En France, 98 % des instruments de musique sont importés de l’étranger

Musique : « 98 % sont importés »… Pas de made in France pour les instruments de musique

L’Asie règneAlors que les Victoires de la musique classique approchent, la question du savoir-faire entourant la fabrication des instruments suscite des inquiétudes
Camille Allain

C. A. avec AFP

Frédéric Chopin, Claude Debussy, Hector Berlioz, Maurice Ravel ou encore Erik Satie. Depuis des siècles, la France brille au palmarès des plus grands compositeurs de musique classique. Partout dans l’Hexagone, des centaines de milliers d’enfants, d’adolescents et d’adultes se crispent les doigts sur leur instrument pour reproduire quelques notes des airs les plus connus. Mais entre les mains, il est peu probable que l’instrument soit issu du savoir-faire français. Non. Comme bon nombre de produits manufacturés, les instruments de musique sont en écrasante majorité produits à l’étranger.

Alors que les Victoires de la musique classique se profilent mercredi, les professionnels français s’alarment d’un constat : « sur 1,5 million d’instruments vendus en France par an, 500.000 sont des instruments d’occasion. Et sur le million qui reste, 98 % sont importés », déplore Fanny Reyre-Ménard, présidente de la Chambre syndicale de la facture instrumentale (CSFI).

Cette organisation, qui regroupe artisans et distributeurs, fait le même constat que pour d’autres produits manufacturiers : en matière de production, c’est l’Asie du sud-est (Chine, Indonésie et Vietnam) qui donne le la. Cette offre à bas coûts, souvent disponible en quelques clics, s’apparente à la « fast fashion », au risque de se retrouver muni d’un objet qui « n’est pas vraiment opérant » ou pas assez « robuste », avertit Fanny Reyre-Ménard, luthière violon de métier. « Ce n’est pas de l’argent bien investi », estime-t-elle, rappelant qu’un instrument est censé être « extrêmement durable ».

Une filière de seconde main

Au rayon guitares, les premiers prix flirtent autour d’une centaine d’euros. Alléchant pour les néopratiquants mais impossible de s’aligner pour les artisans français, aux coûts de revient supérieurs. La plupart ont opté pour le haut de gamme. D’autres s’essayent au réemploi.

La manufacture Maugein, plus vieux fabricant français d’accordéons installé à Tulle (Corrèze), a été placée en liquidation judiciaire en septembre 2024.
La manufacture Maugein, plus vieux fabricant français d’accordéons installé à Tulle (Corrèze), a été placée en liquidation judiciaire en septembre 2024. - D.Ceyrac/AFP

Selmer, fabricant français d’instruments à vent fait partie de ceux qui ont créé une section d’occasions. « On les rénove et on les garantit. Et ça permet d’offrir à des musiciens des instruments Selmer, qui ont une qualité acoustique irréprochable, à des prix beaucoup plus doux », jusqu’à moins 50 % du prix d’origine, explique Thierry Oriez, président du groupe Henri Selmer Paris. La société, dont les ateliers sont basés à Mantes-la-Ville, fait travailler 300 artisans. Mais elle ne réalise que 10 % de son chiffre d’affaires en France.

Des liquidations judiciaires chez les anciens

La situation est parfois précaire : la manufacture Maugein, plus vieux fabricant français d’accordéons installé à Tulle (Corrèze), a été placée en liquidation judiciaire en septembre 2024. Relancée par un ancien salarié avec une masse salariale réduite, la fabrique labellisée entreprise du patrimoine vivant doit rouvrir au public mardi.