Euro 2016: Avant France-Portugal, bienvenue dans la ville la plus portugaise de l'hexagone
FOOTBALL•Grosse effervescence, dimanche, à Cerizay dans les Deux-Sèvres, petite commune d'à peine 5000 habitants qui accueille quelque 1800 personnes portugaises ou d'origine portugaise...David Phelippeau
A Cerizay,
Aldo Pereira, le cogérant du bar « Le Madérien », est un homme discret. Ce dimanche midi, chose inhabituelle, une caméra et deux micros de radio nationale tournent autour de son café. Alors, vous êtes le cousin lointain de Cristiano Ronaldo ? Aldo s’agace gentiment. La presse locale a relayé cette information. « Ma mère est une cousine de la tante de Ronaldo», finit-il par avouer. Mais, l’essentiel est ailleurs pour lui. Ce dimanche soir, la France et le Portugal, ses deux pays, vont s’affronter en finale de l’ Euro.
Cerizay, plus de 20 % de personnes d’origine portugaise
Un moment spécial pas seulement pour Aldo, mais aussi pour de nombreux habitants de Cerizay, petite commune des Deux-Sèvres à quelques encablures de la Vendée. Cette bourgade est considérée comme la ville la plus portugaise de France. Sur 4 800 habitants (au dernier recensement de 2013), 1 000 sont Portugais, et il faut sans doute ajouter au moins 1000 personnes qui ont une filiation avec ce pays du sud de l’Europe. Et pour l’anecdote, c’est toujours là-bas que Miss Portugal en France est couronnée.
Alors, ce dimanche midi, devant le bar « Le Madérien », c’est un jour pas comme les autres. Pipas, à Cerizay depuis 2011, fait les cent pas, toujours une bière à la main. Avec sa voix de stentor, il lance quelques « Portouuuuuugal… »
A côté de lui, un touriste anglais semble s’être perdu. « Je suis pour le Portugal, même si j’habite en France », avoue Pipas, qui a même pronostiqué un 2-5 pour la bande à Cristiano.
Tony Da Silva a un baptême, ce midi, mais il n’arrive pas à quitter ses potes. Les pronostics vont bon train. « La France, c’est mon pays, le Portugal, ma patrie. Oui, je suis pour le Portugal. Ce sont mes racines. » Dans la vie de tous les jours, Tony se sent pourtant « Français », mais, ce soir, c’est particulier. Helio, quelques mètres plus loin, est né comme Tony en France. Et comme Tony, ses parents ont rejoint Cerizay pour le travail dans les années 60. La grosse entreprise de carrosserie automobile Heuliez, dont le siège social était à Cerizay, embauchait à tour de bras de la main-d’œuvre à cette époque-là. Helio se sent lui au quotidien « Franco-Portugais », mais, ce soir, son pays de naissance a disparu à ses yeux.
Le coeur d’Aldo balance
« Mon cœur balance, reconnaît, de son côté, Aldo, le cogérant du bar « Le Madérien » qui ne désemplit pas. Mon âme est en France, mon cœur est portugais. » Lui aussi est venu se perdre dans les Deux-Sèvres avec ses parents en raison du travail, mais aussi « pour fuir la dictature et chercher quelque chose de meilleur en France ».
José Pereira, l’autre cogérant du bar, a lui aussi une anecdote qui attire les micros. « J’ai joué, quand j’étais gamin, avec Cristiano Ronaldo dans la rue de mon quartier. C’est ma mère et ma tante qui m’ont raconté ça. » Les souvenirs sont très vagues pour José. Tout juste concède-t-il qu’il devait perdre souvent contre le futur génie.
En attendant, ce dimanche midi, Français, Portugais ou Franco-Portugais (très nombreux) attendent dans la bonne humeur la finale. Et beaucoup n’excluent pas de se retrouver dans la rue principale de la commune sous les coups de minuit pour faire la fête ce soir, peu importe le résultat. Pipas y sera. « Si c’est le Portugal tant mieux, mais si c’est la France qui gagne, je serai là aussi… » Et il aura sans doute toujours une bière à la main.