RUGBY«La responsabilité de Clermont est engagée» dans l'affaire Jamie Cudmore

Commotion cérébrale: «La responsabilité de Clermont est engagée» dans l'affaire Jamie Cudmore

RUGBYLe joueur était resté sur le terrain malgré deux commotions cérébrales dans le même match...
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

C'est une première pour un club français: un expert neurologue met en cause Clermont pour avoir renvoyé sur le terrain son ex-joueur Jamie Cudmore, malgré une seconde commotion cérébrale subie dans un même match en finale de la Coupe d'Europe 2015.

Dans un rapport daté de jeudi et dont l'AFP a eu connaissance lundi, le neurologue François Chédru, mandaté par le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, stipule que « la responsabilité de l'ASM est engagée dans les préjudices subis par le requérant du fait du traumatisme crânien subi à la 56e minute de jeu pendant le match du 2 mai 2015 ».

Pour l'expert neurologue, Jamie Cudmore « n'était pas apte à revenir jouer de la 66e minute à la 80e », lors de la finale continentale perdue face à Toulon (24-18), moins d'une heure après un premier traumatisme crânien lors du même match (10e minute) et deux semaines après une précédente commotion en demi-finale face aux Saracens.

Ce n'est pas une décision de justice, la procédure s'annonce encore longue et l'expert reconnaît « qu'il n'y a pas de lien de causalité entre la faute commise par l'ASM et les préjudices subis par M. Cudmore », qui «restent somme toute mineurs ». L'ex-international canadien, aujourd'hui manager de Provence Rugby (D2), a en effet « totalement récupéré ses capacités physiques et cognitives » après ces événements.

Mais Jean-Hubert Portejoie, l'avocat de Cudmore, obtient aussi gain de cause lorsque l'expert estime qu'avoir « subi trois commotions cérébrales en 15 jours comportait un risque de syndrome du second impact pour M. Cudmore dont les conséquences auraient pu être dramatiques pour sa santé. »

L'exemple de Lambie

Les clubs professionnels doivent-ils s'inquiéter? L'ancien deuxième ligne, qui a assigné son ex-club en justice en juin 2017, l'accusant «d'avoir joué avec sa santé» en le maintenant sur le terrain après ces deux chocs, «se réserve désormais la possibilité de déposer plainte contre X, pour mise en danger de la vie d'autrui», selon son avocat. Une brèche dans laquelle d'autres joueurs pourraient s'engouffrer, dans un contexte d'inquiétude grandissante autour des commotions et plus généralement de la santé des joueurs.

Samedi, l'ouvreur sud-africain du Racing 92 Pat Lambie annonçait ainsi sa retraite avec effet immédiat par crainte de nouvelles commotions, après en avoir subi trois majeures en l'espace d'un an et demi.

Plus grave: le Springbok a reconnu avoir caché les symptômes post-commotion qu'il connaissait bien après un choc lors de la demi-finale de Coupe d'Europe gagnée face au Munster en avril, car la finale arrivait deux semaines plus tard.

Des mesures suffisantes?

Dans une discipline qui perd depuis plusieurs années ces licenciés (-4% en décembre 2018 par rapport à l'année précédente, selon la Fédération), le sujet a pris une place prépondérante avec la multiplication des chocs impressionnants, comme celui du jeune Clermontois Samuel Ezeala en janvier 2018 pour son premier match de Top 14.

Dans la foulée, l'Observatoire médical du rugby a préconisé fin mars 45 mesures pour protéger les joueurs. Parmi elles, la modification de la règle des remplacements, qui a abouti à la possibilité d'effectuer jusqu'à 12 changements par rencontre cette saison en Top 14 et Pro D2.

Cette dernière mesure a été appliquée à partir du mois d'août, lors d'une reprise assombrie par la mort du jeune joueur d'Aurillac Louis Fajfrowski (21 ans) d'une commotion cardiaque consécutive à un plaquage subi lors d'un match de préparation. Le décès en décembre de Nicolas Chauvin (18 ans), Espoir du Stade Français victime d'un arrêt cardiaque après un plaquage, a suscité une nouvelle forte vague d'émotion. Deux joueurs amateurs, Adrien Descrulhes (17 ans) en mai et Nathan Soyeux (23 ans) début janvier, sont également décédés en moins d'un an après un choc subi au cours d'un match.

La FFR et la Ligue (LNR) ont proposé à World Rugby de réfléchir à l'interdiction du plaquage à deux et à l'abaissement de la ligne de plaquage autorisée des épaules à la taille. Le forum mondial prévu les 19 et 20 mars à Paris sur la santé des joueurs et l'évolution des règles doit permettre d'avancer sur le sujet.