RUGBYJonah Lomu «souffrait tout seul», raconte Christophe Dominici

Jonah Lomu «souffrait tout seul», raconte Christophe Dominici

RUGBYLe légendaire joueur s'est éteint mercredi à l'âge de 40 ans...
Jonah Lomu lors du match entre la France et la Nouvelle-Zélande en 1999.
Jonah Lomu lors du match entre la France et la Nouvelle-Zélande en 1999. - JEAN-LOUP GAUTREAU / AFP
Romain Baheux

Propos recueillis par Romain Baheux

Il fait partie de ceux qui ont un jour défié le mythe. Très touché par la mort de Jonah Lomu mercredi, Christophe Dominici raconte son ancien adversaire. L’ancien ailier des Bleus avait appris à le connaître loin des terrains où l’ex-joueur des All Blacks, emporté par une maladie rénale, l’a marqué par sa gentillesse.

Qu’est ce que le décès de Jonah Lomu fait remonter en vous ?

Quand tu connais les gens, que tu as joués contre eux et parlé avec eux, tu as plusieurs sentiments qui te viennent. Tu ressens de la tristesse, de la douleur et aussi de la colère. Tu te dis que tu aurais pu l’appeler plus souvent, prendre plus de ses nouvelles… Moi, si j’ai une image à retenir de ce garçon, c’était sa gentillesse. Il était très timide et avait beaucoup de pudeur, ce qui peut sembler paradoxal au regard de l’athlète qu’il était.



Vous parliez de quoi en dehors des terrains ?

Il y avait beaucoup d’affection entre nous. Il ne devait pas comprendre qu’un petit mec comme moi puisse joueur au rugby. Moi, j’avais beaucoup d’admiration pour lui. Il fait partie des gens qui te marquent à vie. ll ne me parlait pas de sa maladie, et je n’osais pas aborder le sujet. Il avait beaucoup de pudeur, il souffrait tout seul.

« Au revoir Jonah #RIPJonah pic.twitter.com/PlhK80Aciw — christophe dominici (@christophedomi) November 18, 2015 »

Ça représentait quoi de jouer contre lui ?

Le premier sentiment que tu avais, c’était de la peur. Cette peur te transcendait et ça permettait de te dépasser. Il tirait le rugby vers le haut car il forçait tout le monde à être un niveau incroyable pour se mesurer à lui. Sans cette obligation de se sublimer, on n’aurait peut-être pas eu cette victoire de la France sur la Nouvelle-Zélande en 1999.



En quoi a-t-il révolutionné le rugby ?

Il a transporté ce sport dans une autre dimension. Il avait une capacité d’explosivité assez exceptionnelle. Des garçons qui sont grands, costauds et qui courent vite on en a, mais la différence, c’était son jeu de jambes et ses appuis uniques.

Pourquoi est-il le seul mythe de ce sport ?

Il a marqué des essais assez exceptionnels, qui sont entrés dans l’imaginaire des gens. Unique, c’est un petit mot pour qualifier ses exploits. Ses essais, il les a marqués dans des moments importants, comme des demi-finales de Coupe du monde (contre l’Angleterre en 1995). Vous en trouverez des garçons pour marquer de très beaux essais, vous en trouverez moins pour le faire quand le monde entier les regarde. Il était la personne qui faisait entrer le match dans une autre dimension. Je pense aussi que son attitude marquait les gens. Il était toujours gentil. Beaucoup de joueurs le cherchaient, il aurait pu faire très mal en mettant des coups de poing, mais il s’est toujours contenu.

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On a souvent essayé de lui trouver un successeur. La quête est vaine ?

On tente toujours d’identifier quelque chose à l’exception, c’est humain d’essayer de chercher à retrouver ce qui t’a fait rêver. On aura certainement de très grands joueurs, mais il va falloir que le mec soit sur une autre planète pour aller le chercher tant sur le plan émotionnel que sportif.