Tour de La Provence : « La page est tournée »… Comment Thibaut Pinot et la FDJ ont préparé la saison d’après
CYCLISME•Le grimpeur français, qui a lancé sa saison ce jeudi en Provence, n’avait plus couru depuis son abandon crève-cœur lors du dernier Tour de France, en juilletNicolas Camus et Jean Saint-Marc
L'essentiel
- Thibaut Pinot a recouru ce jeudi sur les routes de Provence pour la première fois depuis son abandon lors du Tour de France, en juillet dernier.
- Le coureur est désormais remis de cette grande déception, et se tourne désormais vers la prochaine édition.
- Si sa préparation foncière a été la même que l’an dernier, l’approche des courses ne sera pas tout à fait la même à la Groupama-FDJ.
Six mois, 18 jours et quelques heures. Comme des amoureux transis quittés comme ça, sans prévenir, on se souvient très exactement du jour où l’on a vu Thibaut Pinot sur un vélo pour la dernière fois. C’était le 26 juillet dernier, après seulement quelques kilomètres dans la côte menant vers Aussois, lors de la 19e étape du Tour entre Saint-Jean-de-Maurienne et le Col de l’Iseran.
Le leader de la Groupama-FDJ, terrassé par une lésion musculaire à la cuisse, était contraint à l’abandon alors qu’il avait les jambes pour l’emporter sur les Champs deux jours plus tard. En larmes, et la France avec lui.
« On repart de zéro »
Le Franc-Comtois, encore plus que nous tous, évidemment, a eu du mal à s’en remettre. Mais après une coupure plus longue qu’à l’accoutumée, ça y est, il a réattaqué jeudi à l’occasion de la première étape du Tour de La Provence. « La page est tournée. Complètement. On passe à autre chose, c’est une nouvelle saison, on repart de zéro », assurait-il, souriant, la veille du départ.
On n’avait pas de doute là-dessus. Surtout que le tracé – très montagneux – du Tour de France 2020, dévoilé en octobre, a donné à toute l’équipe FDJ une très bonne raison de regarder devant. Mais comment s’y prendre, avec toutes ces blessures ou maladies qui ont plombé le coureur pile quand il ne fallait pas ces dernières années ? Pour espérer aller au bout en juillet prochain, est-ce qu’il ne faut pas, quand même, jeter un petit coup d’œil dans le rétro pour ajuster certaines choses dans la préparation ?
Marc Madiot n’a pas très envie de s’éterniser sur le sujet. « On n’est pas dans la peur de la blessure. C’est vous qui êtes dans le stress, je trouve. On dirait les journalistes football avec le PSG. Heureusement qu’on n’est pas dans le même état d’esprit que vous pouvez l’être parfois », répond le patron de l’équipe, volontiers taquin. Plus sérieux, il enchaîne : « Les difficultés font partie de la vie d’un coureur cycliste. On a du mal à les surmonter parfois, mais on passe à l’étape suivante quand même. On n’est plus dans la réflexion sur la blessure du passé. »
On comprend l’idée. Ressasser les moments de lose, c’est juste bon à se tirer une balle dans le pied. La réalité est un poil plus nuancée, quand même. Le staff a étudié les événements du dernier Tour sous tous les angles pour comprendre ce qu’il s’est passé. Jacky Maillot, le médecin de l’équipe :
« On a essayé d’identifier les facteurs favorisants [la blessure], même s’il n’y a pas de cause très évidente. C’est un ensemble de petites choses. Il est évident qu’on va en tenir compte cette année et adopter des mesures préventives. » »
Le détail appartient au secret de l’équipe, mais l’approche des courses ne sera pas tout à fait la même à la FDJ. En attendant, Thibaut Pinot n’a rien changé à sa préparation d’avant-saison. Comme l’an dernier, il est parti en janvier pour un stage sur le volcan Teide, à Tenerife, avec quatre coéquipiers. Dix-huit jours à plus de 2000 mètres d’altitude, rien de tel pour se faire la caisse. « Les conditions étaient super, dit-il. Il a fait beau et chaud, c’est ce que je recherchais. Ça m’a permis d’aller chercher ce qui me manquait en termes de sensations après cette coupure plus longue que d’habitude. Je suis confiant sur ma préparation. »
Un programme de rentrée 100 % français
Des propos qui ne sont pas anodins. A 29 ans, le grimpeur français se connaît mieux que jamais. « Les coureurs ont toujours une perception très fine de leurs sensations. Thibaut, c’est encore autre chose. En se levant le matin, il sait s’il est dans une bonne journée, explique Jacky Maillot. Il sait exactement quel type d’entraînement et de charge de travail il lui faut pour arriver au top sur ses objectifs. »
Selon le doc, les indicateurs sont bons. Pinot est dans ses temps de passage de la saison dernière. Ne reste plus qu’à voir ce que donne la vraie nouveauté de cette année : un programme de rentrée 100 % français, avec le Tour des Alpes-Maritimes et du Var et Paris-Nice dans la foulée de cette mise en jambes provençale. « C’est une volonté de changement de sa part, et puis aussi du staff, précise Marc Madiot. Ce n’est pas inintéressant de changer. C’est motivant, excitant. »
Et parfait pour la récupération ? « Si on évite les kilomètres et les déplacements, c’est d’autant plus facile, oui », répond Maillot. L’intéressé a un dernier argument à faire valoir : le public. Dans les interviews qu’il avait données cet hiver, il disait que le dernier Tour de France lui avait servi à « ne plus avoir peur » de la pression et des attentes. « C’est aussi pour ça que je fais pas mal de courses en France, reconnaît-il. Pour retrouver ces émotions. » Nous aussi on est prêts, Thibaut.