FAKE OFFOui, la LDH a antidaté une décision du Conseil d’État sur les retraites

Retraites : Après un cafouillage, la Ligue des droits de l’homme s’excuse et fustige la réforme

FAKE OFFCe week-end, la Ligue des droits de l’homme a partagé un « avis très négatif » du Conseil d’État, qui n’était pas si récent
Lina Fourneau

Lina Fourneau

L'essentiel

  • Ce week-end, la Ligue des droits de l’homme (LDH) a partagé un article à propos d’un avis « très sévère » du Conseil d’État sur la réforme des retraites.
  • Mais l’article a été antidaté. Publié en 2020, l’article concerne une réforme antérieure du gouvernement. La LDH a supprimé la publication et présente ses excuses.
  • Toutefois, l’association reste sceptique face à l’actuelle réforme des retraites. Sa vice-présidente Marie-Christine Vergiat explique pourquoi à « 20 Minutes ».

La réforme des retraites faisait son entrée ce lundi au sein de l’Assemblée nationale. Dans l’hémicycle comme dans la rue, le projet de loi du gouvernement continue de faire débat. Ce week-end, la Ligue des droits de l’homme (LDH) a également pris part aux discussions en partageant sur ses réseaux sociaux un « avis très sévère » du Conseil d’État sur le projet de la réforme des retraites avec, en lien, un article paru dans Les Échos. « La LDH appelle à se joindre au front syndical uni pour faire obstacle à cette régression inacceptable », ajoutait la publication.



Dans les colonnes du média spécialisé en économie, le journaliste y explique que la plus haute juridiction du pays, le Conseil d’État, a rendu un jugement négatif sur le projet de réforme des retraites amené par le gouvernement. Mais l’article date en réalité du 24 janvier 2020 et la réforme des retraites n’avait alors rien de celle débattue actuellement entre les députés. Il y a trois ans, le projet concernait le passage des 42 régimes à un régime unique à points. Contactée par 20 Minutes, la Ligue des droits de l’homme reconnaît une erreur et la publication a depuis été supprimée.

« Un véritable déni de démocratie »

Au sein de la LDH, la réforme des retraites reste un sujet de préoccupation, tant sur le fond que la forme. « Inacceptable dans son contenu, cette réforme interroge également en termes de méthode, la procédure annoncée constituant un véritable déni de démocratie si le gouvernement va jusqu’au bout de ce qu’il a annoncé », expliquait déjà un communiqué publié le 17 janvier dernier 2023.

Pour sa vice-présidente Marie-Christine Vergiat, interrogée par 20 Minutes, il faut interroger la méthode démocratique utilisée actuellement par le gouvernement, notamment avec l’utilisation du PLFSSR (Projet de loi de financement rectificatif de la Sécurité sociale) ainsi que la loi du 47-1. Pour rappel, cet article de la constitution accélère nettement l’examen du projet de loi. « Si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans le délai de quarante jours après le dépôt d’un projet, le gouvernement saisit le Sénat qui doit statuer dans un délai de quinze jours », stipule l’article 47 de la Constitution. « C’est un problème pour la démocratie et la démocratie sociale en particulier », fustige Marie-Christine Vergiat.

Une accumulation de la précarité

La Ligue des droits de l’homme accuse également la réforme actuelle d’aggraver les inégalités déjà existantes. « Depuis quelque temps, on remarque des déséquilibres par le haut, mais aussi par le bas. Les riches sont de plus en plus riches et, inversement, les pauvres de plus en plus pauvres ». L’association alerte sur le sort des plus précaires. « Pendant de nombreuses années, les plus pauvres tenaient sur un socle parce que le filet de protection sociale français semblait encore marcher ». Mais depuis le début de la crise sanitaire, Marie-Christine Vergiat remarque un changement brutal dans la société.

Sur le fond, il y aurait donc un très mauvais timing, selon la LDH. « Au moment où inégalités et la précarisation augmentent, proposer une réforme des retraites risque de détruire l’État social et la protection sociale au sens large du terme », met en cause Marie-Christine Vergiat qui énumère d’autres obstacles déjà rencontrés par le passé. « Il y a déjà eu la réforme du chômage ou la réforme du Code du travail. Nous nous apercevons que tous ces éléments fondamentaux s’aggravent ».

Des carrières mises en difficulté

Or, certains sont d’autant plus concernés par l’augmentation des inégalités. « Quand on touche au système de protection sociale qui garantit des minimaux à tout le monde, certains se retrouvent dans le trou dans le filet ». Parmi eux, Marie-Christine Vergiat cite par exemple les carrières intermédiaires. « Ce n’est pas seulement les petites retraites, mais aussi les retraites incomplètes qui vont continuer à se retrouver en difficulté par rapport au système global de retraites ».

D’autres sphères de la société sont également délaissées par la réforme, accuse la LDH, notamment les métiers avec une forte pénibilité. « Nous savons que plus on augmente l’âge de départ à la retraite, plus la mortalité et l’arrivée d’âge à la retraite en bonne santé sont fragilisées. Ils ont très peu de chance soit d’arriver à la retraite ou s’ils y arrivent – d’être en bonne santé ». Les femmes semblent également être les grandes oubliées de la réforme, d’après Marie-Christine Vergiat. D’après le dernier rapport d’impact du projet de loi gouvernemental, elles devront en effet repousser leur départ à la retraite de sept mois en moyenne, contre cinq pour les hommes.


Notre dossier sur la réforme des retraites

Alors qu’une nouvelle journée de grève s’organise ce mardi, la Ligue de droits de l’homme continue d’appeler à la mobilisation aux côtés des organisations syndicales. « Tout ça est contraire aux principes démocratiques qui nous sont chers et on considère que ce sont des mesures d’injustice sociale », conclut Marie-Christine Vergiat.