Attentat de Karachi: Les familles des victimes ont porté plainte contre l'ex-juge Bruguière
JUSTICE•Leur avocat, Me Olivier Morice, a annoncé ce mercredi avoir déposé plainte vendredi 10 juin pour faux témoignage et entrave à l'exercice de la justice contre l'ex-juge antiterroriste...B.D. avec AFP
Les familles des victimes de l'attentat de Karachi ont porté plainte vendredi 10 juin pour faux témoignage et entrave à l'exercice de la justice contre l'ex-juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière, a indiqué ce mercredi à l'AFP leur avocat, Me Olivier Morice, confirmant une information du Monde. Le juge Bruguière, qui a quitté la magistrature en 2007 et a brigué en vain un siège de député pour l'UMP la même année, a été chargé de l'enquête sur l'attentat du 8 mai 2002 au Pakistan, qui avait tué 15 personnes dont 11 salariés français de la Direction des constructions navales (DCN), entre 2002 et 2007.
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Selon le site du journal, Me Morice a également saisi le ministère de la Justice, à qui il avait déjà demandé le 27 avril l'ouverture d'une enquête disciplinaire. L'avocat des familles des victimes s'appuie selon Le Monde sur «un nouvel élément apparu dans l'enquête» pour accuser l'ancien juge antiterroriste. Ce dernier n'aurait «pas coté au dossier d'instruction des pièces essentielles, notamment au rapport rédigé après l'autopsie de l'homme soupçonné d'avoir fait sauter le bus de la direction des constructions navales le 8 mai 2002».
Le Monde rappelle également que le 25 mars dernier, Dominique Lecomte, la patronne de l'Institut médico-légal de Paris (IML) avait assuré au successeur du juge Bruguière dans la conduite de l’enquêtele, le juge Marc Trévidic, avoir remis le 7 juillet 2002 le rapport à l'ancien juge antiterroriste, qui le lui aurait réclamé «avec insistance». Jean-Louis Bruguière, entendu à son tour comme témoin le 16 mai, n'avait pas pu expliquer pourquoi le rapport ne figurait pas au dossier. Il avait affirmé ne pas avoir obtenu le rapport en question.
La théorie du terroriste kamikaze mise à mal
Un nouveau témoignage, recueilli le 8 juin, émanant du Dr Walter Vorhauer, l'expert qui avait accompagné Dominique Lecomte à Karachi pour l'autopsie, semble pourtant contredire cette version. En effet, Walter Vorhauer assure que le rapport d'autopsie lui avait bien été demandé par Jean-Louis Bruguière. Il affirme également que l’original du rapport avait été déposé au secrétariat de ce dernier le 2 juillet 2002 par coursier et il a fourni le justificatif de remise du pli à Marc Trévidic.
Selon le rapport, l'autopsie montre que «le sujet se trouvant près du foyer de l'explosion se trouvait en position debout», indique l'AFP. Pour Me Morice, cet élément «exclut qu'il y ait pu avoir quelqu'un conduisant le véhicule» qui a explosé contre le car transportant les employés de la DCN. Or, selon la version officielle, l'attentat a été perpétré par «un terroriste kamikaze au volant d'une Toyota».
Ainsi, «durant toutes ces années, une véritable désinformation a été orchestrée aux fins de faire croire que cet attentat avait été réalisé sous forme d'attentat suicide», explique Me Morice à l'AFP. Après avoir longtemps privilégié la thèse islamiste, les enquêteurs sont lancés depuis 2009 sur la piste d'un mobile financier pour expliquer l'attentat, aujourd'hui imputé à des militaires pakistanais. Leur mobile aurait été de se venger du non-paiement de commissions, sur fond d'affaire de corruption en France.
Plusieurs enquêtes financières ouvertes en marge du dossier criminel ont montré que le versement de 84 millions d'euros de commissions avait été convenu en marge du marché des sous-marins au Pakistan. Plusieurs dizaines de millions pourraient être revenus en France financer la campagne présidentielle d'Edouard Balladur, soupçonnent les juges. Edouard Balladur, dont le porte-parole de campagne était Nicolas Sarkozy, nie ces faits.