Police scientifique: Quand les «Experts» français en ont ras-le-bol
SECURITE•Ils ont manifesté ce mardi pour la première fois...Corentin Chauvel
La «vitrine de la police» a sérieusement besoin d’un coup de chiffon. Pour la première fois, plusieurs centaines de policiers scientifiques (entre 400 et 600 selon les syndicats sur 1.500 au total) ont manifesté dans toute la France ce mardi pour exprimer leur «ras-le-bol» face au manque de moyens et d’effectifs, et surtout mettre fin au décalage qui existe «entre l’affichage et la réalité».
«Depuis 2004, tous les ministres de l’Intérieur qui se sont succédé ont affirmé que la police scientifique était la priorité, qu’il fallait passer de la police de l’aveu à la police de la preuve, mais il n’y a aucun moyen derrière», déplore Georges Knecht, secrétaire général adjoint du syndicat Snipat-FO, joint par 20minutes.fr.
«Je ne regarde plus les séries américaines, ça me dégoûte»
«Quand on parle de NCIS à la française, ce n’est pas du tout ça. Je ne regarde plus les séries américaines, ça me dégoûte», réagit un policier scientifique, membre du Syndicat national des personnels de police scientifique (SNPPS), contacté par 20minutes.fr. «On a le minimum, mais on est très en deçà de ce qu’on voit à la télé», ajoute-t-il.
Des rats dans les laboratoires, du matériel obsolète, des policiers scientifiques obligés de se déplacer à pied sur une scène de crime par manque de véhicules… Les exemples démontrant l’envers du décor sont légion. Les nouvelles technologies existent, mais elles sont «dans les services centraux» et utilisées uniquement «pour les affaires les plus importantes», précise-t-on au SNPPS.
Une charge de travail qui a explosé «par deux, par trois, parfois par dix»
«On fait les frais de la rigueur budgétaire», renchérit George Knecht qui veut bien comprendre la rationalisation en cours au sein de la police, «mais sur un domaine aussi important, ce n’est pas là que doivent être appliquées les coupes». Dans le même temps, les policiers scientifiques sont confrontés à «une délinquance de masse» qui a fait «exploser leur charge de travail par deux, par trois, parfois par dix», explique son homologue du SNPPS.
Auparavant, les policiers scientifiques français n’étaient appelés que pour des affaires de moyenne et grande délinquance. Mais depuis une dizaine d’années, «on nous demande de faire des constatations de base même pour des faits mineurs», indique le SNPPS. «On demande de plus en plus à la police scientifique, mais on ne recrute pas», complète Georges Knecht. Et sur le terrain, les conditions se sont également dégradées.
Face aux délinquants, «nous sommes ni armés, ni formés»
S’ils sont bien «identifiés police», ils ne bénéficient pas toujours de la protection adéquate. «Nous sommes visés par les délinquants et nous sommes ni armés, ni formés pour y faire face», précise Georges Knecht qui réclame que «la dangerosité du métier» soit prise en compte. Les syndicats souhaitent ainsi que le statut des policiers scientifiques soit valorisé, qu’ils «soient reconnus comme partie intégrante de la police». A l’heure qu’il est, ils ne sont, dans les textes, non pas des policiers mais des «administratifs».
Face à un ministère de l’Intérieur qui fait la sourde oreille, les policiers scientifiques souhaitent avant tout que leurs revendications, qui rassemblent tous les échelons de la police scientifique, des agents de terrain aux scientifiques dans les laboratoires, soient «écoutées». Avec la mobilisation de ce mardi, «on pense que ça peut faire bouger les choses», espère le SNPPS.