Disparus du Costa Concordia: «Ce que leurs parents attendent en premier lieu, ce sont leurs enfants, vivants ou décédés»
INTERVIEW•André Litzler, l'oncle de Mylène, une jeune femme de 23 ans, disparue avec son compagnon lors du naufrage du navire, témoigne pour «20 Minutes»...Propos recueillis par Corentin Chauvel
Mylène Litzler, 23 ans, et son compagnon, Michael Blemand, 25 ans, étaient partis en croisière sur le Costa Concordia. Originaires de Sarcelles (Val-d’Oise), ils ne sont jamais revenus et font toujours partie des derniers disparus du naufrage. Les parents du couple sont en Italie depuis le drame, attendant que les corps de leurs enfants soient retrouvés. André Litzler, l’oncle de Mylène, a contacté 20Minutes pour faire le point sur les recherches.
Quel est le dernier contact que vous avez eu avec Mylène et Michael?
Depuis le soir du naufrage, le 13 janvier. A 23h15, ils ont envoyé un SMS pour nous dire que c’était la panique à bord et qu’ils se dirigeaient vers les canots de sauvetage. Après, plus rien. On se demande ce qu’il s’est passé, parce qu’ils sont parmi les disparus les plus jeunes, ils faisaient de la natation et ils avaient leur gilet de sauvetage. Est-ce qu’ils ont sacrifié leur vie pour d’autres personnes en laissant leur place dans un canot? On ne sait pas, mais les recherches continuent, même s’il n’y a plus qu’une seule équipe, c’est très peu.
Quelles sont les dernières nouvelles que vous avez d’Italie?
La semaine dernière, cinq experts de différents pays, dont la France, sont venus pour apporter leurs techniques de recherche et ont aidé à retrouver huit corps dont celui d’une petite fille sur les quinze disparus restant. Mais, par fierté, les autorités italiennes ont fini par leur dire qu’ils n’avaient plus besoin d’eux, sauf qu’ils n’ont rien retrouvé depuis. Puis jeudi, mon frère a appris qu’un avocat des inculpés avait obtenu l’arrêt des recherches ADN sur les corps. On ne comprend pas cette décision, ça n’a rien à voir avec le procès, les parents sont dans l’inquiétude.
Y-a-t-il un recours possible?
Nous contactons tous les médias en espérant que leur pression fera changer d’avis le tribunal de Grosseto. Au début, personne ne nous a crus, même l’ambassade de France en Italie. A chaque fois, c’est nous qui leur donnons des nouvelles, ce n’est pas normal. Nous sommes des victimes depuis le début, mais c’est nous qui devons tout faire, on doit se battre. On a créé une page Facebook sur laquelle nous avons mené notre propre enquête en faisant des appels à témoins pour comprendre ce qui avait pu arriver à Mylène et Michael. Mais si toutes les familles étaient sur place, ça bougerait plus, il ne reste plus que cinq personnes.
Envisagez-vous des actions en justice?
Mon frère va attaquer Costa Croisières, il est obligé même s’il en veut surtout au commandant et l’entreprise prend tous ses déplacements en charge depuis l’accident. Mais il y a eu un naufrage, il faut qu’ils assument, d’autant plus que l’exercice d’évacuation était prévu pour le lendemain. Il aurait fallu le faire au début de la croisière.
Que pensez-vous de la proposition d’un avocat de victimes américaines d’associer les victimes françaises à l’action judiciaire américaine?
J’ai vaguement entendu cette histoire. On ne s’est pas associé au collectif qu’il a contacté parce que nos proches sont toujours disparus. Mais il est clair que plus on est nombreux, plus la justice prendra effet. Cependant, ce que les parents de Mylène et Michael attendent en premier lieu, ce sont leurs enfants, vivants ou décédés. Après, les dédommagements, ce n’est pas le plus important. Une vie, ça n’a pas de prix, ce n’est pas l’argent qui les fera revenir.