JEUX OLYMPIQUESDans la tête de Martin Fourcade après cette drôle de victoire

JO 2018: «J’ai tellement cru avoir perdu», dans la tête de Martin Fourcade après cette drôle de victoire

JEUX OLYMPIQUESMartin Fourcade n'a pas encore complètement la sensation d'avoir gagné...
Fourcade a franchi la ligne d'arrivée les yeux fermés
Fourcade a franchi la ligne d'arrivée les yeux fermés - Andrew Medichini/AP/SIPA
William Pereira

William Pereira

De l’un de nos envoyés spéciaux, à Pyeongchang,

On l’avait prédit pour rire avant le début des Jeux olympiques. Cette mass-start de Pyeongchang serait un remake de celle de Sotchi, sauf que Martin Fourcade gagnerait à la photo finish contre son bourreau d’il y a quatre ans, Emil Svendsen. On s’était donc seulement planté sur le nom du deuxième : Simon Schempp, champion du monde de la spécialité, et accessoirement des fins de courses au sprint. « Il est plus puissant que moi sur cet exercice », admet volontiers l’homme qui a choisi de surpasser Jean-Claude Killy au palmarès des médaillés olympiques français plutôt que de se faire dépasser sur la ligne d’arrivée comme en 2014. Pourtant, malgré la victoire, Fourcade a encore un goût amer dans la bouche au moment de répondre aux journalistes.

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« « C’est un peu bizarre parce que j’ai tellement cru avoir perdu ce sprint que ce sentiment de déception, il est toujours un peu là. C’était un sentiment qui m’habitait depuis le milieu du tour où je me disais 'l’histoire va se répéter'. C’est défaitiste comme pensée, mais j’avais peur que ça se répète. » »

Cauchemar et défaitisme un soir de victoire

Des pensées négatives, il a y en eu beaucoup et pas qu’à la fin de la course. Il a sans doute dû pester contre le sort de le faire glisser sur son tour de pénalité après le premier coucher. De fait, Martin Fourcade était dans le noir bien avant ce début de course haletant. « Quand je visualise les compétitions les veilles des courses j’imagine toujours les pires choses qui peuvent se passer, et finir au sprint contre un des meilleurs c’était vraiment quelque chose que je redoutais. » Il n’était pas le seul. On vous invite dans la tête du DTN, Fabien Saguez, à la fin du dernier tir.

« « Quand il lâche cette dernière balle je me dis « c’est pas possible ». En même temps, pris par l’émotion, les cibles des autres je ne les vois pas trop… Ensuite je lève la tête, je vois deux fautes d’un côté, une faute de l’autre. Je me dis, que le match va se jouer avec Schempp. 'Et merde.' Parce que contre Schempp, c’est un peu comme contre Svendsen. » »

Les pensées négatives, toujours. Au sport, les défaites passées ont un immense impact psychologique, surtout quand il s’agit de face-à-face. Comme à l’époque où Federer perdait systématiquement contre Nadal, Martin Fourcade n’arrivait pas à chasser ce jeter de ski d’Emil Svendsen qui lui avait coûté l’or à Sotchi. Il était face à ce cauchemar dont on aimerait se débarrasser mais qui revient inexorablement. « Je suis peut-être un peu bizarre mais j’ai toujours cette course [la mass-start de Sotchi] et l’individuelle [de jeudi] en tête. »

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Moins d’euphorie, plus de sommeil

On comprend mieux sa mine frustrée et le geste d’humeur qui l’a accompagné sur la ligne d’arrivée. Jamais la possibilité d’une victoire ne lui a traversé l’esprit. Pour Fourcade, Schempp revenait à pleine patate et allait le coiffer au poteau (« au moment d’attaquer le sprint, j’ai eu un pas de déséquilibre et là je me suis dit ‘c’est mort t’as pas réussi à entretenir ta vitesse et il va revenir de derrière plus rapidement’»). Même quand l’écran géant du stade l’affiche vainqueur, il ne voulait pas y croire. Il n’était pas Saint Thomas, il était encore plus que ça.

« « Quand j’ai vu le classement s’afficher juste après le sprint je me suis dit ‘non c’est pas ça ils vont en faire un autre après’, du coup j’attendais une confirmation. Je cherchais les officiels, ils étaient pas là, je cherchais les journalistes qui eux n’avaient pas la confirmation non plus. Les dix minutes qui ont suivi l’arrivée je me disais « allez dites-moi que c’est vrai » jusqu’au moment où Stéphane m’a montré la photo finish. Je le savais mais j’en étais pas persuadé. » »

Finalement, il y a du bon dans cet océan de pessimisme. Cette fois, le champion n’a pas passé une heure au froid en zone mixte. Cette fois, il ne se couchera pas trop tard (« il y aura moins d’euphorie qu’après le premier titre »). Et il est probable que cette fichue trachéite ne refasse pas surface grâce à ça. « Au moment de fermer les yeux, ce sera plus facile qu’après la poursuite ou après l’individuelle. » Et peut-être que lundi, au réveil, Martin aura remplacé l’image de Svendsen vainqueur par celle de Schempp vaincu.