JO 2016 : «Même à 50 de fièvre, je serais allé nager», Agnel se défend mais on est pas sûr d’y voir plus clair
NATATION•Même après les explications du nageur français sur son absence du relais 4x200m, il reste beaucoup d’incohérences dans l’histoire qui a secoué la natation française…B.V.
De notre envoyé spécial à Rio,
C’est donc ce moment gênant où l’on a toutes les versions de l’affaire, mais on arrive toujours pas à bien comprendre ce qu’il s’est passé. Probablement parce qu’on n’a pas inventé l’eau chaude à couper le beurre, ou peut-être parce certain(s?) ne disent pas toute la vérité. Yannick Agnel est venu donner une drôle de conférence de presse mardi soir à la piscine olympique, réquisitionnant la salle où
Michael Phelps allait raconter ses deux nouveaux titres quelques minutes plus tard.
Tour à tour déroutant, drôle, touchant ou exaspérant, il a répondu avec sa finesse habituelle aux médias, parmi lesquels l’ancien champion olympique Alain Bernard, pendant près de 45 minutes. « Parce qu’il en a marre des "on-dit", des ragots, du buzz » qu’a provoqué depuis le matin le « relais gate ».
Résumons en trois mots : Eliminés des séries du 4x200, Jordan Pothain, et un peu ses collègues Grégory Mallet et Lorys Bourelly, ont détruit devant la presse Yannick Agnel, coupable selon lui de les avoir « abandonnés » en changeant plusieurs fois d’avis sur sa présence dans le relais malgré sa sinusite.
« On dirait un crime »
Alors forcément, la première question est celle qu’on attend : « Quelle est ta version des faits ? ». Agnel se marre : « On dirait un crime. Tu te rends compte de la manière dont tu poses la question ? Bon, tout d’abord Jordan a parlé après la course, sous le coup de l’émotion, de la déception. Ce ne sont pas des paroles à prendre véritable au mot. Ses mots ont dépassé sa pensée : Ceux qui me connaissent savent que je n’ai jamais lâché personne, ni abandonné personne, et encore moins mon équipe ».
aaPourquoi n’a-t-il pas participé à ce relais, alors ? « C’est le DTN (Jacques Favre) qui a fait le choix de mettre Damien Joly. Je voulais bien évidemment participer à ce relais. C’était sur quoi on est parti hier soir en se couchant. Ils ont pris la décision de mettre Damien Joly sans me consulter à une heure du matin, alors que je dormais. »
A qui la faute alors ? A « à un gros problème de communication, coupe Agnel. La DTN n’a peut-être pas mis les nageurs au courant que moi j’étais volontaire pour aller nager. Ce matin, ils étaient tous dans la chambre avec un regard noir. Je me suis demandé où était le problème. Tout le monde est un peu fautif. On s’est tous vu cet après-midi, on a crevé l’abcès, on a mis les choses à plat. »
La malaise Bourelly
Voilà pour sa « version des faits ». Et ce n’est pas qu’elle ne nous satisfait pas, mais il y a quand même quelques trucs difficiles à comprendre là-dedans. D’abord, la résolution du problème semble un peu facile quand on voit la violence des attaques proférées ce matin. Ensuite, plus pragmatiquement, on a du mal à saisir pourquoi et Pothain et Bourelly ont dit que « Yannick Agnel avait changé plusieurs fois d’avis dans la semaine sur sa participation » alors que lui assure l’inverse.
Du coup, on a reposé la question : « A aucun moment vous n’avez dit que vous ne vouliez pas participer ? » « Non, jamais, répond Agnel. Même à 50 de fièvre je serais allé nager ce relais. Souffrant ou pas, il était hors de question que je n’y participe pas. […] J’étais amoindri, j’avais 40 de fièvre et j’étais alité. Je n’ai pas eu la présence d’esprit de dire on va le faire quand même. Je suis en chambre avec Lorys (Bourelly). Il a bien vu que je ne dormais pas de la nuit. »
C’est justement là que ça devient gênant. Certes moins virulent que Pothain dans ces déclarations du matin, Bourelly n’avait pas vraiment été tendre non plus avec Agnel, et particulièrement d’un point de vue médical. « Jordan a nagé avec une mononucléose à Londres, il s’est battu pour la France, soufflait-il après le relais. Lui, il a une rhino-pharyngite. C’est quand même pas tout à fait pareil… »
Bref, n’hésitez pas nous envoyer un petit mail si vous avez tout saisi, parce que nous on patauge clairement au milieu de ces zones d’ombre grandes comme des piscines olympiques. Ce sur quoi on serait prêt à parier en revanche, c’est que l’état-major de la Fédération française de natation était passé au milieu de tout ça pour circonscrire l’incendie et remettre tout le monde en place, au moins jusqu’à la fin des Jeux. En espérant qu’une médaille d’or de Florent Manaudou vienne tout faire oublier.