Front national: Au nom du père et de la fille
REPORTAGE•La succession du «Vieux lion» s'est faite tout en douceur...Vincent Vantighem
De notre envoyé spécial à Tours,
L’étreinte fut sincère mais furtive. Désignée, dimanche matin, présidente du Front National par 67% des voix à l’issue d’un vote interne, Marine Le Pen a serré son père dans ses bras. A peine une seconde… Ce n’était pas un instant de relâchement. Ni même l’expression de sa gratitude. Juste l’illustration de sa stratégie: capitaliser sur l’héritage du père tout en se détachant de ses côtés les plus sombres. Le but est désormais connu: «Faire du FN un parti renouvelé, ouvert et efficace. Le premier outil dans notre stratégie de conquête du pouvoir.»
«Le choix de 2012 sera simple!»
Et ce scrutin interne n’en était que la première étape. Adoubée par deux tiers des militants, l’avocate de 42 ans a réalisé le résultat parfait. Un score plus élevé aurait favorisé le risque de scission avec la frange la plus dure du parti. Un score plus serré aurait contraint ses marges de manœuvre. Après 38 années d’existence, le Front National a donc dû attendre son XIVe congrès à Tours pour découvrir qu’il pouvait avoir un «autre» président. Elu dans un isoloir et non pas «par acclamation». La machine à fantasmes est en marche. Il ne reste plus qu’à changer le prénom sur les affiches.
Car le projet, lui, ne varie pas d’un iota. «La situation de la France est grave, a estimé la nouvelle présidente, ce dimanche après-midi, dans un discours de précampagne. La Nation est démoralisée. Beaucoup de Français font le constat de n’être plus chez eux en France. Le Front National incarne l’esprit de résistance à l’islamisme, au mondialisme et à l’européisme! Le choix de 2012 sera simple.»
Marine compte encore sur son père
Assis sur scène derrière elle, Jean-Marie Le Pen a bu du petit lait pendant une heure. A 82 ans, le «Vieux lion» ne pensait pas que le passage de la flamme tricolore serait aussi simple. Roger Holeindre, ancien résistant et figure du FN, a bien démissionné avec fracas; Bruno Gollnisch, candidat malheureux à sa succession, a bien refusé le poste de premier vice-président. Mais ce ne sont que des moindres maux dans un parti habitué aux actes de haute trahison. «Foin de regrets, le passé fut si beau», lâche ainsi l’ex-Président.
Et l’avenir s’annonce radieux. Bombardé président d’honneur, le patriarche garde un pied dans toutes les instances du parti. Et surtout, il sait que sa fille compte sur lui. «Bien sûr que je vais lui demander conseil. Il a été cinq fois candidat à la présidentielle. C’est une certaine expérience…»