politiqueHarcèlement, homosexualité… Pourquoi Gabriel Attal expose sa vie privée

Gabriel Attal : Harcèlement scolaire, homosexualité, perte de son père… Pourquoi expose-t-il sa vie privée ?

politiqueInvitée de l’émission « Sept à Huit » dimanche sur TF1, le ministre de l’Education a dévoilé certaines de ses fêlures
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

L'essentiel

  • «Si j’ai à ce point à cœur de m’engager sur le harcèlement scolaire, c’est peut-être parce que le fait d’avoir vécu des injures, ça a forgé quelque chose », a déclaré dimanche Gabriel Attal sur TF1.
  • Le ministre a abordé d’autres sujets intimes, mais en maîtrisant totalement le timing et la teneur de ses confidences.
  • Une stratégie de communication qui s’inscrit dans sa stratégie politique à plus long terme.

Un ton grave, un regard empli d’émotion et des confessions. Dimanche, dans l’émission Sept à Huit sur TF1, le ministre de l’Education, Gabriel Attal, a surpris les spectateurs en dévoilant des pans de sa vie privée. Il a notamment raconté avoir subi « un déferlement d’insultes et d’injures » quand il était collégien. Tout en évoquant son coming out, la mort brutale de son père, l’antisémitisme dont il est victime, l’inquiétude de sa mère pour lui…

Un exercice de vérité qui pourrait sembler risqué pour le ministre de l’Education, qui jouit d’une très bonne cote de popularité : en octobre, il est arrivé en troisième position des personnalités préférées des Français du Baromètre politique Ipsos-Le Point. Mais selon Philippe Maarek, professeur émérite des universités, spécialiste en communication politique, sa démarche n’a rien d’inédit : « le ministre de l’Education s’inscrit dans un mouvement global de publicisation de la vie privée des politiques qui s’est imposé en France depuis Nicolas Sarkozy. Cette forme de marketing politique est désormais bien entendue en France, même si ce phénomène a démarré bien plus tard chez nous qu’aux Etats-Unis.  »

Une stratégie de com' bien huilée

Gabriel Attal, qui a été porte-parole du gouvernement avec succès, est rompu aux arcanes de la communication politique. Pas étonnant donc qu’il ait choisi un cadre sécurisant pour ses confessions : « Il s’agit de la séquence intime de l’émission, en face-à-face avec la journaliste, Audrey Crespo-Mara, qui ne lui pose pas de question piège. On sent qu’il a préparé son intervention et qu’il contrôle de bout en bout sa stratégie de communication », souligne Christel Bertrand, consultante en communication politique et en communication de crise. L’émission réunissant en moyenne chaque dimanche soir plus de 4,5 millions de téléspectateurs, le ministre avait aussi la garantie que son entretien susciterait un fort écho.

Le timing choisi par Gabriel Attal ne tient pas non plus du hasard. Car le gouvernement a récemment annoncé une batterie de mesures contre le harcèlement scolaire. « Il a fait de ce sujet un de ses chevaux de bataille. Raconter qu’il a été lui-même victime de ce fléau, c’est montrer aux Français la sincérité de son combat », explique Christel Bertrand. Une manière de renforcer la crédibilité de son action, donc.

Quels risques à communiquer de la sorte ?

Mais à dévoiler ainsi ses fêlures, ne prend-il pas le risque d’apparaître vulnérable ? C’est tout le contraire, selon Philippe Maarek : « Il montre qu’il a su traverser des épreuves et il démine les critiques qui lui sont faites sur les réseaux sociaux. Ce qui le crédibilise davantage et le rend encore plus apte à prendre des mesures fortes aux yeux du grand public ».

Ses confidences ne risquent-elles pas également d’irriter les enseignants ? Christel Bertrand ne le croit pas non plus : « Il répond de son bureau Rue de Grenelle et parle en priorité du harcèlement, donc il n’a pas quitté son costume de ministre et ne peut pas être taxé de faire diversion », souligne-t-elle.

« En se dévoilant ainsi, il paraît plus humain »

Difficile enfin de ne pas voir dans son intervention médiatique à Sept à huit une manière pour le ministre de jeter des ponts vers l’avenir. Surtout quand on sait qu’en octobre, il était crédité de 19 % des intentions de vote à l’élection présidentielle de 2027 * dans un sondage Ifop-Fiducial pour Sud Radio et Le Figaro. « Gabriel Attal est en pleine ascension. Il a besoin d’une notoriété plus large et plus pérenne s’il veut durer politiquement. Et en se dévoilant ainsi, il paraît plus humain, dépoussière le discours politique, à l’heure où beaucoup de Français estiment que les personnalités politiques sont hors sol », souligne Christel Bertrand.

Reste que la forte présence de Gabriel Attal dans les médias pourrait finir par lasser. Mais ça aussi, le ministre semble l’avoir compris. Car à un moment dans l’interview, il déclare ne pas aimer parler de lui publiquement et dit qu’il ne le fera peut-être plus jamais après cela. « Il a compris qu’il fallait doser les confidences et a sans doute bouclé la boucle avec cette interview », indique Philippe Maarek.

* S’il était désigné comme le candidat du camp présidentiel