TENNISDaniil Medvedev est-il le nouveau bad boy du circuit ?

US Open : « Il faut en avoir pour se comporter comme ça », Daniil Medvedev est-il le nouveau bad boy du circuit ?

TENNISEn lice pour une place en finale à New York, le Russe a mis le feu dans son attitude et dans ses déclarations depuis dix jours
Julien Laloye

Julien Laloye

Adoubé par le maître. Nick Kyrgios n’a pas fait de vieux os à New York, sorti par la porte de derrière en première semaine. Mais il a quand même fait parler de lui en changeant brièvement sa photo de profil Instagram pour rendre hommage à son plus bel héritier, Daniil Medvedev. Evacuons rapidement le sportif : le meilleur joueur de l’été (19 victoires en deux mois sur le sol US, 5e place mondiale), opposé à Dimitrov en demi-finale, ne fait rêver personne sur le terrain, et on attend encore de voir comment ça tournera quand la confiance aura pris l’avion pour un all inclusive à Punta Cana. Mais alors quelle révélation au niveau du carafon.

Le phénomène est parti d’un emportement non contrôlé au troisième tour contre Lopez. Un innocent ramasseur de balle qui lui amène gentiment une serviette après un point perdu, et Medvedev qui lui arrache des mains violemment parce qu’il n’avait rien demandé. Avertissement dans la foulée, jet de raquette intempestif vers l’arbitre pour monter sa désapprobation, petit doigt d’honneur en cachette, et le public américain qui se monte le bourrichon contre lui.

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« J'ai gagné grâce à vous »

Hué comme un élu démocrate à un meeting de Trump tout du long, le Russe ne se démonte pas pour offrir une interview de génie au bord du court après sa victoire : « Je voulais vous dire merci. J’étais tellement fatigué, j’avais mal partout, mais c’est vous qui m’avez donne l’énergie de me battre [en me sifflant]. Je veux que vous sachiez en allant vous coucher que j’ai gagné grâce à vous ».

L’histoire d’amour est lancée. Medvedev se fait pourrir au tour suivant et rallume le brasier lors de sa célébration en encourageant les tribunes à la siffler le plus fort possible. Mea culpa en conférence de presse ? Pensez-vous.

« J'ai fait des choses dont je ne suis pas fier et sur lesquelles je travaille pour devenir un homme meilleur sur le court parce que je crois réellement que je suis une bonne personne en dehors du court. Après le match, j'ai un peu provoqué la foule, mais on sait tous comment peut être le public de New York: c'est probablement le public le plus électrique du monde. Donc aujourd'hui, j'ai juste fait un peu de provocation et j'espère que ça les a amusés, moi en tout cas ça m'a amusé ».

Pour ce qui nous concerne, une idole est née. Paul-Henri Mathieu, qui a remporté le dernier match de sa carrière contre l’asticot, n’est pas loin de s’inscrire au fan club. « Ce qu’il dégage dans son comportement ? Il faut en avoir pour balancer ce qu’il balance en interview à la fin du terrain, avec la fatigue du match. On sent qu’il est sur un fil mentalement et physiquement, qu’il est à deux doigts de s’emporter, mais il arrive à se contenir avant de tout lâcher quand le match est fini », estime le consultant Eurosport. La cagnotte pour le barbecue de fin d’année à l'ATP déborde de partout (19 000 dollars d’amende depuis le début de la quinzaine), et le gamin (23 ans), prend un pied monstrueux. A la différence de Kyrgios et Fognini, dont les court-circuits dans l’armoire à fusible peuvent déteindre sur le scénario du match, Medvedev semble encore meilleur quand il part en vrille.

« Un garçon discret, limite effacé »

Le fruit d’années d’expérience, confiait-il récemment à l’Equipe. « Quand tu commences à jouer sur le circuit principal, il y a plus de caméras, plus d'attention, et là j'ai compris que je ne pouvais pas faire les conneries que je faisais avant, sinon j'allais passer ma vie à être disqualifié. Vous n'imaginez même pas comment j'étais jusqu'à dix-neuf ans... Je ne sais pas d'où ça vient, mais vers dix ans j'ai commencé à faire n'importe quoi sur le terrain. Heureusement, j'avais une grande force intérieure, je détestais perdre, et même avec ce comportement je faisais tout pour gagner ».

Jean-René Lisnard, qui a formé Daniil Medvedev dans son académie cannoise pendant trois ans, jette un voile pudique sur cette adolescence tennistique : « C’est sûr qu’il y a eu des matchs balancés et des recadrages. Mais Daniil est tout le contraire de ce personnage en privé. C’est un garçon discret, limite effacé. Quand il vient manger au club, c’est vraiment monsieur tout le monde, il passe inaperçu. Il a beaucoup de distance vis-à-vis du star system, il hésite pas à dire ce qu’il a à dire. A New York, c’est plutôt marrant, non ? »

Presque autant que la fois où il avait balancé des pièces de monnaie au pied de la chaise d’une arbitre à Wimbledon en 2017 pour lui signifier qu’elle était corrompue. Son premier coup d’éclat dans le grand monde.

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« Ca peut dégager l’image d’un mec arrogant alors que ce n’est pas du tout conforme à ce qu’il est, rebondit PHM. Si on peut juger qu'il manque un peu de charisme au niveau de son jeu, il a un vrai truc en dehors, une personnalité à part ». Comprendre qu’il compense son manque de folie technique par un sens du spectacle appréciable. Les spectateurs américains ont d’ailleurs vite retourné leur veste, lui réservant une ovation monstre une fois qu’il a rendu chèvre Stan Wawrinka en quarts, en lui jouant la partition brevetée Djokovic du type-au-bord-de-la-mort-pendant-une-heure-qui-gambade-comme-un-lapin-à-la-fin.

Le phénomène peut-il dépasser l’été indien et s’assurer une place définitive dans la liste des gars qui nous donnent envie de payer une place, quelque soit son niveau du moment ? Son ancien coach tire un peu la tronche qu’on le voit comme un amuseur public. « Ce qui se passe hors du terrain, c’est de l’anecdote pour faire plaisir aux journalistes. La vérité, c’est que Daniil n’avait pas de classement à 18 ans, qu’il a su apprendre tous les jours pour évoluer sans cesse, et qu’il prend en maturité. C’est un compétiteur et un gagneur avant tout ». Ce qui fait donc une grosse différence avec Kyrgios, pas encore tout à fait menacé à la Race des plus grosses têtes à claque de l’ATP.