RUGBYLa charnière inédite Dupont-Ntamack va-t-elle réussir son baptême du feu?

XV de France: Talentueuse et insouciante, la charnière inédite Dupont-Ntamack va-t-elle réussir son baptême du feu?

RUGBYLa charnière Ntamack-Dupont scrutée de très près par l'oeil de Sauron
Romain Ntamack sera très surveillé
Romain Ntamack sera très surveillé - FRANCK FIFE / AFP
William Pereira, avec Nicolas Stival

William Pereira, avec Nicolas Stival

L'essentiel

  • Antoine Dupont et Romain Ntamack formeront la charnière du XV de France contre l'Ecosse
  • Les deux jeunes joueurs du Stade Toulousain ont la cote au sein du groupe bleu

Arrêtez tout, on a peut-être trouvé une trace de cohérence dans le discours de Jacques Brunel. Ça s’est passé mardi matin à l’annonce du XV titulaire contre l’Ecosse au Stade de France, alors que « Moustache » n’avait de cesse de marteler qu’il voulait « voir le vrai visage de [son équipe] ». Comprenez, de l’engagement, de la fraîcheur, l’enthousiasme et les épaules pour jouer sous pression. Des paroles dont on aurait pu moquer la vacuité si elles n’avaient pas été couchées sur papier. Deux choix tactiques illustrent les mots de Brunel : la titularisation de Thomas Ramos avec supplément buteur en prime et le remplacement de la charnière Lopez-Parra par l’inédit duo Dupont-Ntamack.

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18 ans, 80 capes et deux déclas polémiques d’écart entre les deux paires, ça en fait de la fraîcheur. Un peu trop même, non ? Kylian Mbappé nous dirait de ne pas parler d’âge. Idem pour le pilier du XV de France, Jefferson Poirot : « La question de l’âge, c’est très français. Ce sont deux joueurs de très grande qualité, c’est très simple. Depuis le début de la saison, ils sont les meilleurs en Top 14. Donc à quel moment on peut se poser la question de l’âge ? » Heu, au hasard, dans un contexte post-branlée à Twickenham et pré-match décisif au Stade de France dans l’optique de ne pas ressortir du tournoi avec la cuillère de bois ?

Apparemment, on est un peu les seuls à craindre pour la jeunesse française. Même du côté du Stade Toulousain, on n'a pas peur un instant de voir les deux espoirs du rugby tricolore consumés par la spirale de lose du XV de France. Bien au contraire. Citations choisies du co-entraîneur Régis Sonnes, du pilier Cyril Baille et du deuxième ligne écossais Richie Gray.

Sonnes : « En termes d’expérience, ce sont des choses à vivre. Ils vont progresser. Ils vont emmagasiner de l’expérience. Cela va les faire grandir. Et c’est tout bénéfique pour nous aussi. Cela va les rendre plus matures. Vraiment, je ne vois que le positif. »

Baille : « Ce sont des joueurs à part. Même ici on le voit. Sur les matchs importants, ils nous font gagner à chaque fois. C’est bien de les aligner ensemble. De plus, ils sont jeunes, c’est bien pour l’avenir. Il faut qu’ils commencent par des matchs comme ça. Ils n’ont pas de pression à avoir. Je sais très bien qu’ils feront un grand match. Ce sont des joueurs surdoués. Il faut qu’ils jouent comme ils savent le faire et tout se passera naturellement. »

Gray : « Je suis super content pour Romain et Antoine, deux super joueurs. Ils sont jeunes, ils n’ont pas peur. »

Au point de friser l’insouciance. Yoann Huget dit essayer de tenir un rôle d’accompagnateur pour mettre Romain Ntamack et Antoine Dupont dans les meilleures conditions mais sent son utilité limitée auprès des deux jeunes loups. « La pression, ils n’en ont pas beaucoup. Ces mecs-là sont capables de faire une partie de ping-pong ou de jouer au rami deux heures avant le match. Ils sont cools. C’est la marque de la nouvelle génération. » Ou simplement de celle de deux joueurs hors-norme habitués à être surclassés depuis les sélections jeunes et à jouer des gros matchs en club.

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Jamais alignés côte à côte à Toulouse

Protégés dehors, protégés entre les quatre lignes aussi. « Wen » Lauret était à deux doigts de prêter allégeance aux deux loustics dans un élan de professionnalisme exacerbé, mardi en conférence de presse. « Il faut que le 3e ligne soit plaqueur, fasse le don de soi pour éviter qu’il (le 10) et même le 9 soit trop visé. C’est à moi de faire en sorte que Romain passe une soirée pas trop désagréable. » Même si bon, là encore, l’intéressé n’a pas forcément besoin de garde du corps. Gaël Fickou :

« « Romain a les capacités de défendre tout seul, c’est un très bon défenseur, il est très costaud pour un numéro 10. On va l’épauler mais je m’inquiète pas. Pour défendre, il n’aura pas besoin de nous et il l’a déjà montré. » »

Quant à l’explosif et offensif Dupont, que Fickou n’oublie pas, « il a énormément de capacité physique il est redoutable dans les duels. Morgan (Parra, absent du groupe sur choix de l’entraîneur) et lui c’est deux registres différents, mais ça va être une autre arme à exploiter. On sait qu’il est très bon dans les zones proches du ruck, il anime bien aussi. »

Tout ça c’est bien joli, mais on n’oublierait pas un truc, là ? Dire que Dupont et Ntamack sont, pris individuellement, très bons, on n’est pas loin de l’enfonçage de portes ouvertes. Mais quid de leur rendement côte à côte ? Car la septième charnière de Jacques Brunel n’est pas loin d’être une nouveauté pour les intéressés, alignés en charnière une seule fois à Toulouse. C’était le 20 janvier, contre Sale en Challenge européen. A part ça, on a surtout vu Dupont à la mêlée et Ntamack, pourtant 10 de formation, n’a joué que trois fois à ce poste en club depuis le coup d’envoi de la saison. Brunel compte sur la polyvalence du dernier cité pour pallier ces carences. « Je sais qu’il n’a aucune préférence particulière. Il évolue dans une position de premier centre avec Toulouse mais il est aussi organisateur du jeu. Nous travaillons essentiellement avec lui en position d’ouvreur depuis un moment. Si on avait eu un doute, on ne l’aurait pas mis. »

Cité par L’Equipe, l’ancien international Guy Accoceberry n’a aucun doute sur la complémentarité de cette charnière inédite. « Ils se trouvaient naturellement sur la fin de match contre l’Angleterre. Ils sont polyvalents et peuvent se substituer l’un à l’autre [Dupont sait jouer 10, il l’a fait chez les jeunes]. » Si l’expérience marche, le XV de France aura un peu gagné son premier pari sur le futur. Huget : « ce sera difficile de se passer d’eux dans les années à venir vu leur potentiel. Ils représentent l’avenir. » Au pire, si ça foire, il faudra se contenter de baisser les yeux et ne pas trop parler en zone mixte.