Bien sûr, certains diront que son adversaire était amoindri. D’autres argueront que sans Nadal, c’est quand même plus facile. Mais pour tout le reste, il y a eu une révélation vendredi au stade Pierre Mauroy : Benoît Paire a emballé tranquillement la Coupe Davis pour sa première rencontre. Vainqueur de l'Espagnol Carreno Busta en trois sets secs, l’Avignonnais a mis tout le public dans sa poche et offert le premier point aux Bleus dans cette demi-finale.

« La plus grande émotion de ma carrière »

Au-delà du résultat, Paire y a mis aussi la manière sur le terrain avec des coups spectaculaires mais aussi hors du court en haranguant comme un showman le public du stade Pierre Mauroy. De quoi se faire des souvenirs pour la vie. « C’est la plus grande émotion que j’ai ressenti sur un court dans ma carrière. Mais ça n’a pas été simple à gérer. Je m’y attendais et j’avais prévenu le capitaine que la descente sur le court et l’hymne allaient être durs pour moi », reconnaît le 54e joueur mondial.

En larmes pendant la Marseillaise, Paire a mis du temps avant de rentrer dans son match. Mené 5-3 dans le premier set, ll aura fallu un débreak pour lancer la machine et se débarrasser des mauvaises ondes.

« J’avais envie de montrer à tout le monde que je pouvais bien me comporter »

« Avec ce qui s’est passé aux Jeux il y a deux ans (il avait exclu de l'équipe de France pour avoir découché du village olympique), j’avais vraiment pris un gros coup sur la tête. Me retrouver à Lille en demi-finale de la coupe Davis, ça a été ingérable dans ma tête. Des gens ont dit que je n’avais pas envie de jouer pour l’équipe de France. C’est ridicule, j’ai toujours eu envie de ça. C’est un rêve qui se réalise. J’avais envie de montrer à tout le monde que je pouvais bien me comporter », se réjouit l’Avignonnais.

Le soutien de Noah sur la chaise

A croire finalement qu’il était fait pour ça. « Je suis heureux pour lui. Il a réussi à jouer son jeu avec le public derrière lui et Yannick qui l’a aidé sur la chaise. Quand il joue, il peut toujours y avoir un creux chez Benoît. Mais pas en équipe car tout le monde est derrière lui et il y a quelqu’un avec lui sur la chaise », explique Thierry Champion, directeur du haut niveau à la Fédération Française de Tennis (FFT).

Fragile mentalement, Paire s’est beaucoup servi de son capitaine pour se canaliser lors de cette grande première. « Il y a eu beaucoup de communion avec Yannick (Noah). Je discute beaucoup pendant les matchs et j’aime bien raconter ma vie. Avec Yannick, on a discuté, je lui ai raconté mes sensations pendant le match. On a eu un discours de coach à joueur. Ça m’a fait du bien », confie le joueur de 29 ans.

L’adoubement de ses coéquipiers

Quant au reste de l’équipe, celui qui s’est longtemps fait taxer d’individualiste, a été adoubé par ses coéquipiers. « Tout le monde était proche de moi. Il y a un super groupe qui vit très bien. Quand je voie Richie (Gasquet), qui aurait pu jouer à ma place, me serrer dans ses bras et me dire qu’il est fier de moi, ce sont des moments qui font du bien. Ils m’ont beaucoup aidé pour cette première sélection », reconnaît Benoît Paire.

Joueurs et capitaine emballés, il ne restait plus qu’à conquérir le public ce que le Français a réussi sans problème, en bon showman. « J’adore cette ambiance. J’ai vraiment kiffé. J’ai pris du plaisir. J’avais des choses à prouver et j’avais vraiment envie de montrer que je pouvais apporter des choses à cette équipe », ajoute le 54e mondial.

« Il a su mettre à profit son jeu, le public, sa première sélection. C’est un ensemble de choses. C’est le dernier arrivé dans cette équipe mais on a l’impression qu’il est là depuis toujours », remarque Thierry Champion.

Un déclic pour la suite ?

C’est juste dommage que cette coupe Davis ancienne version arrive à son terme car elle était vraiment faite pour Paire. Même si à 29 ans passés, le joueur reconnaît qu’il ne croit plus trop aux déclics.

« On m’a souvent trouvé des déclics. Dès que je ne m’énervais pAs sur un match, on disait que c’était un déclic et puis après, je repétais les plombs. Plus globalement, j’arrive à avoir beaucoup plus de sérénité sur le court depuis un an ». La maturation a été longue à venir mais elle est enfin là. Elle ne sera pas de trop pour aller chercher un nouveau titre avec un joueur qui semble avoir déjà trouvé tous les ingrédients dans ce grand Saladier.