D’où vient l’expression « for intérieur », et que veut-elle dire ?
Français•D’où vient l’expression « for intérieur » ? Ce terme a une longue histoire… Et une orthographe bien particulièreFrédéric Henry pour 20 Minutes
L'essentiel
- «For intérieur » est une expression qui vient du latin.
- Elle a d’abord eu un sens religieux.
- Elle désigne aujourd’hui les pensées intimes.
«En son for intérieur » est une expression que tout le monde connaît. Elle est pourtant troublante, puisqu’on y trouve le mot « for », qui n’existe nulle part ailleurs dans la langue française. Pour y voir plus clair, étudions l’étymologie et le sens de cette expression mystérieuse.
Des racines romaines
Cela ne vous surprendra probablement pas : comme bien d’autres mots français, « for » vient du latin. Il est dérivé du mot « forum », lui-même issu de « foris ». Cette évolution est étonnante, puisque « foris » signifiait « dehors » ou « porte ». Le for intérieur serait-il l’extérieur intérieur ? Non, mais presque. Dans la Rome antique, le « forum » était la place du marché et, plus spécifiquement, le lieu où se tenaient les débats publics et relatifs au commerce et à la justice. Le forum était, en quelque sorte, l’ancêtre du tribunal moderne.
De la justice à la conscience
Bien plus tard, au XVIIe siècle, l’Église catholique a repris le terme à son compte : « for » désignait la juridiction ecclésiastique. Et comme il s’agissait de garantir la pureté des âmes, chacun était incité à examiner sa conscience avant de la soumettre au jugement des prêtres. C’est ainsi que l’expression « for intérieur » est apparue : elle évoque le tribunal interne à chacun, le lieu métaphorique où l’on débat avec soi-même de la moralité de ses propres pensées. Par opposition, on a jadis parlé de « for extérieur » à propos de la justice civile, mais ce terme n’a pas survécu.
Le sens moderne du terme
De manière amusante, le mot a donc, peu à peu, glissé de la place publique vers les tréfonds de l’esprit. Aujourd’hui, la dimension religieuse s’est effacée au profit d’une dimension psychologique. On parle souvent de « for intérieur » pour désigner une conviction intime ou une pensée tenue secrète. Le terme est d’ailleurs interchangeable avec « au fond de soi » ou « au fond de son cœur » :
- En mon for intérieur, j’étais convaincu de l’innocence du suspect ;
- En son for intérieur, elle détestait son patron.
Attention à l’orthographe
Peut-être avez-vous déjà lu, sur un forum de discussion, quelqu’un évoquer son « fort intérieur ». Cette graphie est tentante : après tout, c’est à l’abri des murailles de notre fort intérieur que nous débattons avec nous-mêmes. Pourtant, cet usage est totalement fautif : la seule orthographe admise est « for », sans « t ». Et si vous en doutez, sondez votre conscience : en votre for intérieur, vous savez que c’est vrai.
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