Naufrage de l'Erika: La Cour de cassation se penche sur l'annulation de la condamnation de Total
JUSTICE•Elle pourrait décider d'annuler toute la procédure sans renvoi possible...Frédéric Brenon
L'annulation pure et simple du procès de l'Erika. C'est la décision extrême que pourrait prendre la cour de cassation à l'issue de l'audience qui se déroule ce jeudi à Paris. Il faudrait pour cela que les dix juges réunis suivent l'avis de l'avocat général, lequel s'est prononcé, à la stupeur générale, pour une «cassation sans renvoi» de l'arrêt d'appel ayant jugé en 2010 Total, la société de classification Rina, le propriétaire et le gestionnaire de l'Erika pénalement responsables de la pollution causée par le pétrolier en 1999.
Indemnisations pas menacées
Pourquoi ce possible revirement? Parce que le jugement a été «prononcé par une juridiction incompétente», selon l'avocat général, dans la mesure où l'Erika était un navire étranger se trouvant hors des eaux françaises au moment de son naufrage. De fait, toute poursuite pénale serait abandonnée, y compris à Malte, Etat où l'Erika battait pavillon, du fait de la prescription. Cela ne remettrait pas en cause, en revanche, les 200,6 millions d'euros de dommages et intérêts déjà versés aux collectivités et associations parties civiles. Pas plus que les 200 millions d'euros dépensés par Total pour le nettoyage des plages.
Vive inquiétude des victimes
«Une telle décision serait incompréhensible et d'une grande injustice, s'insurge Jacques Auxiette, président de la région Pays de la Loire. Quand un bateau se casse et souille 400 km de côtes françaises, la justice française n'aurait pas le droit de juger! La justice se déconnecterait de la société. Elle perdrait tout crédit auprès de nos concitoyens». «Ce serait quarante ans de droit à l'environnement mis part terre et, surtout, une incitation terrible à l'insécurité. La jurisprudence serait désastreuse», s'alarme l'avocate Corinne Lepage (lire son interview par ici).