VIDEO. Ultra trail: 161 km et plus de 40 degrés en Sierra Nevada… François D’Haene «en danger sportif» sur la Western States
ULTRA TRAIL•Trois ans après « un coup de chaud » et une 14e place sur la redoutable course américaine, le triple vainqueur de l’UTMB François D’Haene est de retour samedi sur la Western States 100 (Etats-Unis)…Jérémy Laugier
L'essentiel
- A 32 ans, François D’Haene semble au sommet de sa carrière, à l’image de son troisième UTMB remporté et du record du John Muir Trail pulvérisé en 2017.
- L’ultra-trailer du Beaujolais s’est trouvé un drôle de challenge en retournant samedi (à partir de 14 heures) sur la Western States en pleine Sierra Nevada.
- Cette course de 161 km, historiquement archi-dominée par les coureurs américains, a la particularité d’être disputée sur un rythme de folie, et par plus de 40 degrés en journée.
Au moment de s’élancer sur la Western States, François D'Haene aurait presque des allures du Roger Federer des années 2000, qui cherchait encore à conquérir son premier Roland-Garros. Vainqueur à trois reprises de l'UTMB et du Grand Raid de la Réunion, mais aussi du Mont Fuji, l’ultra-trailer rhodanien n’a pas encore brillé sur ce « Grand Chelem » américain.
Après avoir « souffert de la chaleur » et fini 14e en 2015, le coureur de 32 ans avait dû déclarer forfait juste avant l’édition 2016 en raison d’une entorse à la cheville. C’est dire si cette colossale course de 161 km (5.500 m de dénivelé positif, 7.000 m de D-) sera son objectif majeur de la saison, samedi dès 5 heures du matin (14 heures en France).
Kilian Jornet est le seul Européen à l’avoir remporté à Auburn
« Ça sera vraiment un gros challenge pour lui car ce n’est pas un profil de course qu’il affectionne, confie Ludovic Pommeret, vainqueur de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc en 2016. François est comme moi : on préfère les courses techniques sur lesquelles on peut parfois marcher. Il vient de l’athlétisme et est capable de faire moins de 2h30 sur un marathon. Mais là, il sera sur un parcours roulant et descendant face à des gars qui ont moins de 2h20 dans les jambes. » Et qui sont américains pour la plupart des favoris, ce qui est tout sauf anodin au vu du palmarès du plus ancien et prestigieux 100 miles au monde.
L’UTMB leur échappe mais ils ne règnent sur la Western States. Depuis 1974, l’incontournable Espagnol Kilian Jornet est le seul Européen à l’avoir emporté à Auburn (en 2011). Le Canadien Rob Krar (2014 et 2015) et le Sud-Africain Ryan Sandes (l’an passé) sont les deux autres vainqueurs hors Etats-Unis, en 43 éditions. Ce dernier est d’ailleurs le pacer de François D’Haene depuis son arrivée le 14 juin en Californie. Avant cela, celui qui est aussi viticulteur dans le Beaujolais s’est préparé en Chine puis en Corse.
« J’étais sacrément en surchauffe par 43 degrés dans le Grand Canyon »
« François est en train de prendre le chaud pour se préparer au mieux car Auburn est juste un four [plus de 40 degrés en journée], indique le manager du Team Salomon Jean-Michel Faure-Vincent. On peut être bien à un moment de la course puis exploser deux kilomètres plus loin après un coup de chaleur. » Ce ne sont pas les opportunités qui manquent en pleine Sierra Nevada, à en croire Ludovic Pommeret.
« J’étais sacrément en surchauffe il y a peu après une descente de 1.500 m dans le Grand Canyon par 43 degrés. Heureusement que j’ai pu me mouiller un peu en bas. Comme tous les coureurs hors USA, on a tellement besoin de s’acclimater à ces conditions climatiques qu’on part avec un petit désavantage. » »
La même distance que l’UTMB… mais en quatre heures de moins !
Car pour prétendre à la victoire finale, il faut tourner à 11 km/h de moyenne, avec par exemple un record de 14h46 en juin 2012 (Timothy Olson), soit environ quatre heures de moins que la performance ayant permis à François D’Haene de s’adjuger le dernier UTMB (171 km, soit quasi la même distance que la Western States), le plus relevé de l’histoire.
« La phase de marche n’existe pas ici, insiste Jean-Michel Faure-Vincent. On ne peut même pas se permettre de manger tranquillement après un ravitaillement. » Autant de paramètres qui mettent quasiment le recordman du GR20 et du John Muir Trail (Californie) dans une inhabituelle position d’outsider samedi.
« S’il l’emporte là, ça prouvera qu’il est un athlète accompli »
« Si François essaie de suivre le rythme des coureurs US, il peut se mettre en danger, prédit Gaëtan Janssens, qui le côtoie régulièrement sur les courses de trail. Il faut savoir que ce n’est jamais celui qui est devant au début qui l’emporte sur la Western States. S’il s’impose là-bas, en sortant totalement de sa zone de confort qui est autour du Mont-Blanc, ça prouvera qu’il est un athlète accompli. »
Pour Ludovic Pommeret non plus, « François ne part clairement pas favori ». « La clé pour lui sera de ne pas se laisser enflammer par le rythme de Jim Walmsley et des autres Américains, poursuit l’ultra-trailer du Team Hoka. Mais il est assez intelligent pour sortir le grand jeu tout en restant lucide. » A lui de convertir à partir de samedi ses coups de chaud californiens en brûlante performance, comme le résume Jean-Michel Faure-Vincent : « François a voulu se mettre à nouveau en danger sportif et il va lui falloir trouver une nouvelle clé dans ce challenge. »