Stêques, boulaites… Un fabricant tourne en ridicule le décret sur l’appellation des produits végétariens
Détournement•Un fabricant de produits à base de protéines végétales a choisi l’ironie pour répondre au nouveau décret interdisant d’utiliser des termes de boucherieG.D.
Stêques, boulaites ou neugâtes. Voilà la façon humoristique de rebaptiser les steaks, boulettes ou autres nuggets qu’a choisie la société Accro pour tenter d’échapper au nouveau décret publié, fin février, par le gouvernement français.
Fabricant d’alternatives végétariennes à la viande, cette entreprise, installée à Vitry-en-Artois, dans le Pas-de-Calais, ironise sur les réseaux sociaux à propos des dénominations qui doivent être réservées à la boucherie et aux produits d’origine animale, à partir du 1er mai 2024.
« Juridiquement, ça ne pourrait pas passer »
« Il y a une volonté de tourner ce décret en ridicule en mettant en place cette campagne tout aussi ridicule, plaisante le directeur d’Accro, Renaud Saïsset. Mais on sait très bien que juridiquement, ça ne pourrait pas passer. » Alors derrière le détournement phonétique du vocabulaire, l’entreprise a engagé une procédure judiciaire, sérieuse celle-là, en compagnie d’autres sociétés agroalimentaires françaises.
« Nous avons déposé un nouveau recours en référé urgence devant le conseil d’Etat », annonce Renaud Saïsset qui se dit « très surpris de l’arrivée de ce nouveau décret ». En effet, un premier décret, pris en juillet 2022 sur le même sujet, avait déjà été suspendu en urgence par la justice en attendant un jugement sur le fond.
Car la revendication des acteurs de la filière animale ne date pas d’hier. Ces derniers estiment que des termes comme « jambon végétal », « saucisse vegan » ou « bacon végétarien » peuvent créer une certaine confusion chez les consommateurs.
Distorsion de concurrence
Une hypothèse que réfute Renaud Saïsset : « Il n’y a aucune volonté de tromper le consommateur, toutes les enquêtes le prouvent. Il est bien marqué 100 % végétal sur nos produits et ils sont vendus en dehors des rayons boucherie. »
Mais c’est surtout la distorsion de concurrence qui inquiète le chef d’entreprise. « Ce décret ne pénalise que les acteurs qui produisent en France, explique-t-il. Alors que nos concurrents européens pourront continuer à utiliser les termes saucisse ou steak. On sait que les habitudes culinaires sont très ancrées et que le changement de dénomination d’un produit peut introduire un flou chez le consommateur. »
Sans oublier l’obligation de détruire tous les emballages achetés par anticipation pour un an. « Pour une référence, ça peut représenter des dizaines de milliers d’euros », déplore Renaud Saïsset. Dans un marché encore de niche, malgré une forte expansion, les steaks au blé ou aux pois d’Accro vont-ils survivre ?
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