On est loin d’en avoir terminé avec les punaises de lit
Sales bêtes•En octobre, la psychose « punaises de lit » a squatté la Une des médias pour être finalement reléguée au 2e, puis 3e plan, avant de disparaître. Sauf que les bébêtes sont toujours là, à pourrir la vie de nombreux Français qui peinent à s’en sortir
Mikaël Libert
L'essentiel
- Même si elles ont disparu du devant de la scène médiatique, les infestations de punaises de lit n’ont pas diminué en France. Un projet est d’ailleurs en cours sur ce sujet au laboratoire de biométrie et biologie évolutive de Lyon (LDBE).
- Parmi les chercheurs impliqués, Jean-Philippe David, du CNRS, travaille sur la problématique de la résistance des punaises de lit aux produits insecticides disponibles sur le marché.
- S’il n’a pas été encore prouvé que les traitements ont perdu de leur efficacité, le chercheur conseille néanmoins une utilisation raisonnée des insecticides pour éviter justement le développement de la résistance des insectes.
Piqûre de rappel. On ne va pas se mentir, une actualité chasse rapidement une autre. C’est un peu ce qui est arrivé avec la terrible infestation de punaises de lit subie par des centaines, voire des milliers, de Français en octobre dernier. Rendez-vous compte, même Cristina Cordula à vu son « magnifaïke » plumard pris d’assaut par ces insectes mangeurs d’hommes. Sauf que, depuis, les bestioles ont semble-t-il disparu des radars. Eh bien pas du tout. A l’instar de la « reine du shopping », ceux qui subissent une infestation ont toutes les peines du monde à s’en débarrasser. Pour Jean-Philippe David, chercheur au CNRS, on est encore en plein dedans.
« J’ai l’impression qu’on a découvert la problématique des punaises de lit ces derniers mois alors qu’elle ne date vraiment pas d’hier », s’étonne-t-il auprès de 20 Minutes. L’expert contribue justement à un projet autour de ces incestes mené par le laboratoire de biométrie et biologie évolutive de Lyon (LDBE). « On peut quand même dire que le phénomène s’est amplifié ces 10 ou 20 dernières années, avec l’intensification des échanges via les flux de marchandises et de personnes », poursuit le chercheur. Et non les flux migratoires d’ailleurs, « un argument politique totalement faux », martèle-t-il.
Des insectes entrés en résistance
Alors, pourquoi ne parvient-on pas à s’en débarrasser ? Comme c’est le cas pour les moustiques, ou d’autres insectes d’ailleurs, les punaises de lit peuvent développer une forme de résistance aux insecticides. C’est justement la spécialité de Jean-Philippe David : « C’est un processus de sélection naturelle qui est un peu accéléré dans le cas des punaises de lit. Des études ont déjà noté cela dans plusieurs pays, y compris en France. »
Ce phénomène de résistance peut devenir problématique. Faute de le comprendre, la grande question étant de savoir si les résistances constatées impactent l’efficacité des traitements.
Si tel était le cas, doit-on se résoudre à ne rien pouvoir faire face à des insectes aussi prompts à s’adapter ? « Effectivement, si l’on utilise trop d’insecticides, de manière inconsidérée et répétée, oui cela peut conduire à des phénomènes de résistance qui peuvent diminuer l’efficacité des traitements », reconnaît le chercheur. Il tempère néanmoins, assurant qu’une utilisation non systématique des traitements, uniquement dans des situations de très fortes infestations, n’engendre pas « une pression de sélection trop forte » chez les punaises. En gros, les insectes résistants restent minoritaires en cas d’utilisation de produits raisonnée.
De toute façon, il n’y a pas un traitement miracle, de « magic bullet », estime Jean-Philippe David. Pour lui, c’est vraiment le combo des différentes méthodes existantes qui est efficace : chaleur, désinfection, poudre de silice, pièges… Attention aussi aux professionnels qui proposent des traitements au Sniper 1.000 EC DDVP, un produit interdit en France depuis 2013 insiste l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Pour le Bacillus thuringiensis SA3A, toujours autorisé, l’Anses met en garde contre des « risques élevés » pour la santé humaine et l’environnement « en cas de non-respect des conditions d’utilisation imposées dans les autorisations de mise sur le marché ».