JEUX OLYMPIQUESJO 2016: Yannick Agnel prend sa retraite, et ça fait mal

JO 2016: Ça nous fait vraiment mal au cœur que tu prennes ta retraite là-dessus, Yannick Agnel

JEUX OLYMPIQUESLe nageur français va mettre un terme à sa carrière après Rio et une élimination anonyme en séries du 200 m, dont il était le champion olympique…
Bertrand Volpilhac

B.V.

De notre envoyé spécial à Rio,

Il est venu en zone mixte comme il vient d’habitude. Doux, drôle et bavard. Mais il y a dans le regard et les paroles de Yannick Agnel quelque chose de proche du soulagement. Que tout ça soit enfin fini, qu’il puisse passer à autre chose. Eliminé des séries du 200 mètres, dont il ne sera plus demain soir le champion olympique en titre, le grand nageur de Mulhouse va mettre après Rio un terme à sa carrière et à quatre ans d’une chute inexorable dans un puits dont il a enfin touché le fond dimanche.

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« Je suis très déçu et à la fois je ne peux pas l’être tant que ça car je me suis vraiment donné à fond ce matin, j’ai fait tout ce que j’ai pu, explique-t-il. Ça me fait bizarre parce que je sais que j’ai rien à regretter. J’ai pris du plaisir sur cette course. C’est dur… »

Oui, c’est dur de te voir comme ça, Yannick. Tu étais si beau, si jeune, si confiant quand tu avais retourné la planète à Londres, que c’est un vrai déchirement de te voir si loin aujourd’hui. Seulement 19e temps des séries, à des années-lumière des meilleurs, et sans que ça ne surprenne personne.

Onze médailles d'or, 34 médailles au total: la vendange bleue aux Jeux de Londres a été de qualité, avec les grands crus Riner, Agnel et des
Onze médailles d'or, 34 médailles au total: la vendange bleue aux Jeux de Londres a été de qualité, avec les grands crus Riner, Agnel et des  - Christophe Simon afp.com

Pas même toi, d’ailleurs. Tu n’as d’ailleurs pas pu t’empêcher de rire un peu quand une confrère t’a demandé « ce qu’il a manqué aujourd’hui ». « Beaucoup de choses ! De la fraîcheur physique, de la constance sur les dernières saisons, de la fraîcheur nerveuse… J’en sais rien. Je suis passé par tellement de choses difficiles ces dernières années que c’était déjà une victoire en soi d’être ici et de montrer à tout le monde qu’on peut changer son étoile, être combatif. C’est ce que j’ai tenté de faire ce matin, même si ça ne passe pas. J’ai tenté de défendre mon titre. »

Voilà donc l’histoire : un titre olympique, quatre ans d’une galère sans nom et une sortie anonyme à Rio. Quelles galères au juste ? On n’est pas trop sûr de savoir exactement. Il y a évidemment ce qui est de notoriété publique :

  • La séparation extrêmement difficile avec son entraîneur Fabrice Pellerin
  • Le départ aux Etats-Unis pour travailler avec le gourou de Phelps Bob Bowman
  • Le retour en France après l’échec sportif aux States
  • La perte tragique de sa meilleure amie Camille Muffat

Mais le mal-être d’Agnel dans l’eau va chercher plus loin. « Si je me retape quatre années comme ça vous allez me retrouver entre quatre planches, se marre-t-il. Vous savez que je parle beaucoup quand il y a un micro tendu mais je suis quand même assez pudique, ça a été dur, tellement dur, y a beaucoup de choses que je garde pour moi de ce qui s’est passé en privé. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point ça a été difficile. »

On n’en doute pas, Yannick. Mais on peut au moins remettre en question certains choix dans ta carrière. Le départ de Nice, où tu ne t’entendais absolument plus avec celui qui a fait de toi un champion olympique, Fabrice Pellerin. Le choix de Bob Bowman, aux Etats-Unis. Le retour à Mulhouse… « Je suis content de toutes les décisions que j’ai prises, elles sont arrivées à point nommé, conclut Agnel. C’était soit je prends cette décision, soit c’est ma santé qui était en péril. Partir aux Etats-Unis m’a sauvé. Ensuite, tout a été logique. J’ai rencontré des gens formidables et vécu des moments formidables. »

Au-delà du nageur, Agnel est un homme intelligent, complexe et intéressant. Et c’est aussi ça qui va nous manquer.