Jérôme Kerviel ne veut pas banquer tout seul
PROCES•Le trader, accusé d'avoir fait perdre 4,9 milliards d'euros à la Société générale, est jugé à partir de mardi à Paris...Charlotte Mannevy avec agence
Il affronte seul les juges, mais tentera de prouver que sa hiérarchie était au courant de ses agissements. Jérôme Kerviel, ancien trader de 33 ans accusé d’avoir fait perdre 4,9 milliards d’euros à la Société générale, comparaît à partir de mardi devant le tribunal correctionnel de Paris. Il encourt cinq ans de prison et 375 000 euros d’amende.
Tempête boursière
Le 18 janvier 2008, alors que les banques du monde entier s’enlisent dans la crise des «subprimes», la Société générale découvrait que le jeune trader, alors âgé de 31 ans, avait pris pour 50 milliards de positions sur les marchés boursiers, positions que la banque décide aussitôt de solder, enregistrant au passage une perte colossale de 6,3 milliards d’euros. Quatre jours plus tard, l’annonce de ce désastre financier provoque une onde de choc sur des places financières déjà fragilisées.
Poursuivi pour «abus de confiance, faux et usage de faux et introduction frauduleuse de données dans un système informatique», l’ancien trader plaidera pourtant la relaxe.«Sa défense est un vrai défi, parce qu’on assène depuis deux ans une unique vérité, où un homme seul aurait pu engager pour 800 milliards d’euros au nom de la banque sans que personne ne voie rien!», s’insurge Me Olivier Metzner. «Nous allons démontrer que tout ce qui était opéré par Jérôme Kerviel était visible», ajoute ce ténor du droit pénal financier, avocat du jeune homme depuis la fin de l’instruction conduite par le juge Renaud van Ruymbeke. Plus de 40 témoins sont attendus, dont 33 cités par la défense.
«Duplicité»
«J’ai commis des erreurs», admet Jérôme Kerviel dans un livre paru début mai (L’engrenage, mémoires d’un trader), où il reconnaît avoir perdu le sens des réalités, jonglant avec les milliards quand ses collègues ne se frottaient qu’aux millions. Jérôme Kerviel, qui a passé 38 jours en prison en 2008, refuse pourtant d’assumer la perte de 4,9 milliards. Il assure avoir servi de «leurre», la banque, en médiatisant «l’affaire Kerviel» minimisant ainsi son exposition aux «subprimes». « Les services de contrôle ont été défaillants, la Société Générale a d’ailleurs été sanctionnée par la commission bancaire. Mais c’est Kerviel qui, «par sa duplicité, sa ruse a trompé sa hiérarchie» répond Jean Veil, avocat de la Société générale. Le procès doit s’achever le 25 juin.