De l'embaumeur au fossoyeur, la mort pour métier

De l'embaumeur au fossoyeur, la mort pour métier

Ils sont thanatopracteurs, employés de funérarium ou fossoyeurs, ...
© 2012 AFP

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Ils sont thanatopracteurs, employés de funérarium ou fossoyeurs, des professionnels de la mort que la société préfère souvent ne pas voir, mais que les organisateurs du festival "Filmer le travail" ont choisi de sortir de l'ombre à travers deux documentaires.

Dans "Un fossoyeur, un jour" de Charlotte Grange, le spectateur est invité à partager le quotidien d'un employé du cimetière de Pantin en Seine-Saint-Denis.

Sébastien Grégoire, un trentenaire dans le métier depuis 11 ans, ne cache pas sa fierté de travailler dans l'un des plus grands cimetières d'Europe avec un million de personnes inhumées.

"Savoir creuser, c'est important", dit-il en maniant sa pelle avec dextérité. "Le boulot, c'est ça. Tout le temps des trous. A faire et à reboucher ensuite bien sûr".

Lors des "exhumations administratives", c'est-à-dire la récupération des concessions périmées, il peut arriver de tomber sur un "corps qui n'est pas tout à fait réduit", encore en décomposition, explique son chef, qui relève que "c'est un métier très difficile aussi bien physiquement que moralement".

A l'image, Sébastien atteint le bois du cercueil. "Il y a de grandes chances que le corps soit entier", pronostique-t-il, voyant que de l'eau s'est infiltrée dans la fosse. Le jeune homme plonge alors sa main gantée dans l'eau saumâtre à la recherche du cadavre. Soulagement, celui-ci est finalement bien "réduit".

Les ossements sont alors extraits un par un et recueillis en vue d'être incinérés. Le jour même, la fosse sera réutilisée pour une inhumation.

"Cela ne tiendrait qu'à moi, je ne ferais pas d'exhumation", explique Sébastien, qui souhaite être incinéré pour qu'on le "laisse tranquille plus tard".

Le jeune employé souligne que les fossoyeurs ont conscience de leurs responsabilités vis-à-vis des familles endeuillées. Lorsqu'ils portent les cercueils, ils évitent ainsi "de montrer que c'est lourd" pour faire "bonne impression", souligne-t-il.

"Il faut bien s'occuper des morts"

Dans son film "Post mortem", Jacques Reboud a choisi de s'intéresser à tous ceux qui manient le corps des morts. Qu'ils le coiffent, le maquillent, l'habillent, l'embaument, l'enterrent ou l'incinèrent.

Le film laisse entendre les bruits du travail de la mort, comme celui métallique des armoires réfrigérantes de la morgue, la fermeture éclair du sac à cadavre ou le brûleur du four crématoire.

Il est entrecoupé de témoignages de personnes qui racontent la mort d'un proche, offrant une forme de "contrepoint", selon le réalisateur.

Un homme raconte par exemple avoir lui-même lavé et habillé le corps de son père, tandis qu'une femme explique s'être sentie dépossédée de celui de sa mère après sa prise en charge par des inconnus.

Dans une scène, un thanatopracteur hérite du corps, très abîmé, d'un vieux monsieur. Après ses efforts, il constate, soulagé: "il est très bien le monsieur par rapport à tout à l'heure".

Une autre coiffe et maquille soigneusement un corps, puis se recule pour admirer le résultat. Elle explique la technique du "point de bouche" permettant de fermer discrètement celle des morts souvent entrouverte.

Une employée du funérarium demande de son côté au téléphone: "au niveau de la crémation, tu as quels créneaux vendredi?", avant de se tourner vers la famille: "vous souhaitez avec hommage ou sans hommage?".

Dans le film de Charlotte Grange, Sébastien conclut, philosophe: "Que tu sois riche ou pauvre, tout le monde arrive au même endroit". Même si c'est "un peu tabou", "il faut bien s'occuper des morts, on est là pour ça".

Les deux documentaires sont en lice pour recevoir un prix dans le cadre de la compétition internationale du festival qui se tient à Poitiers jusqu'à dimanche.

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