Compiègne : Un bonus-malus pour éloigner les familles de délinquants des logements sociaux est-il efficace ?
Punition•Dans l’Oise, le président de l’agglomération région de Compiègne, Philippe Marini, a imaginé un dispositif de notation des locataires HLM pour les sélectionner, mais l’efficacité reste à prouverG.D.
Noter les locataires pour éventuellement expulser les plus mauvais. C’est le nouveau dispositif que le président (LR) de l’agglomération de la région de Compiègne, Philippe Marini, a fait voter, il y a quelques semaines, par le conseil communautaire, pour attribuer les logements HLM sur son territoire. « Les personnes que je rencontre sont des personnes qui se plaignent de tapage, d’insécurité », explique l’élu, à BFMTV pour justifier ces mesures.
Le trafic de drogue fait perdre 25 points
Ce système de bonus-malus, qui vise à exclure les familles de délinquants lors des commissions d’attribution, selon Philippe Marini, doit s’ajouter aux critères obligatoires servant aujourd’hui à départager les candidats. Ainsi quatre malus ont été établis concernant au moins un membre du ménage : reconnu violent sur la base d’une condamnation (-10 points), ayant causé des troubles au voisinage (- 10 points), précédemment expulsé pour troubles locatifs (-20 points) et condamnation pour trafic de drogue (- 25 points).
Deux bonus de 5 points viennent faire un léger contrepoids : le premier concerne « l’implication dans la vie locale », le second pour les « travailleurs essentiels », exerçant un métier estimé en tension dans l’agglomération.
Pour Philippe Marini, il s’agit d'« un outil consultatif qui doit aider au choix de la commission d’attribution ». Or, cette nouvelle grille d’évaluation « maison », qui sanctionne l’ensemble d’un foyer, risque d’être « inopérante », prédit le directeur de l’Office public d’aménagement et de construction (OPAC) de l’Oise, Vincent Peronnaud.
Interdit de demander un extrait de casier judiciaire
« La loi impose des critères obligatoires et propose des critères optionnels pour déterminer la cotation de la demande de logements, précise-t-il à 20 Minutes. L’agglo de Compiègne vient d’ajouter des critères optionnels mais c’est une commission d’attribution indépendante qui reste seule habilitée à choisir les locataires. »
En clair, cette nouvelle cotation ne va pas changer grand-chose, à en croire Vincent Peronnaud. « On va recevoir une note, on ne saura pas ce qu’il y a derrière. Et on n’a pas le droit de demander un extrait de casier judiciaire pour connaître d’éventuelles condamnations », précise-t-il.
Joint par 20 Minutes, Philippe Marini précise qu’il sera « aisé de connaître le passif judiciaire grâce aux comptes rendus réguliers de la presse locale sur les condamnations » et que le dispositif ne concernera pas les expulsions, qui restent soumises à une décision de justice.
Trouble de jouissance de l’immeuble
« En dix ans, nous avons connu seulement six expulsions de logement, raconte le directeur de l’Opac. Concernant les trafics de drogue, il faut apporter la preuve d’un trouble de jouissance de l’immeuble. Si le dealer n’opère pas dans l’immeuble, par exemple, les juges ne peuvent pas prononcer d’expulsion. »
De toute façon, le problème est plus complexe. Comme l’évoque le directeur de l’office, « les dealers n’habitent pas forcément sur place et il est rare que les gros trafiquants logent en HLM, ils ont les moyens financiers d’habiter ailleurs. »