Karachi: les familles des victimes vont porter plainte contre Chirac et Villepin
JUSTICE•Après un nouveau témoignage explosif...Catherine Fournier
Les révélations se succèdent dans l’affaire Karachi. A la suite d’un nouveau témoignage recueilli par le juge Renaud Van Ruymbeke et publié par le Nouvelobs.com et Médiapart (article payant) ce vendredi, les familles de victimes vont porter plainte pour homicide involontaire et mise en danger de la vie d'autrui, a indiqué leur avocat Olivier Morice au Nouvel Observateur. Dans le collimateur, Jacques Chirac et Dominique de Villepin.
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Alors que l’ex-ministre de la Défense, Charles Million, aurait confirmé l’existence de rétrocommissions versées à des hommes politiques, en 1994 et 1995, contre l’achat de sous-marin au Pakistan, un nouveau témoin entendu jeudi par le juge va plus loin et semble confirmer la thèse selon laquelle l’attentat de Karachi est lié à l’arrêt du versement de ces rétrocommissions, selon les deux sites Internet d’informations.
Pour rappel, en 2002, 14 personnes ont été tuées dans un attentat à Karachi, au Pakistan, dont onze Français de la Direction des chantiers navals (DCN) qui travaillaient sur la construction de sous-marins vendus à Islamabad. Dans un premier temps, un acte terroriste avait été évoqué par la justice française. Mais par la suite, le juge antiterroriste Marc Trévidic a privilégié la piste de représailles pakistanaises. En cause, la décision, en 1995, de Jacques Chirac d’arrêter le versement de commissions liées à un contrat de vente de sous-marins au Pakistan.
Les risques auraient été connus
Michel Mazens, qui a été PDG de Sofresa entre décembre 1995 et janvier 2006, a déclaré au juge Van Ruymbeke, selon le procès verbal de son audition publié en partie par Nouvelobs.com et Médiapart, que c'était Dominique de Villepin, alors secrétaire général de l'Elysée, «qui pilotait l'opération» pour faire cesser le versement de rétrocommissions liées à des contrats d’armement en Arabie saoudite et au Pakistan.
Selon lui, quand Dominique Castellan, alors président de la DCNI, a été informé de la volonté de Jacques Chirac de mettre fin à ces versements, il «a réagi en me disant que pour lui c'était compliqué car c'était faire courir des risques à ses personnels. J'ai appris par la suite que M. Castellan s'était fait confirmer ce que je lui avais dit en interrogeant la DGSE».
Les familles «bouleversées»
Ce témoignage met ainsi en cause l’Etat français en général, Jacques Chirac et Dominique de Villepin en particulier, qui aurait été informé du risque encouru par le personnel de la DCNI sur place en cas d’arrêt du versement des rétrocommissions.
Olivier Morice a indiqué au Nouvelobs.com que Sandrine Leclerc et Magali Drouet, filles de victimes de l'attentat de Karachi étaient «bouleversées et scandalisées par ce qu'elles viennent d'apprendre». Et que le juge Trévidic serait saisi en début de semaine prochaine pour homicide involontaire et mise en danger de la vie d'autrui.