Dordogne : Bientôt démoli ou pas ? Où en est le chantier de la déviation de Beynac
au long cours•Le marché public pour la remise en état du site, sur lequel les travaux sont arrêtés depuis 2018, ne sera pas mis en démolition effective avant les conclusions du centre d’études Cerema
Elsa Provenzano
L'essentiel
- Le Département a enfin attribué le marché de démolition des piles de la déviation routière de Beynac, pour se conformer à la décision de justice, même s’il conteste cette condamnation et a l’intention de réutiliser ces piles dans un nouveau projet de déviation.
- Les associations écologistes opposées au projet se réjouissent de cette décision qu’elles considèrent comme une victoire, fruit de leurs actions et occupations de chantier.
- Le président du Département déplore ces années perdues et estime que l’arrêt définitif du projet coûterait au total 40 millions d’euros, contre 20 millions pour le nouveau projet avec réutilisation des piles.
Cette déviation verra-t-elle le jour un jour ? « Le département de la Dordogne tient enfin son engagement envers la justice administrative qui lui avait enjoint de démolir les piles (de la déviation routière de trois kilomètres) en 2019. Nous demandons qu’elle soit faite cette année », se réjouit dans un communiqué ce mercredi Gérard Charollois, président de la Sepanso de la Dordogne.
Les opposants à cette déviation qui doit permettre d’éviter un trafic important de poids lourds, dans le beau village de Beynac, célèbre pour son château, se réjouissent de l’attribution du marché de remise en état du site de la déviation, paru au Bulletin officiel des annonces des marchés publics, le 20 avril 2024.
Rien n’a bougé depuis 2018
Dans ce dossier, qui avait obtenu une première autorisation, le Conseil d’État a suspendu les travaux depuis décembre 2018 mais presque rien n’a bougé sur le site depuis. Seule une route d’1,2 km « toute neuve », souligne avec agacement le président du département Germinal Peiro (PS), a déjà été détruite.
Et pour ne pas avoir démarré les travaux de démolition avec 127 jours de retard, et ne les avoir toujours pas entièrement réalisés, la collectivité a été condamnée mi-avril à payer 1,4 million d’euros par la cour administrative d’appel de Bordeaux.
Les piles réutilisées pour un autre projet ?
« Des entreprises ont été retenues pour la démolition des piles mais auparavant, précise Germinal Peiro, elles réalisent des études qui concernent les modalités de démolition et leurs impacts sur l’environnement, comme demandé par le Cerema ».
Un risque de pollution des nappes d’eau pourrait exister, selon la collectivité. Ce sont les garants de la concertation, lancé dans le cadre de la procédure d’un nouveau projet de déviation, qui ont sollicité le Cérema.
Ça rechigne à démolir les piles
Car, si elle rechigne autant à démolir les piles c’est qu’elle a soumis un nouveau projet de déviation (dont la déclaration d’intention remonte à un an) à la préfecture, qui comprend leur réutilisation. « Va-t-on atteindre un sommet d’absurdité dans ce dossier avec une contrainte à démolir et dans le même temps une autorisation de réutilisation des piles (pas encore formulée) ? », fustige le président du département.
« On respecte la justice même si on la trouve sévère », assure le président, en l’attente d’une nouvelle autorisation qui fait la part belle aux modalités douces (gare, navettes électriques) et se donne pour objectif de « sécuriser la traversée de Beynac. »
« Une dépense inutile » ?
L’attribution du marché de démolition sonne comme une victoire pour les opposants. « Les associations s’en réjouissent et rappellent que leurs actions (y compris les occupations de chantier en 2018) ont toujours eu pour but d’éviter ou de diminuer une dépense inutile et destructrice », ajoute Philippe d’Eaubonne, président de l’association pour la sauvegarde de la vallée de la Dordogne (ASVD).
« On aura perdu cinq années et pendant ce temps-là les prix des matériaux ont pris 40 %, tempête de son côté le président du Département. Et, la surveillance du chantier nous a coûté au moins 10 à 15 millions d’euros. » Il estime que si le projet s’arrête définitivement, le coût total s’élèvera à 40 millions d’euros tandis que le nouveau projet, qui réutilise les piles, coûterait une vingtaine de millions. Des chiffres contestés par les détracteurs du projet.