Route du Rhum: Kito de Pavant, le meilleur marin de tout l’étang
VOILE•Avec un solide CV et quelques cruelles désillusions, Kito de Pavant vise la victoire dans la catégorie des Class40, d'ici environ deux semaines en Guadeloupe...Jérôme Diesnis
L'essentiel
- A 57 ans, le marin méditerranéen espère remporter la Class40, « la seule où l’argent ne fait pas la différence. La seule où le sport est roi », quatre ans après être monté sur le podium.
- Poissard sur le Vendée Globe, mais vainqueur de plusieurs courses emblématiques, le skipper de Made in Midi a barré son premier bateau sur un étang en Dordogne. Convoyeur de navires, il a mis longtemps avant de faire de la course au large son métier.
Il n’est pas le plus vieux, pas le plus galonné des 123 skippers qui ont pris le départ dimanche de la route Rhum. Mais le visage façonné par le sel, le soleil et le vent, par quelques larmes aussi, témoigne de toutes les vies de ce marin chevronné au verbe rare. Même si avec le temps, le passage obligé de la recherche de sponsors et donc celui de la médiatisation, il a accepté l’idée de parler un peu plus de lui. Un vrai marin… un peu poissard depuis quelques années.
L’histoire de Kito, Christophe pour l’Etat civil, est faite de magnifiques victoires et de déchirantes désillusions. D’un rêve sous doute à jamais inachevé, d’abord : terminer le Vendée Globe. Trois fois, le navigateur de Port Camargue et de Montferrier-sur-Lez, s’est heurté à son destin. La tempête qui a brisé son mat au deuxième jour de la course en 2008, un chalutier qui a croisé sa route en 2012 et en 2016 la. poisse absolue.
« Je suis maudit sur le Vendée Globe »
Une rencontre improbable au milieu de l’océan avec un cachalot qui l’a contraint à abandonner son bateau. « La mer n’est pas assez grande », explique-t-il fataliste dans un carnet de bord très intime, publié chez Privat. « Autant en 2012, quand je suis rentré en collision avec un pêcheur, je me suis dit que j’aurais pu l’éviter et j’ai énormément culpabilisé, explique le marin. Autant là, c’est le coup du sort. » Le navigateur est « maudit sur le Vendée Globe mais pas sur le reste ».
« Le reste », ce sont des victoires sur la Solitaire du Figaro, le Tour de France, la transat AG2R et une cargaison de places d’honneurs dans les courses au large. Dont un podium sur la Route du Rhum 2014, en Class40. « La seule catégorie où l’argent ne fait pas la différence. La seule où le sport est roi ». Leur arrivée est prévue bien après celle des Ultimes, les Formule 1 des mers.
« Ce souvenir m’a marqué à vie »
Mardi soir, celui qui a appris à naviguer sur un étang, en Dordogne, chassait le Top 5 avec une option très au sud – « il faut bien que j’assume mon statut de sudiste », souriait-il au milieu de quelques mots sur son carnet de bord. « Taper un texte dans ces conditions est une prouesse. 40 nœuds, mer forte, ça penche, ça secoue, mais ça avance. »
Son ambition ? « Gagner ». Rejoindre dans la légende Mike Birch, qui en 1978, s’était imposé pour 98 secondes après 23 jours de course. « Ce souvenir m’a marqué pour la vie ». Il avait 17 ans à l’époque. Il en a 57 aujourd’hui. Le skipper de Made in midi a longtemps gagné sa vie en convoyant les bateaux des autres autour du monde Avant, en 2000, de se jeter à l’eau. « Pour faire les choses, il faut à la fois de l’opiniâtreté et de l’envie. »