quillot a confirmé mardi soir « notre objectif n’a pas changé, il reste de démarrer la saison 2020-2021 le week-end du 22-23 août ». En plus d’ajouter quatre matchs à son calendrier, la Ligue 1 perd ainsi trois semaines de compétition supplémentaires.

Fin de saison : En raison de la présence de l’Euro, qui débute le 11 juin, la date de fin de saison est non-négociable. La dernière journée de Ligue 1 doit avoir lieu le 23 mai pour permettre à l’équipe de France d’avoir le temps de se préparer. On part aussi du postulat que les barrages Ligue 1/Ligue 2 devront de toute façon être annulés et que le système de relégation promotion sera bien différent l’an prochain (4 relégués pour 2 promus ?).

Les « plages » de matchs disponibles

Si la saison débute le 23 août et se termine le 23 mai, il y aura donc très exactement 78 plages de matchs disponibles, au rythme de deux par semaine. Pour combien de matchs ? Voici le calcul :

  • 42 journées de Ligue 1
  • 5 plages Coupe de France
  • 4 plages internationales, qui durent 10 jours à chaque fois (et couvrent donc trois plages de matchs) dont on peut difficilement se passer une année d’Euro = 12 plages de matchs
  • 3 plages pour la trêve de décembre
  • 14 plages de matchs européens (6 matchs de poules, 8 matchs de phases de poule, la finale étant programmée pour le 30 mai)

Soit un total de 76 « plages matchs » remplies sur les 78 mathématiquement disponibles.

Le calendrier 2020/21 avant la crise du Coronavirus
Le calendrier 2020/21 avant la crise du Coronavirus - Capture d'écran LFP

Les constats

Dit comme ça, le calendrier paraît donc mathématiquement jouable. Dans les faits, ça ne l’est pas. D’abord parce qu’il ne faut pas avoir un doctorat en physique quantique pour comprendre que faire jouer tous les trois jours pendant huit mois n’est pas un rythme humainement tenable. Il faudra s’attendre une hécatombe de blessures, à des internationaux qui arrivent sur les rotules à l’Euro, à des clubs français sans jus en Coupe d’Europe.

A titre de comparaison, il y avait dans le calendrier initial neuf semaines prévues sans match les mardis/mercredis, permettant aux clubs de faire souffler les joueurs. Il n’y en aurait, de facto, plus que deux avec une Ligue 1 à 22. En clair, il faudrait jouer samedi-mercredi-samedi du 23 août jusqu’au 23 mai. Intenable, et « susceptible de faire courir un risque pour la santé et l’intégrité physique des joueurs en leur imposant un calendrier d’une cadence inédite », expliquait déjà le Comité exécutif de la FFF fin mai.

Ensuite parce qu’un tel calendrier ne laisse quasiment aucune marge de manœuvre à « l’imprévu ». Que faire si un match ou une journée est reporté en raison d’intempéries ? Que faire si le PSG (ou Lyon, soyons fous) remporte la Ligue des champions et doit se farcir la Coupe du monde des clubs ? Un calendrier, aussi chargé soit-il, a besoin de respirations pour pouvoir parer ces éventualités.

Enfin, et ce n’est pas le point le moins important : que va dire Mediapro, qui a dépensé une fortune pour les droits télés de la Ligue 1, si la moitié des journées de son nouveau joyau sont en semaines, où l’audience est plus faible ?

Les solutions

Elles ne sont pas nombreuses, et on peut déjà remercier la Coupe de la Ligue de ne plus exister, libérant quelques plages dans le calendrier en début d’année civile 2021. Mais voici quelques idées pour espérer pouvoir y arriver.

  • Démarrer la saison plus tôt : c’était déjà dans les plans avec le report à la fin du mois de juillet ou au début du mois des finales de Coupe non jouées de cette fin de saison. Plutôt que de reprendre le 23, pourquoi ne pas commencer le 9 août, comme le calendrier originel le prévoyait ? Si la situation sanitaire le permet, ce serait la solution la plus simple pour libérer quelques dates.
  • Raccourcir les dates internationales : une hypothèse loin d’être évidente et plutôt bancale, car les dates internationales sont décidées par la Fifa. Le football français pourrait s’arranger pour jouer les deux matchs prévus par plage en un temps plus court pour libérer la troisième, mais pour le bien de l’équipe de France et du football, ce n’est pas vraiment souhaitable de raccourcir les rassemblements à Clairefontaine. Et techniquement très compliqué.
  • Abandonner la trêve hivernale : Et si on allait vers un boxing day à la française ? Ce serait un autre moyen de jouer potentiellement trois matchs à des dates pour l’instant blanches. Le problème dans ce scénario est encore la santé des joueurs. Dans un calendrier déjà surchargé, est-ce bien raisonnable de supprimer les deux seules semaines de repos de nos joueurs ? A la différence des clubs anglais, rares sont les clubs français qui ont l’effectif pour se permettre de faire tourner leurs joueurs d’une journée sur l’autre.
  • Miser sur des éliminations précoces en Coupe d’Europe : C’est la moins patriotique des solutions, mais si jamais il n’y a plus aucun club français à partir, disons, des quarts de finale de Coupe d’Europe, voilà qui libère immédiatement quatre dates dans le calendrier. Le problème, c’est qu’il est difficile de dessiner un calendrier en espérant l’échec de notre football. D’autant que les performances de Lyon et du PSG cette année prouvent bien que des quarts sont tout à fait à portée.

Et au final ? Aucune solution miracle, à part peut-être faire un mix de toutes ces dernières. Gagner quelques journées en démarrant la saison plus tôt en août, raccourcir d’une semaine les vacances, gratter sur une éventuelle date internationale (celle de septembre est sans doute la moins importante dans le contexte actuel) et imaginer qu’on puisse jouer en France sur les demi-finales de Coupe d’Europe. Allez, bon courage à la LFP. Et à la personne derrière les pdf.