A Paris, l'insalubrité a diminué, mais touche encore les plus précaires
•Six ans après un incendie qui avait fait 17 morts dans un immeuble ...© 2011 AFP
Six ans après un incendie qui avait fait 17 morts dans un immeuble vétuste à Paris, l'insalubrité et le logement indigne ont décru dans la capitale, mais sans disparaître, les familles les plus précaires étant parfois à la merci de propriétaires peu scrupuleux.
C'est le cas de Malika, 38 ans, qui vit avec son compagnon et leurs quatre enfants de 18, 10, 5 et 2 ans, dans 22 m2, au 5e et dernier étage d'un immeuble du 17e arrondissement, pour 700 euros par mois.
Chez elle, les murs sont couverts de moisissure, les meubles pourris par l'humidité, l'électricité n'est pas aux normes, l'aération ne fonctionne pas, tout comme certains radiateurs: "L'été c'est un hammam, l'hiver la Sibérie", explique-t-elle à l'AFP.
Mais son propriétaire, estimant que cette dégradation du logement est due à la surpopulation, ne veut pas entamer de travaux. Et Malika, qui a fait "depuis 11 ans une demande de relogement auprès de la Ville de Paris", attend, dans la crainte qu'un court-circuit ne mette le feu à son appartement.
"Même si un arsenal juridique existe, c'est parfois difficile de faire valoir ses droits", reconnaît Samuel Mouchard, à l'Espace solidarité habitat de la fondation Abbé-Pierre, qui accompagne la famille.
Selon lui, "il y a une poche", constituée de chambres de bonnes et logements inférieurs à 9 m2, "difficile à identifier", car les occupants, "fragiles, précarisés", sont "souvent intimidés par leur propriétaire et ne viennent pas se plaindre".
"Il demeure des conditions de logement dégradées, car l'habitat parisien, très concentré et pas forcément bien assaini, se prête plus qu'ailleurs à l'insalubrité", complète Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de l'association Droit au logement (Dal), qui rappelle que des arrêtés d'insalubrité ou de péril sont régulièrement pris par la préfecture de Paris.
Selon un rapport de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme (IAU), paru en mai, 174.600 logements privés étaient potentiellement indignes en Ile-de-France (chiffres 2007), dont 166.000 à Paris.
"Ces logements sont en partie détenus par des marchands de sommeil aux pratiques spéculatives (...) mais aussi des bailleurs impécunieux ou négligents, incapables de faire face à leurs obligations et peu incités à le faire par un marché où tout se loue", souligne l'IAU.
Pourtant, la Ville de Paris a lancé en 2001 un plan contre l'insalubrité. "Nous avions alors recensé 1.030 immeubles insalubres. Aujourd'hui, l'affaire est en voie d'achèvement", explique Jean-Yves Mano, adjoint chargé du logement.
Au total, 935 immeubles sont "sortis de l'indignité, 69 sont en cours de travaux ou de relogement des occupants et 26 sont encore à traiter", précise Audry Jean-Marie, de l'Atelier parisien d'urbanisme (Apur), qui gère l'observatoire de l'insalubrité, dont la mission vient de s'achever.
Pour 655 immeubles, les copropriétaires ont été aidés financièrement pour engager des travaux. Les autres ont fait l'objet d'une appropriation publique par la Ville de Paris, pour les rénover ou les détruire et "construire du logement social", ajoute M. Mano.
Selon Romain Levy, le président de la Siemp (Société immobilière d'économie mixte de la Ville de Paris), opérateur qui s'était vu confier 434 immeubles, "la mission de traitement de l'insalubrité à Paris est en voie d'achèvement, mais il y a toujours des immeubles qui basculent, environ cinq par an".
Pour "prévenir la dégradation des immeubles anciens", un nouvel observatoire a été créé, toujours confié à l'Apur.
En croisant plusieurs indicateurs (concentration de petits logements locatifs, factures d'eau de l'immeuble impayées, mises en demeure pour insalubrité, péril ou sécurité incendie, etc.), il a repéré, en 2010, 328 immeubles "fragiles" sur les 50.000 du parc privé parisien.