INTERVIEWMichel Rocard: «Je ne prendrai pas position sur le PS»

Michel Rocard: «Je ne prendrai pas position sur le PS»

INTERVIEWL'ancien Premier ministre se confie à «20 Minutes»...
Propos recuillis par Matthieu Goar

Propos recuillis par Matthieu Goar

Michel Rocard vient de publier un livre bilan foisonnant*. L'occasion de mettre en perspective l'actualité pour 20 Minutes.

Vous êtes un grand défenseur de la politique du long terme. Le gouvernement a-t-il été trop vite sur les retraites?
Le souci est que le Président ne s'est donné que quatre mois. La Suède a mis dix ans pour mettre d'accord syndicats et patronat sur l'âge de 67 ans. Il faudrait aussi que nos syndicats aiment plus les négociations et que le gouvernement leur propose des compensations. Au final, nous avons fait la grève, perdu du temps et des salaires en débattant sur le symbolique plutôt que sur le réel.

Les remaniements sont-ils des périodes de latence du pouvoir?
Il faut faire en sorte que ça dure le moins de temps possible. Quand François Mitterrand a fait son grand remaniement qui consistait à me vider en gardant les 4/5e du personnel gouvernemental, il m'a demandé ma démission à 9h30 et je lui ai écrit à 12h20. En l'annonçant aussi tôt, Nicolas Sarkozy a voulu instaurer une dose de compétition au sein de l'UMP, mais a sous-estimé la déstabilisation de son gouvernement. Il a fait une faute.

En tant qu'ancien Premier ministre, comment analysez-vous l'évolution de cette fonction?
Chaque binôme de président et de Premier ministre est différent. Reste que les procédures du pouvoir sont à Matignon. Quand le type qui est Premier ministre n'est pas terrorisé, il a un énorme pouvoir. Fillon sait ça. Il sait aussi qu'avec son président, le silence aide et ses silences sont retentissants. D'ailleurs, plus il se tait, plus il est populaire. Ça fait réfléchir sur les divergences entre l'opinion et les médias.

Pourquoi le PS est-il toujours autant divisé sur l'économie de marché?
Il y a trente-cinq ans, le PS était dominé par un vocabulaire marxiste. Ce n'est plus le cas. Martine Aubry remet en ce moment le parti au travail sur la régulation de l'économie, mais ça n'intéresse aucun journaliste.

Quelle est votre opinion sur les primaires de 2011?
Il vaut mieux d'abord choisir un projet politique et ensuite un leader. Les primaires font l'inverse. Je ne prendrai pas position sur le meilleur candidat.

Quels sont vos grands regrets politiques?
Le fait que l'Europe est en train de mourir sous nos yeux est le grand échec de notre époque. L'autre regret est de ne pas avoir réussi à changer le mode de suffrage aux élections régionales. J'ai eu un conflit avec Mitterrand à ce moment-là. Ce n'est peut-être pas un hasard s'il m'a demandé de démissionner juste après.