points chaudsCarcassonne, Montélimar, Agen, Nîmes… Quand la colère agricole dégénère

Manifestation des agriculteurs : Incendie à Narbonne, sanglier éventré à Agen… Quand la colère dégénère

points chaudsLa colère agricole s’étend de plus en plus. Avec la crainte de débordements, encore rares pour l’instant, mais qui pourraient s’accentuer si le conflit s’enlise
Jérôme Diesnis

Jérôme Diesnis

L'essentiel

  • La colère des agriculteurs se manifeste essentiellement par de nombreux blocages, pour le moment. Plusieurs villes en France sont totalement paralysées, à l’image de Montpellier, l’un des épicentres de la contestation agricole ce vendredi.
  • Les débordements sont encore rares, mais se sont déjà produits à plusieurs endroits, notamment dans la Drôme, le Gard, à Agen et Carcassonne, où un bâtiment de l’Etat a été dynamité.
  • C’est la crainte du gouvernement. Selon une note du service des renseignements, publié par le service police justice de TF1 LCI, « des risques de dérapages » sont élevés en cas d’enlisement de la situation au cours des prochains jours.

La colère des agriculteurs s’étend progressivement et avec elles de nombreuses actions de blocages. A l’image des 400 km d’autoroute bloquées entre l'A7 et l'A9, deux des plus grands axes autoroutiers de France. La plupart d’entre elles se déroulent dans le calme, sous le regard bienveillant ou résigné des automobilistes et celui passif des forces de l’ordre qui cherchent à éviter la confrontation. Même si la tension est extrêmement palpable pour une profession en détresse. Mais en plusieurs endroits, la colère des agriculteurs a dégénéré, voire carrément dérapé.

A Carcassonne

A Carcassonne, le bâtiment de la Dreal (Direction régionale de l’environnement de l’aménagement et du logement) a été soufflé par une explosion dans la nuit du 18 au 19 janvier. Le bâtiment était vide et en travaux. « Si aucun agent de l’État n’a été blessé, d’importants dégâts matériels sont à déplorer », déclare le préfet de l’Aude. Une enquête a été ouverte pour « dégradation par moyen dangereux d’un bien appartenant à autrui en bande organisée ». L’acte a été signé localement par le CAV (Comité d’action viticole), un groupe radical qui mène ponctuellement des actions violentes depuis plusieurs années, contre des bâtiments de l’Etat ou des négociants accusés d’importer massivement du vin étranger.

A Agen

A Agen, les agriculteurs s’en sont pris à une enseigne de restauration rapide en dispersant une botte de foin au sein du restaurant. Quelques heures plus tôt, ce 24 janvier, les membres de la coordination rurale, mécontents de leur échange avec les services de l’Etat, avaient arrosé de lisier la préfecture et enflammé des pneus devant le bâtiment. A Boé, près d’Agen, ils ont également provoqué l’effondrement d’une partie de la toiture d’un supermarché Leclerc qui avait été aspergée de lisier. Le magasin a dû être évacué et a été fermé toute la journée.

A Agen toujours

Après les pneus et les fanes de tomates déversés devant l’Inspection du travail ce jeudi à Agen, les agriculteurs mobilisés depuis lundi pour demander une meilleure rémunération de leur travail sont allés plus loin. Ils ont pendu et éventré un sanglier aux branches d’un arbre proche de l’administration. Les manifestants menés par la Coordination rurale, syndicat majoritaire de la chambre d’Agriculture et classé à droite, ont applaudi lorsque l’animal a été étripé sous leurs yeux. Quand ils ont été interrogés sur cette action qui a choqué une partie des passants, la réponse relayée par nos confrères de Sud-Ouest a été : « La plupart d’entre nous sommes chasseurs et les sangliers saccagent nos récoltes. »

A Montélimar à Nîmes

A Montélimar, sur l’autoroute A7, ainsi qu’à Nîmes, sur l’autoroute A9, ce sont des camions étrangers qui ont été la cible des agriculteurs. Jeudi matin plus d’une douzaine de véhicules ont ainsi été délestés de leur cargaison. « On a ouvert les camions et tout ce qui était étranger a été vidé », souligne Sylvie Meynier, viticultrice et deuxième vice-présidente de la FDSEA de la Drôme. Après avoir déversé les contenus des camions sur la chaussée, les agriculteurs y ont mis le feu. Toujours sur l'A9, près de Nîmes, des arbres ont été carrément été coupés pour être disposés sur la chaussée. A Gallargues-le-Montueux, ce vendredi, un camion a tenté de forcer un barrage. Un agriculteur aurait été blessé dans cette manœuvre.

A Narbonne

Un bâtiment vide de la Mutualité sociale agricole (MSA) à Narbonne a été victime vendredi d’un incendie en marge d’une manifestation d’agriculteurs, a-t-on appris auprès de la préfecture de l’Aude. « Le bâtiment de la MSA était vide, c’est un bâtiment de 300 m2 avec un étage, il y a eu un début d’incendie », a indiqué à l’AFP une porte-parole de la préfecture, précisant que l’incendie s’était déclaré « en marge de la manifestation » des agriculteurs, réunis sur place.

A Bordeaux

Des agriculteurs ont allumé des feux de paille et de palettes devant la préfecture et le conseil départemental, et déversé du fumier devant l’hôtel de région.

Des agriculteurs se rassemblent devant la Préfecture de la Gironde et le Département de la Gironde pour déverser fumier, foin et pneus devant le bâtiment, le 25 janvier 2024 à Bordeaux.
Des agriculteurs se rassemblent devant la Préfecture de la Gironde et le Département de la Gironde pour déverser fumier, foin et pneus devant le bâtiment, le 25 janvier 2024 à Bordeaux. - UGO AMEZ/SIPA

Depuis jeudi, quelques voix s’élèvent pour s’étonner de ces violences et, surtout, de la mansuétude des forces de l’ordre. Mais, pour le moment, le gouvernement tente d’éviter l’explosion. « On ne répond pas à la souffrance par la violence », a tempéré le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, jeudi, sur TF1. Selon une note du service des renseignements, publié par le service police justice de TF1 LCI, « des risques de dérapages » sont élevés en cas d’enlisement de la situation au cours des prochains jours.