Alain Delon : Comment rabibocher une famille qui se déchire ?
Que la mif'•Et si une fin heureuse était possible pour le feuilleton Delon ? Ces derniers jours Anouchka, Anthony et Alain-Fabien, les enfants d’Alain Delon, se sont déchirés dans la presse et sur le plateau téléXavier Regnier
L'essentiel
- Ces derniers jours, la famille d’Alain Delon se déchire dans les médias et par plaintes interposées. D’un côté, Anouchka, qui gère les soins de son père en Suisse, et favorisée par celui-ci. De l’autre, l’aîné, Anthony, dont la relation avec « le Guépard » a toujours été difficile et qui reproche à sa demi-sœur de profiter fiscalement d’Alain Delon.
- Au-delà du cas de la famille Delon, une famille aussi déchirée peut-elle se rabibocher ? Anne Marion de Cayeux, avocate spécialisée en droit de la famille, et Marlène Frich, psychothérapeute, ont répondu aux questions de 20 Minutes.
- « Pour résoudre un conflit, il faut rendre de la reconnaissance et redonner une marge de manœuvre dans la relation », avance l’avocate, qui plaide pour la médiation. Mais l’argent joue aussi un rôle central dans les conflits et leur résolution.
On aurait pu commencer cet article par une phrase de Dominic Toretto sur l’importance de la famille. Mais toutes les familles ne ressemblent pas à celle du héros de Fast and Furious, celle d’Alain Delon peut en témoigner. Depuis plusieurs mois, l’entourage du « Guépard » se déchire par plaintes et interviews interposées. Entre Anouchka, la fille qui prend soin de son père en Suisse, et Anthony, le fils aîné resté dans l’ombre, la guerre est totale. Mais comme à 20 Minutes, on aime les fins heureuses (un reste des films de Noël sans doute), on s’est demandé comment rabibocher une famille déchirée par les séparations, les rancœurs, l’argent et la succession.
« Pour des affaires avec des familles en rupture, la médiation est l’endroit le plus approprié pour que tout le monde puisse s’asseoir et s’exprimer », estime Anne Marion de Cayeux, avocate spécialisée en droit de la famille et elle-même médiatrice. Le recours à un tiers neutre dans « un lieu et un temps donné, avec une conversation couverte par la confidentialité » permet de « favoriser l’écouter mutuelle », explique-t-elle. « Dire sa haine, sa rage » est « indispensable » pour espérer rebâtir une relation, abonde la conseillère conjugale et clinicienne du couple Marlène Frich. Même si « les blessures peuvent rester à vif des années » et que le temps est un facteur important, « il faut trouver ce qui se joue derrière » les attaques, insiste-t-elle.
La reconnaissance, élément clé
Une profondeur que le seul truchement judiciaire ne permet pas d’atteindre. « On a toujours le sentiment de s’être fait flouer » au tribunal, résume la psychothérapeute. A l’inverse, le recours à un médiateur permet de « dépasser » l’impression après un procès qu’il y a « un gagnant et un perdant, qui est une vision occidentale très violente », défend Me Cayeux. « Notre droit n’est d’ailleurs pas très adapté aux familles recomposées », comme celle des Delon, note-t-elle.
Entre une nouvelle épouse et des enfants issus de différentes unions, la succession pose ainsi « la question de la reconnaissance » de chacun au sein d’une famille, selon Marlène Frich. Un problème d’autant plus aigu chez Anthony Delon qu’il y a une « impossibilité à exister par soi-même », d’abord en se voyant interdire par son père d’utiliser le nom « A. Delon » pour la marque de blouson de cuir qu’il crée, puis en tant que « fils de » au cinéma. « Pour résoudre un conflit, il faut rendre de la reconnaissance et redonner une marge de manœuvre dans la relation », théorise Anne Marion de Cayeux.
« Combien tu m’aimes »
Une reconnaissance qui peut passer par un règlement financier. « C’est souvent par l’argent que les conflits se manifestent », car il y a à la fois un aspect « tangible » et une « forte valeur symbolique » en jeu, souligne l’avocate, qui ajoute « combien tu m’aimes ». Or, « du point de vue de celui qui transmet, l’attachement ne rentre pas forcément en compte ». « L’argent rend les choses très compliquées », surtout quand de fortes sommes sont en jeu, appuie Marlène Frich. La clinicienne salue le « cadre » posé bien en amont par les riches dynasties, même si « ça n’évite pas les disputes ». « Il existe aussi dans ces familles un sentiment de devoir protéger le patrimoine immobilier, financier, mais aussi le nom », analyse-t-elle. A l’inverse, « la peopolisation est la porte ouverte à tous les excès » avec un étalement du conflit dans la presse « nocif ».
Mais toutes les familles n’ont pas les millions de la famille Delon mis en jeu. D’autres problématiques restent toutefois communes. « Prendre soin du parent vieillissant peut être vu comme une occasion d’obtenir un testament arrangeant », glisse Anne Marion de Cayeux, mais « ce que ça coûte moralement, en temps et en énergie » à l’aidant est parfois oublié. Encore une question de reconnaissance.
Dernier élément qui peut ramener à la paix dans une famille, « il faut qu’il y ait un membre de la fratrie qui continue à tisser les liens, à communiquer avec tout le monde », plaide Marlène Frich. Et si jamais, à l’issue de la médiation, « on se rend compte qu’on n’est pas forcément en capacité de reconstituer le patchwork », elle est aussi l’occasion d'« assumer de renoncer à un idéal » et de « retrouver une liberté », ajoute Anne Marion de Cayeux. « On croit qu’une famille, c’est de l’amour et des fêtes de Noël, mais c’est la famille idéale du maréchal Pétain, des années 1950. Très peu de familles sont comme ça », conclut-elle.
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