LOGEMENTLoppsi 2: La menace pèse sur les habitants des yourtes

Loppsi 2: La menace pèse sur les habitants des yourtes

LOGEMENTUne disposition de la loi sur la sécurité intérieure va à l'encontre des habitats alternatifs...
Corentin Chauvel

Corentin Chauvel

Les habitants des yourtes sont-ils menacés? D’après l’article 32 ter A de la loi Loppsi 2, dont la deuxième lecture au Sénat doit avoir lieu ce mois-ci, un préfet pourra, sans décision de justice et sous 48h, faire évacuer un terrain en cas «d'installation illicite en réunion (...) comportant de graves risques pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques».

Or les yourtes, tout comme les caravanes, roulottes, tipis et autres habitations de fortune, font partie des logements «illicites» car ils ne disposent pas de permis de construire. Mauvaise nouvelle donc pour cet habitat alternatif, qui remporte un franc succès, d’après Laurence, qui gère le campement «Yourtes Découverte» dans les Cévennes.

Une solution d’habitat fixe dont les prix atteignent 10.000 euros

Contactée par 20minutes.fr, elle confie tous les avantages de la yourte, conçue à l’origine par les tribus nomades d’Asie Centrale: «Une yourte, c’est aussi une solution d’habitat fixe parce que le foncier a augmenté et c’est une réponse qui s’adapte au mouvement écologique». En effet, le logement, qui peut atteindre une trentaine de mètres carrés, est fait de bois et de toiles en coton. Son coût varie de 2.700 euros (mais d’une «qualité déplorable» selon Laurence) à 10.000 euros pour une yourte de qualité et intégralement fabriquée en France. En revanche pas de sanitaires (à part des toilettes sèches), sauf si le terrain aménagé répond aux normes qui permettent d’accueillir un bâtiment en plus pour y intégrer une douche par exemple.

Pour l’heure, le campement de Laurence, qui accueille «un public curieux et très proche de la nature», n’est pas menacé car il se présente «sous la forme d’un camping». Mais cela ne l’empêche pas d’être solidaire avec le mouvement de lutte contre la loi Loppsi 2 mené par des associations promouvant l’habitat alternatif. «Je pense aux autres qui n’ont pas beaucoup de choix et pour qui la yourte représente la seule solution», clame Laurence.

La yourte, «ça n’a rien d’une menace terroriste!»

La Cévenole estime que l’article controversé, un seul parmi de nombreux autres dans d’autres domaines, «vise une certaine frange de la population et avec cette loi, on va pouvoir les dégager comme on veut». C'est en effet ce que dénonce un collectif d'associations parmi lesquelles le Droit au logement, Jeudi Noir, la Ligue des droits de l'homme et le syndicat Solidaires qui considère que ce sont avant tout les «habitants de bidonvilles, d'habitations de fortune, de campements de sans abris», et notamment les Roms, qui sont en ligne de mire.

Ainsi, pour Tom, l’un des responsables de l’association «Libertente», qui œuvre pour «la réalisation artisanale de yourtes et de tipis», les habitants des yourtes n'ont pas à s'en préoccuper. Joint par 20minutes.fr, il estime que la loi Loppsi 2 «n’est pas une menace du tout» pour les habitats alternatifs parce que, selon lui, «elle ne sera pas appliquée, ou alors, en dernier recours, en cas de conflit ou de situation ambigüe». «La yourte n’a jamais été autorisée donc je ne comprends pas les réactions dans le milieu associatif, moi j’attends de voir la donne», explique Tom.

Pour autant, le jeune homme regrette que l’article incriminé puisse tout de même avoir un impact sur le développement de l’habitat alternatif: «Cela peut empêcher les gens de se lancer, alors que la yourte, ce n’est pas comme une tente, c’est vraiment vivable, avec une ambiance particulière, ça n’a rien d’une menace terroriste!»