Soupçons de fraudes au comité d'entreprise de la RATP: Le point sur l'affaire
POLÉMIQUE•bsence de comptabilité, surfacturations, gaspillage alimentaire: La Cour des comptes a relevé de nombreuses dérives au sein du CE de la RATP. «20 Minutes» fait le point sur l'affaire...Enora Ollivier
Qu’est ce qu’un comité d’entreprise (CE)?
C’est une instance obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés. Elle est composée de l’employeur (ou de son représentant), d’une délégation de salariés élus pour 4 ans, et, éventuellement de représentants syndicaux. Le CE est obligatoirement consulté «sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise et, notamment, sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelle des salariés», note le ministère du Travail.
Le CE dispose d’un budget, attribué par l’entreprise, pour financer des activités sociales et culturelles. Les salariés, leur famille et les stagiaires, peuvent bénéficier de ces avantages.
Comment est composé le Comité d’entreprise de la RATP?
Le CE de la RATP a été créé en 1947. Depuis 1990, il est constitué d’un comité central - le comité régie d’entreprise (CRE) -, et de dix comités d’établissement. Six cents agents au total sont élus. Le secrétaire et le trésorier du CRT, qui exercent leurs fonctions à temps plein, sont des élus CGT.
Quel est le budget du CE?
Selon la Cour des comptes, le CE reçoit une subvention annuelle de l’employeur égale à 3,11% de la masse salariale. En 2009, cela représentait 53 millions d’euros, soit 1.155 euros par salarié. Il s’agit du cinquième CE le plus riche de France.
Quelles sont les dérives observées par la Cour des comptes?
Elles sont nombreuses, et concernent de multiples secteurs.
Qui est responsable de ces dérives ?
Une très mauvaise - voire obscure - gestion des comptes, principalement. «Le CE, échappant à tout contrôle tant interne qu’externe, n’est pas structuré pour fonctionner rationnellement», souligne la Cour. Le CE ne tient aucune comptabilité, ne fait pas certifier ses comptes et ne les publie pas, malgré un budget important. Il dispose d’un simple cahier sur lequel sont répertoriées les ressources et les dépenses. Mais rien d’illégal à cela: La loi l’y autorise. Cependant, pour la Cour, ce système est «propice au développement de dérives financières».
La Cour note par ailleurs que «les élus, et plus particulièrement le secrétaire et le trésorier, interfèrent dans la gestion quotidienne des activités sociales et culturelles au point de retirer aux responsables des services du CE tout pouvoir d’initiative et de pilotage».
Comment a réagi la RATP?
Dans un communiqué, la direction rappelle qu’elle ne dispose d’aucun pouvoir pour contrôler son CE. Elle dit «se réjouir d’une plus grande transparence des comptes des organismes sociaux qu’elle finance au profit de tous» et reconnait que «les règles actuelles de gouvernance du Comité d’Entreprise ne sont pas satisfaisantes».
Et les membres du Comité d’entreprise?
Le CE dénonce «un véritable réquisitoire à charge» de la Cour des comptes. Dans un communiqué, les élus «récusent avec la plus grande fermeté les insinuations de malversation destinées à tenter de jeter le discrédit sur l’action du CRE lui-même».
Quelles seront les suites judiciaires?
La Cour des comptes a transmis en juillet le dossier à la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) qui s’est saisie de l’affaire. Une enquête préliminaire pour des faits présumés d’«abus de confiance» et de «mise en danger de la vie d’autrui» a été ouverte, le 5 septembre. La Cour des comptes a quant à elle demandé ce mardi «la saisine du garde des Sceaux pour ouvrir une enquête pénale».
L’affaire du CE de la RATP est-elle un cas isolé?
Non. Le comité d’entreprise d’EDF-GDF, appelé Caisse centrale d’activités, a été visé par une enquête, en 2007, et son ancien président a été mis en examen, rappelle Le Parisien. Le CE était soupçonné de faux, usage de faux, escroquerie et abus de confiance. Toujours en 2007, une enquête pour malversations a visé le CE d’Air France. Le CE de la SNCF, celui de France Télécom, ou encore d’Euro Disney ont également été suspectés de mauvaise gestion de leurs compte.