FOOTBALLMondial 2014: «Tous les Brésiliens veulent compléter leur album Panini!»

Mondial 2014: «Tous les Brésiliens veulent compléter leur album Panini!»

FOOTBALLDes millions de Brésiliens se retrouvent dans les rues pour échanger leurs images…
Une jeune brésilienne échange des images Panini dans une rue de Rio de Janeiro.
Une jeune brésilienne échange des images Panini dans une rue de Rio de Janeiro. - CORENTIN CHAUVEL
Corentin Chauvel

Corentin Chauvel

De notre correspondant à Rio de Janeiro

«Mon image préférée? C’est celle de Marcelo, il est trop beau». Assise dans la rue sur un petit cageot en bois, Ana Beatriz, 9 ans, a séché l’école pour se poster près d’un centre commercial situé en face de la plage de Botafogo. Devant elle, un carton sur lequel est posé un dossier énorme comportant des milliers de vignettes qu’elle échange ou vend aux nombreux Brésiliens pris dans la tourmente de l’album Panini de la Coupe du monde.

Depuis sa parution il y a quelques semaines, c’est une véritable folie au Brésil: environ huit millions de collectionneurs et 40 millions d’images imprimées chaque jour localement. Enfants comme parents s’arrachent les vignettes des différentes équipes du Mondial. Elaine, 44 ans, en est un bon exemple. Elle profite de sa pause déjeuner pour échanger des images pour son fils: «Mais je dois aussi en trouver pour d’autres membres de ma famille et des collègues, on a d’ailleurs une salle spécialement dédiée aux albums Panini au bureau!»

Une revente fructueuse

Ana Beatriz est également confrontée à une majorité d’adultes, tel ce vieil homme à qui elle propose une image pour 3,50 euros, qu’il rejette immédiatement de la main avant de s’éloigner. La jeune fille ne se laisse pas faire, accompagnée d’un «collègue» âgé de plusieurs décennies de plus qu’elle. Elle dit gagner «beaucoup» d’argent, qu’elle reverse ensuite à sa mère.

Et de l’argent, il y en a en effet à se faire. Luiz Alberto, un étudiant installé à quelques mètres avec son carton et ses albums, a d’abord complété le sien avant de se lancer dans le marché de la vignette Panini. «J’ai gagné plusieurs milliers d’euros en deux mois, alors que le salaire minimum au Brésil est d’environ 250 euros», se réjouit-il, précisant qu’il se servira de ses bénéfices pour payer son université de droit. Parce que certains Brésiliens sont prêts à débourser plus que le prix de base de l’image (environ 5 centimes d’euros) pour finir leur album au plus vite -un Neymar peut valoir jusqu’à 7 euros -.

Valeria, images à la main, confirme: «Il ne reste plus qu’un jour aux Brésiliens pour compléter leur album, tout le monde veut l’avoir fini pour le Mondial! Après, les matchs vont commencer, les gens auront complété leurs albums et il n’y aura plus personne pour échanger de vignettes.» Mais si l’échange est toléré, la vente semble déranger plus les autorités. Luiz Alberto doit changer fréquemment de spot quand la police décide de chasser cette activité non règlementée. Le centre commercial voisin a d’ailleurs décidé d’installer un stand officiel d’échange de vignettes à l’intérieur de son bâtiment afin d’éviter le marché noir devant ses portes.

Un loisir peu onéreux

Mais rien ne pourra arrêter les chercheurs d’images de compléter leur quête. Outre l’adoration du football, les Brésiliens expliquent cette fièvre Panini par plusieurs raisons. Pour Luiz Alberto, ses compatriotes «n’ont pas beaucoup de choses pour (se) divertir sans dépenser beaucoup d’argent». «Le cinéma est cher, le trajet en bus pour aller à la plage est cher, alors que les images Panini, cela réunit tout le monde pour 5 centimes chacune [il en faut tout de même 640 pour remplir l’album entier, soit environ 32 euros], de l’avocat au médecin en passant par l’ouvrier et même le sans-abri», ajoute l’étudiant.

Pour Lara, autre marchande de 21 ans qui n’aime pourtant ni le foot ni les albums Panini, il y a l’idée de collectionner, d’offrir, mais aussi de revendre cet objet qui prend de la valeur avec les années. Le Mondial se déroulant au Brésil cette année, l’édition 2014 sera d’autant plus collector. «Cela augmente la popularité de cette activité, c’est certain», conclut Valeria. D’ailleurs, l’album qu’elle tient précieusement dans la main, c’est son premier, à 42 ans.