Coupe du monde 2018: A propos de quels supporters d’équipes sud-américaines va-t-on s’extasier ce coup-ci?
FOOTBALL•Les supporters des nations d’Amérique Latine sont déjà chez eux en Russie…J.L.
De notre envoyé spécial à Moscou,
Ils sont mexicains, uruguayens, argentins, ou péruviens. La plupart se sont tapé des connexions pas possibles. Bucaramanga-Bogota-Miami-Lisbonne-Moscou, Mexico-Amsterdam-Paris-Moscou. Et pourtant, ils sont là frais comme des gardons, uniques propriétaires des environs de la Place Rouge, fermée aux visiteurs par des lignes infinies de policiers russes. La rue Nikoliskaya, celle qui mène au Kremlin et qui borde le Goum, le célèbre « magasin universel d’Etat » en carton-pâte qui fait la fierté de la bourgeoisie moscovite, leur appartient. Les suiveurs des sélections sud-américaines présentes en Russie vont encore se tirer la bourre pour remporter la palme des meilleurs supporteurs du Mondial, titre remis en jeu par les Colombiens. On fait le tour de la concurrence.
La valeur sûre >>> Les Argentins
Pourquoi ils vont tout casser
Parce que c’est la dernière chance de Lionel Messi de remporter une Coupe du monde. Sabastian Padilla, venu de Cordoba avec deux amis, était déjà en Allemagne pour le premier Mondial du quintuple Ballon d’Or, alors éliminé en quarts contre le pays hôte. « Messi a déjà pris sa retraite internationale après la défaite en Copa America. Il est vite revenu, mais si on ne gagne pas cette fois-ci, c’est sûr que ce sera fini. D’autant que la suite ne devrait pas ressembler à grand-chose. Dybala c’est bien gentil, mais ce ne sera jamais aussi bon que Leo ». Comme Sebastian, ils seront plus de 20 000 « hinchas de la albiceleste » en Russie à pousser comme des damnés pour voir Messi enfin remporter le titre suprême.
Quel est leur chant qui va cartonner ?
Quatre ans après l’inoubliable « decime que se siente » à l’adresse des Brésiliens, les Argentins qu’on a croisés dans les rues moscovites, ont beaucoup lancé cette reprise d’un chanteur de cumbia local. Un peu long, mais ça fonctionne
aLes tauliers >>> les Colombiens
Pourquoi ils peuvent bisser
Immense sensation du Mondial brésilien, où ils avaient enchanté le monde, les fans colombiens entendent bien remettre ça en Russie, même si l’attrait de la nouveauté a disparu (les Cafeteros n’avaient plus disputé la Coupe du monde depuis 1998). Grimé en guerrier colombien, Alberto Rincon défend la candidature de ses compatriotes entre deux photos avec des locaux emballés par le déguisement. « Les supporters se sentent très proches de cette équipe et surtout de son entraîneur, Pekerman. C’est lui qui a redonné une identité à la sélection, et tant qu’il sera là, l’engouement sera total. Il a redonné l’amour de la patrie à tout le monde. Les joueurs et les fans ».
Quel est leur chant qui va cartonner ?
Encore en gestation, mais il sonne bien à l’oreille. C’est Alberto qui nous fait la démo.
Les plus prometteurs >> Les Péruviens
Pourquoi ils peuvent créer la surprise ?
On tient peut-être les néo- (pré) colombiens, avec les supporters du Pérou. Déjà, parce qu’ils sont une tripotée. Mais vraiment. De loin, si les gars se mettaient à pousser derrière la Russie, la Sobornaya jouerait dans une ambiance de feu. Les Péruviens attendaient ça depuis 30 ans, et ils sont contents d’être là. Willy Martinez n’a encore jamais vu un match de Guerrero et ses équipiers pour de vrai. Mais il s’est laissé emporter par la vague : « Notre qualification est un miracle. On ne devrait même pas être là, le Chili a fait n’importe quoi. L’euphorie au pays est incroyable, moi-même, qui ne suis pas un énorme fan, je me suis pris au jeu. Il fallait que je sois là. Le Pérou va jouer à domicile à tous les matchs ». Véridique, on en attend 30.000 au premier tour. Le plus gros contingent d’Amérique Latine.
Quel est leur chant qui va cartonner ?
Como no te voy a querer si eres mi Peru bendito
Les plus admirables >>> Les Mexicains
Pourquoi ils ont du mérite
Parce qu’ils supportent le stade rennais du football international. L’équipe pas mal au premier abord, parfois même séduisante, mais incapable de passer un cap. Cela va faire six éditions que les fans de la « Tri » rentrent la queue entre les jambes après les 8es de finale. Et pourtant ils en veulent encore. Raul Duenas a fait le voyage avec son père et son oncle, le sombrero encore empaqueté dans le genre de cartons que Chronopost ne livre jamais. Dix jours de virée entre hommes et « le fol espoir d’un exploit, d’une victoire qui change notre destin de perdant. Je ne sais pas si nous sommes les meilleurs supporters d’Amérique Latine, mais on est les plus fidèles. On ne lâche jamais malgré les déceptions qui se ressemblent toutes. Bon, cette fois, c’est le Brésil qui devrait nous éliminer en 8e. Mais l’espoir, c’est important ».
Quel est leur chant qui va cartonner ?
Le fameux Cielito lindo qu’on se souvient avoir entonné avec un succès certain dans un bar espagnol le soir du funeste France-Mexique de 2010.
aLes plus imprévisibles >>> Les Brésiliens
Pourquoi ils sont exigeants
Difficile d’évoquer les supporters brésiliens sans parler du sujet qui fâche. Le 7-1 de Belo Horizonte de 2014, plus ou moins digéré par une nation persuadée d’avoir la meilleure équipe du monde tous les quatre ans. 2018 ne déroge pas à la règle. Wagner maillot de Romario sur les épaules, ne restera pas jusqu’au bout de la compétition. Mais il croit très fort en la victoire. « Cette fois, on n’a pas que Neymar. Il y a un milieu de terrain solide, une bonne défense, un bon gardien. Ça commence à faire beaucoup trop longtemps qu’on n’a pas gagné [2002]. Est-ce qu’on va leur pardonner s’ils ne gagnent pas ? On sera obligés, mais j’ai un bon sentiment ». Suffisant pour faire le déplacement, même si les Brésiliens sont en minorité à Moscou, en attendant de se retrouver en nombre à Sotchi.
Quel est leur chant qui va cartonner ?
Les plus discrets >>> Les Uruguayens
Pourquoi ils font profil bas
Pas facile de mettre la main sur les potos de Cavani. Heureusement, on tombe sur le couple parfait. Ricardo Pedreza et Claudia Nieves, qui ont économisé pendant quatre ans pour faire le voyage depuis le Massachussetts. « C’est difficile de nous comparer aux autres nations. On est un tout petit pays en comparaison, seulement trois millions d’habitants, on ne peut pas déplacer autant de monde. Je pense qu’on ressemble à notre équipe. On met beaucoup de cœur dans ce qu’on fait ». Ainsi qu’une humilité bienvenue quand on compare à l’exubérance d’un groupe d’Argentins bien trop chambreurs à côté. « J’ai vu qu’on pouvait jouer la France plus loin dans la compétition. Mais il faut déjà passer la phase de poule, chaque chose en son temps ». Ca vaut pour les deux équipes, d’ailleurs.
Quel est leur chant qui va cartonner ?
On ne va pas se mentir, ce que Ricardo et Claudia ont en magasin n’est pas bien affriolant. Un peu comme un taquet volontaire de Diego Godin.
Non mentionnées >>> Panama et Costa Rica
Aucune censure éditoriale là-dedans. C’est juste qu’on leur cherche toujours des fans à Moscou. Pas un maillot de Dely Valdès à la ronde malgré deux heures de veille acharnée (on ne connaît pas d’autre Panaméen, désolés).