Torturée enfant par sa mère, violée par son beau-père, violentée adulte… Catherine raconte « l’enfer » de sa vie
Livre•A travers son nouveau livre « Abandonnée par les siens », l’autrice Catherine Barneron partage sa vie cauchemardesque de l’enfance à l’âge adulteLucie Tollon
L'essentiel
- Catherine Barneron a vécu l’horreur absolue à tout âge : enfant, adolescente et adulte.
- Après l'avoir abandonnée, sa mère la récupère alors qu'elle a 6 ans et lui fait vivre, avec son beau-père, un véritable enfer. Loin de sa famille, le cauchemar ne s’arrêtera pas pour autant.
- Après son premier livre Et pourtant tu étais ma maman, l’autrice revient avec Abandonnée par les siens, un livre autobiographique aux éditions Archipel qui raconte l’horreur de sa vie.
- Pour 20 Minutes, Catherine Barneron revient sur son « enfer ». Sa vie, tout simplement.
Il y a des histoires qui ne sont pas entendables, mais elles peuvent être écrites. L’une d’entre elles est celle de Catherine Barneron. Des décennies d’effroi pour une simple « gamine » née sous le soleil du Sud. Une cruauté sans nom. La noirceur de l’homme à l’état pur. Pourtant, jusqu’à ses 6 ans, la petite brune vit une vie paisible chez sa marraine. Une vie d’enfant.
Mais l’innocence, la candeur et l’ignorance vont, à jamais, disparaître lorsque Suzanne*, sa mère décide, du jour au lendemain de récupérer sa fille avec son compagnon Maupin*. En une journée, le paradis enfantin se transforme en enfer.
Durant cinq ans, Catherine subira, au cœur de sa maison familiale à Vallagrègues dans le Gard, des violences physiques, de la torture et de la maltraitance de la part de sa mère. Affamée, enfermée, frappée… La petite Cathy devient le bouc émissaire devant ses demi-sœurs et frères par pure perversion. Derrière les violences physiques et psychologiques, la petite fille subit des violences sexuelles. Son beau-père, Maupin abuse d’elle presque chaque jour. « Des sodomies, des fellations et des actes sexuels imposés par ma propre mère », décrit, bien des années après, la martyre. Un traumatisme encore incompris pour l’enfant devenue femme aujourd’hui.
Dans ses chaussures trop petites, amaigrie et enveloppée dans des vêtements faits de sacs, Catherine se rappellera toute sa vie que son bien-être était « insupportable » pour sa mère. Au point qu’à l’âge de 10 ans, elle échappera de justesse à la mort après une péritonite non soignée.
Sa maladie lui sauvera pourtant la vie. Elle ne saura jamais grâce à qui, mais les services de protection de l’enfance sont appelés. Elle est désormais libérée de ses bourreaux, de sa propre famille. A 11 ans, la préadolescente est alors envoyée au foyer de la Providence à Nîmes. C’est là qu’elle découvre une vie en paix loin derrière « la mort ». A 11 ans, il était temps.
Décision naïve, conséquences néfastes
Aux côtés de ses nouvelles amies, elle ne manque plus de rien. Surtout d’amour grâce aux adultes présents pour ces filles de la Ddass. « Ils méritent la Légion d’honneur », s’exclame la Nîmoise d’origine. En grandissant, désormais protégée, elle découvre la gentillesse, l’humour, l’adolescence et même la mer. Rebelle comme toute personne voulant exister aux yeux des autres, et malgré son attachement à la Providence, une simple décision naïve d’ado – de « petite frappe » comme elle se décrit elle-même – la mènera, de nouveau, à sa perte.
Un soir, elle décide de « faire le mur » avec une de ses camarades. Elle rencontre dans le cœur de Nîmes, deux connaissances de sa copine. Mais cette petite fugue nocturne se termine en kidnapping. Durant trois jours, Catherine est enfermée dans un appartement pour y être prostituée. Elle réussit à s’échapper et à rentrer à son foyer. Malheureusement, en aidant la police à démanteler ce réseau de proxénétisme, la jeune ado est envoyée en Charente pour sa sécurité.
Présentée comme une menace pour la tranquillité des pensionnaires, le foyer d’Angoulême la piège avec de la drogue. Aussitôt prévenu, le juge l’envoie dans l’association d’aides aux toxicomanes Le Patriarche à Toulouse…
La secte de Lucien Engelmajer
Si l’enfer est pavé de bonnes intentions, au Patriarche, il n’est pavé que d’atrocités. A peine arrivée entre les quatre murs du « centre de réinsertion » à Saint-Cézert en Haute-Garonne, elle est déshabillée et violée par deux hommes. Celle qui avait subi des agressions sexuelles toute son enfance était pourtant « encore vierge de devant ». Dans ce camp de travail pour « drogués », le calvaire ne s’arrête jamais. « Je vis parmi les zombies, je suis devenue esclave », décrit celle qui a connu la secte de Lucien Engelmajer.
Les « Ovnis », les gardiens du temple, torturent sans cacher leur plaisir tandis que les pensionnaires sont isolés, plus que jamais. Même lorsqu’elle tente de s’enfuir, elle est agressée sexuellement par un passant en voiture… Transférée ensuite dans un autre lieu du Patriarche, elle connaît une nouvelle escalade de violence. « De la boucherie », résumera Catherine qui a laissé là-bas une partie de son âme. Durant des années, elle fera le tour des centres du Patriarche qui ont ouvert un peu partout en France et en Europe sur le dos de leurs victimes. Elle finit par atterrir à Paris où, à la majorité, elle commence à retrouver un semblant de liberté.
Le premier jour du reste de sa vie ?
La jeune femme à l’accent du Sud prend peu à peu le pli de sa nouvelle vie dans la capitale. Mais les démons de son passé ne sont jamais loin. Comme une main démoniaque sur son épaule juvénile, elle tombe dans l’héroïne, tente de se prostituer mais, comme un vague faisceau de lumière dans le noir brouillard de sa vie, elle trouve refuge auprès de personnes qui lui sauveront, à maintes reprises, la vie. « Si la vie peut apparaître comme une succession de catastrophes, j’estime que j’ai toujours eu une chance extraordinaire, celle de rencontrer des personnes dont un mot ou un geste m’ont tirée du précipice. » A Paris, elle tombe pour la première fois amoureuse de JM. La première fois pour elle, à 18 ans, qu’elle a des relations consenties et volontaires. De cet amour naîtra son premier fils, Bob*.
Passage par la case prison
De retour à Nîmes, elle retrouve comme vie la galère et sa mère. Suzanne continue de torturer psychologiquement sa fille, de tenter de la détruire. Par sa force et pour son fils, elle quitte les méandres de son passé et s’installe à Valence dans la Drôme. Elle y rencontrera son futur mari Gilles. Une histoire qui finira en prison.
Après des années de violences physiques et psychologiques, un soir alors que des couples d’amis sont présents, elle menace Gilles qui l’avait agressée devant tout le monde. Une fois de trop. Alors qu’elle tient la carabine de son mari, elle tire à bout portant. Ce dernier meurt sur le coup. Elle attend la police et avoue tout : elle pensait que l'arme n'était pas chargée.
La jeune femme passe quelques années difficiles derrière les barreaux à « assumer cette punition » pour cet « acte effroyable qu’est de prendre la vie de quelqu’un ». La prison lui rappelle les centres du Patriarche et toutes ces années où l’isolement, le froid et l’inhumanité étaient ses seuls compagnons.
Jacques Dessange, Françoise Hardy, Tibo InShape
Mais de sa vie hors du commun, il y a toute de même quelques anecdotes qui font sourire et qui montrent que, malgré l’orage, Catherine ne s’est jamais laissée abattre. Comme la fois où elle a refusé une place auprès d’un coiffeur lors de sa formation… un certain Jacques Dessange. Ou lorsqu’elle coiffait des célébrités comme Françoise Hardy. Aujourd’hui, une nouvelle relation est née avec le premier youtubeur de France : Tibo InShape, à qui elle se livre régulièrement.
Désormais, au calme dans sa campagne espagnole, elle se remémore, sans pathos, son passé, ses épreuves, en se souvenant tous les jours, de chaque moment, sans pour autant pouvoir y donner une temporalité, comme si le dable n’avait pas d’heure.
*Les prénoms ont été changés.
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